mercredi 28 février 2018

Syrie: Les enjeux sous-jacents de la bataille d’Al Ghouta René Naba



«De la rationalité occidentale dans la guerre de Syrie»

Un nouveau front s’est ouvert début février 2018 dans la périphérie de Damas, dans le secteur d’Al Ghouta, avec pour objectif majeur d’alléger la pression militaire exercée sur les forces turques et leurs supplétifs de l’Armée Syrienne Libre dans le nord de la Syrie, alors que l’offensive turque, -«l’opération rameau de l’olivier»- contre les forces kurdes de Syrie, lancée le 19 janvier 2018, marque le pas, faisant craindre un enlisement turc dans le chaudron syrien.
Les objectifs sous jacents de la nouvelle bataille d’Al Ghouta, menée principalement par des alliés de la Turquie et du Qatar -Ahrar Al Cham et Jaych Al Islam, viseraient, d’une part, à remettre en selle les groupements islamistes déconsidérés après une série de revers retentissants depuis la reconquête d’Alep en décembre 2016; à réinsérer, d’autre part, les puissances occidentales et leurs alliés pétromonarchiques dans le jeu diplomatique dont ils en ont été évincés par les performances militaires russes et de leurs alliés régionaux, les forces gouvernementales de l’Amée Arabe Syrienne, les Pasdaran (Iran) et le Hezbollah (Liban).
Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté samedi 24 Février 2018 à l’unanimité une résolution réclamant « sans délai » un cessez-le-feu humanitaire d’un mois en Syrie, alors que les batailles dans le secteur de la Ghouta orientale, périphérie de Damas, font rage. Deux des groupements islamistes «Jaych Al Islam» (Armée de l’Islam, pro saoudien) et Faylaq Ar Rahmane (La Brigade d’Al Rahman, pro Turquie-Qatar) ont souscrit à cette résolution dont sont exclus les groupements qualifiés de terroristes (Daech, Jabhat Al Nosra, ert Al Qaida). Ce fait confirme que la bataille de Ghouta oppose l’armée gouvernementale syrienne à des groupements terroristes, immergés au sein de la population civile, en guise de «boucliers humains», et bénéficiant des facilités de transit et de ravitaillement en armes des Israéliens, et non un assaut des forces gouvernementales contre des civils innocents, comme tend à l’accréditer la propagande occidentale et de leurs alliés pétromoanrchiques.
La Turquie a engagé ses troupes dans le secteur d’Afrine, le 19 janvier, contre les forces kurdes, encadrées par des Français et Américains, afin de mettre en échec le projet de création d‘une entité kurde indépendante dans le nord de la Syrie.
Aux yeux des stratèges occidentaux une telle entité viendrait en compensation de l’échec de la proclamation d’un état indépendant kurde dans le Nord de l’Irak. Un projet qui avait été conçu par les Américains et les Israéliens pour servir de plateforme à leurs menées anti iraniennes depuis le Nord de l’Irak, frontalier de l’Iran.
La nouvelle stratégie occidentale arrêtée lors d’une réunion à Londres en date du 11 janvier 2018 prévoierait la relance de la campagne sur les armes chimiques, la partition du pays, le sabotage du processus de reconciliation intersyrienne menée sous l’égide russe à Sotchi, de même que le cadrage de la Turquie, unique pays musulman membre fondateur de l’Otan qui a pris ses distances avec ses alliés atlantistes.
Pour aller plus loin sur ce sujet, cf ce lien
Jadis fer de lance du combat contre la Syrie, Ankara craint que le projet occidental ne débouche sur un démembrement de la Turquie avec la relance se l’irredentisme kurde. Le président Erdogan caresse le projet de créer une barrière humaine arabe dans la zone frontalière syro-turque, en installant dans ce secteur les 3,5 millions de Syriens réfugiés en Turquie, se débarrassant du même coup de ce fardeau humain et financier dans la perspective des prochaines échéances électorales.
Réputés pour leur versatilité et bien qu’encadrés par les Américains et les Français, les Kurdes ont fait appel au Président syrien Bachar Al Assad pour défendre «l’intégrité territoriale» de la Syrie et croiser le fer contre la Turquie, alors qu’ils figurent parmi les grands artisans du démembrement de leur pays d’accueil.
Au delà de ce rebondissement guerrier se pose la question de la rationalité occidentale et de leurs alliés kurdes dans la guerre de Syrie:
Pour les Kurdes, s’allier avec les États Unis, artisans de la capture d’Abdallah Ocalan, le chef charismatique du mouvement indépendantiste kurde de Turquie, puis réclamer l’aide de la Syrie, dont ils ont contribué à la déliquescence de son état central, relève à tout le moins d’une incohérence.
Pour les Occidentaux, s’opposer à l’indépendance de la Catalogne et de la Corse et s’employer à provoquer la partition de la Syrie, relève à tout le moins de la duplicité, dommageable pour la crédibilité de leur discours moralisateur.
Au déclenchement de la guerre de Syrie, la présence de la Russie était réduite à sa portion congrue. Sept ans après, elle dispose d’une importante base aérienne, à Hmeiymine, sur le littoral syrien, la première au Moyen Orient depuis l’époque des Tsars, doublée d’une base navale à Tartous; La Chine, d’un point d’escale à Tartous jouxtant la base navale russe, première percée militaire chinoise en Méditerranée depuis la nuit des temps.
En crise avec l’Otan dont elle a été un membre fondateur, la Turquie s’est considérablement rapprochée de l’Iran et de la Russie, les chefs de file de la contestation à l’hégémonie israélo-occidentale au Moyen Orient, alors que l’Iran est désormais militairement présente en Syrie, frontalier d’Israël, que l’État Hébreu a perdu la maîtrise absolue du ciel comme tend à le démonter la destruction d’un chasseur bombardier F16 israélien dans l’espace aérien syrien, et que le Hezbollah libanais aguerri par les combats de Syrie, s’est hissé au rang de grand décideur régional. La faute à qui?

Djihad mondial

Principaux événements
  • Dans la région de l’Euphrate au Nord d’Abu Kamal, les membres de l’Etat islamique ont poursuivi leurs activités de guérilla contre les forces des FDS et les forces syriennes. Dans la région d’Idlib, les forces syriennes n’ont effectué aucune activité significative cette semaine. Les combats ont été essentiellement concentrés dans la zone à l’Est de Damas (Ghouta orientale), où les Syriens et les Russes ont procédé à des frappes aériennes massives contre les bastions des organisations rebelles (faisant des centaines de morts). Dans la zone d’Afrin, les affrontements entre les forces turques et les forces kurdes (GPJ) ont continué.
  • L’Etat islamique continue de mener des actes de guérilla contre les forces de sécurité irakiennes et les milices chiites (la Mobilisation populaire) dans les diverses provinces de l’Irak. Selon nous, bien qu’il s’agisse généralement d’activités d’individus solitaires, les forces de sécurité irakiennes ont du mal à fournir une réponse efficace à l’activité de l’Etat islamique. Au moins 27 membres de la Mobilisation populaire ont été tués cette semaine au Sud-Ouest de Kirkouk par des membres de l’organisation déguisés en policiers.
  • Les forces de sécurité égyptiennes continuent leur opération (Sinaï 2018) contre les avant-postes de la Province du Sinaï de l’Etat islamique. L’opération égyptienne se concentre sur le Nord du Sinaï. Les porte-parole égyptiens ont annoncé le succès de l’opération, précisant que des centaines de personnes recherchées ont été tuées, blessées ou arrêtées et que l’infrastructure de l’Etat islamique a été détruite. Selon nous, la Province du Sinaï continue à fonctionner et les annonces égyptiennes sont exagérées.
  • Implication des Etats-Unis
    • A la suite d’une réunion avec le Président turc et le ministre turc des Affaires étrangères, le Secrétaire d’État américain Rex Tillerson a déclaré que les États-Unis avaient l’intention de maintenir une présence militaire en Syrie. Dans le cadre de cette présence, les États-Unis continueront de former des forces de sécurité, afin de s’assurer que les « forces locales » sont efficaces, professionnelles et responsables, et qu’elles respectent les droits de l’homme. Tillerson a noté la préoccupation américaine face aux récents événements dans le Nord-Ouest de la Syrie (cf., l’opération de la Turquie dans le secteur d’Afrin). Il a appelé toutes les parties à rester concentrées sur la défaite de l’Etat islamique, la désescalade, la résolution du conflit syrien, et la défense des civils innocents. Tillerson a noté que les États-Unis reconnaissent le droit légitime de la Turquie de protéger ses frontières, mais l’invitent à faire preuve de retenue dans les frappes dans la région d’Afrin et à ne pas aggraver la tension existante. Il a aussi fait comprendre à la Turquie que l’aide américaine aux forces des FDS serait limitée (Site Internet du département d’Etat, 16 février 2018).

    • Syrie
      La campagne de reprise de la région d’Idlib
      • Cette semaine, il n’y a pas eu de rapports d’une activité significative des troupes syriennes dans la campagne de reprise d’Idlib. Dans la zone du village d’Oum Al-Khalahil, environ 30 km au Sud-Ouest de la base aérienne d’Abu Ad-Duhur, des affrontements ont eu lieu entre le Siège de Libération d’Al-Sham et l’Etat islamique. Sept membres de l’Etat islamique ont été tués, et trois se sont rendus (Ibaa, 15 février 2018).
      La région d’Abu Kamal – Al-Mayadeen
      • Les membres de l’Etat islamique ont tiré sur des positions de l’armée syrienne à la périphérie d’Abu Kamal. Dans le village d’Hajin, environ 23 km au Nord d’Abu Kamal, les affrontements se sont poursuivis entre les membres de l’Etat islamique et les FDS. Les avions de la coalition internationale ont poursuivi leurs attaques aériennes contre des cibles de l’Etat islamique dans la région (Observatoire syrien des droits de l’homme, 16 février 2018).
      • L’armée syrienne a découvert un réseau de tunnels dans un quartier du village de Sabikhan sur la rive Ouest de l’Euphrate, à environ 22 km au Sud-Est d’Al-Mayadeen. Les tunnels incluaient seize espaces internes reliés entre eux. De l’équipement, des munitions, et des appareils de communication ont été trouvés à l’intérieur des tunnels (Chaîne Youtube Sana, 18 février 2018 ; agence de presse syrienne, 15 février 2018).
        La région de Deir ez-Zor
      Lutte pour le contrôle des champs de pétrole dans la région de Deir ez-Zor
      • Dans la région de Deir ez-Zor, parallèlement à la compétition sur le contrôle sécuritaire sur le terrain, existe également une concurrence commerciale pour le contrôle des champs de pétrole. Une page Facebook de nouvelles locales a rapporté que l’Etat islamique contrôle toujours plusieurs puits de pétrole dans la région désertique à l’Est de Deir ez-Zor. Selon le rapport, le pétrole brut est vendu par l’organisation à un prix inférieur à celui des FDS. En réponse, les FDS font pression sur les propriétaires de camions citerne et confisquent les véhicules qui ne sont pas autorisés à transférer du pétrole (Page Facebook EuphratesPost, 19 février 2018). Apparemment, l’attaque du 7 février 2018 réalisée par les FDS avec le soutien aérien de coalition contre une force syrienne qui avait traversé l’Euphrate, peut être considérée comme faisant partie de la lutte de pouvoir sur les champs de pétrole dans la région.
      Frappe d’une force syrienne par la coalition (Mise à jour)[1]
      • D’après plusieurs rapports, des civils russes qui travaillaient en tant qu' »entrepreneurs militaires » ont été tués dans les frappes aériennes du 7 février 2018. Les rapports sont fondés, entre autres, sur les messages des familles des victimes et des proches des personnes tuées dans les médias sociaux. Certains civils russes tués ou blessés appartenaient au Groupe Vagner[2] (Page Facebook Conflict Intelligence Team, institut de recherche russe basé Moscou, 12 février 2018 ; Bloomberg, 13 février 2018 ; RT, 15 février 2018 ; New York Times, 13 février 2018). Il semble que plusieurs dizaines de combattants russes ont été tués et blessés dans ces attaques aériennes (selon une autre version, seulement quelques civils ont été tués). Nous pensons que les rapports sur des centaines de morts russes sont exagérés.    
      Réactions américaines et russes sur l’incident du 7 février 2018 :
        • Selon le Secrétaire de la Défense James Mattis, la Russie a informé les États-Unis que ses combattants n’étaient pas présents dans la zone d’affrontement de Deir ez-Zor. Il a également ajouté qu’il n’était pas probable que l’attaque menée par les forces affiliées au régime syrien contre la base des FDS ait été coordonnée avec la Russie (Site Internet du secrétariat à la Défense, 13 février 2018).
        • La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova a déclaré que les informations sur la mort de centaines de civils dans les attaques étaient incorrectes. Elle a déclaré que selon les informations préliminaires, cinq personnes, apparemment des citoyens russes, ont été tuées dans un affrontement dont les causes doivent être approfondies (Site Internet du ministère russe de la Défense, 15 février 2018).
        • Selon le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, la possibilité de la présence de citoyens russes en Syrie qui ne sont pas des soldats de l’armée russe ne peut être exclue. Cependant, il a précisé que le Kremlin n’a pas d’information sur leur nombre (TASS, RIA, 14 février 2018).
      Damas
      • Au cours de la semaine, les affrontements entre les membres de l’Etat islamique et ceux du Siège de Libération d’Al-Sham dans le secteur du camp de réfugiés de Yarmouk (au Sud de Damas) se sont multipliés. L’Etat islamique a attaqué des avant-postes du Siège de Libération d’Al-Sham dans la partie Ouest du camp de réfugiés. Des sites Internet affiliés à l’Etat islamique ont signalé qu’après les affrontements, les membres de l’organisation ont réussi à prendre le contrôle de plusieurs quartiers et rues du camp (Khotwa, 16 février 2018). Le Siège de Libération d’Al-Sham aurait subi des pertes, dont certains de ses commandants (Enab Baladi, 17 février 2018). Après cinq jours de combats, l’Etat islamique aurait pris le contrôle de 50 % de la partie Sud du camp de réfugiés, tandis que le Siège de Libération d’Al-Sham en contrôlerait 30 %. En outre, l’Etat islamique contrôle apparemment des quartiers au Sud du camp de réfugiés, y compris Al-Assali et At-Tadamon, et la ville d’Al-Hajar al-Aswad (Butulat Al-Jaysh Al-Suri, 18 février 2018).

      Principaux développements en Irak
      Activités des forces de sécurité irakiennes contre les réseaux de l’Etat islamique dans le pays
      • Les affrontements entre les forces de sécurité irakiennes et des réseaux de l’Etat islamique se sont poursuivis dans tout le pays. Ci-après les principaux incidents :
        • La zone de Mossoul : Agissant sur la base de renseignements, les forces de sécurité irakiennes soutenues par des avions de la coalition ont tué 19 membres de l’Etat islamique dans la région d’Aski, à environ 35 km au Nord-Ouest de Mossoul (Agence de presse irakienne, 15 février 2018).
        • Diyala (région d’Aquba) : Trois membres de l’Etat islamique dans une voiture ont été tués par des combattants de la Mobilisation populaire à environ 66 km au Nord d’Aquba. Les autres membres qui étaient dans la voiture ont fui en direction d’Aquba (Agence de presse irakienne, 15 février 2018).
      • Province de Kirkouk : Des membres de l’Etat islamique déguisés en policiers ont attaqué une force de la Mobilisation populaire engagée dans une activité d’observation à plusieurs dizaines de kilomètres au Sud-Ouest de Kirkouk. Au moins 27 combattants de la Mobilisation populaireont été tués dans l’attaque, la plupart des habitants chiites de Basra, au Sud de l’Irak. L’Etat islamique a revendiqué la responsabilité de l’attaque.
      L’Egypte et la péninsule du Sinaï
      Poursuite de l’Opération « Sinaï 2018 » des forces de sécurité égyptiennes
      • Les forces de sécurité égyptiennes ont poursuivi leurs opérations de sécurité dans la péninsule du Sinaï dans le cadre de l’opération « Sinaï 2018. » Les porte-parole des forces armées égyptiennes ont fait état de nombreuses réalisations : nombreuses cibles terroristes frappées par l’armée de l’air, arrestation de centaines de personnes recherchées, destruction de bunkers, de centaines de cachettes et de dépôts d’armes, désactivation de près de 200 engins piégés, destruction de véhicules et de motos, démolition de tunnels et saisie de grandes quantités de drogues.L’opération est menée principalement au Nord du Sinaï, et les forces égyptiennes ont signalé que les habitants du Sinaï font preuve de coopération.
          
      Au cours de la campagne, les forces de sécurité égyptiennes ont identifié un « centre d’information » de la Province du Sinaï de l’Etat islamique, situé dans une structure temporaire faite d’étain dans une région désertique. Un ordinateur portable, deux dispositifs de communication sans fil, des cassettes audio, des CD, des textes religieux islamiques et de la trésorerie ont été trouvés sur place (Page Facebook officielle du porte-parole des forces armées égyptiennes, 18 février 2018).
         
      • Un article dans le journal Al-Jadeed Al-Araby, qui a examiné la première semaine de l’opération, a déclaré que les forces de l’armée égyptienne avaient tenté d’imposer leur contrôle sur de nouveaux secteurs au Sud de Rafah, mais que l’état de préparation militaire des membres de la Province du Sinaï de l’Etat islamique les a surpris. En conséquence, les forces égyptiennes ont subi des pertes et l’armée n’est entrée que dans quelques secteurs à l’Ouest et au Nord de Rafah. D’après des sources de l’hôpital militaire d’Al-Arish, 15 militaires et policiers ont été tués (Al-Araby Al-Jadeed, 16 février 2018).
      Réaction de la Province du Sinaï de l’Etat islamique
      • En réponse à l’activité intensive des forces de sécurité égyptienne, la Province du Sinaï de l’Etat islamique a publié une déclaration affirmant que dans la deuxième semaine de l’opération, centrée sur les secteurs de Rafah et Sheikh Zuweid, les membres de la Province du Sinaï ont continué à résister aux forces égyptiennes, détruisant 14 véhicules militaires et tuant et blessant plusieurs soldats égyptiens (Twitter, 17 février 2018).
      • Un éditorial publié dans l’hebdomadaire Al-Nabha de l’Etat islamique a été consacré aux combats dans la péninsule du Sinaï. L’éditorial explique que les membres de l’organisation prévoient de multiplier les attaques contre tous ceux qui luttent contre eux. L’éditorial constate que le jihad dans le Sinaï contre le régime du Président El-Sisi ne s’arrêtera pas. L’éditorial exprime l’espoir que la fin du régime est proche et que les soldats du califat attaqueront sa maison et transformeront Le Caire en une terre de l’Islam, où la charia régnera (Al-Nabaā’, numéro 119, 15 février 2018).
      • Al-Qaïda s’est également déclarée favorable aux combats de l’Etat islamique contre les forces du régime égyptien. Dans un enregistrement audio diffusé par l’institut Al-Sahab, le leader d’Al-Qaïda Ayman al-Zawahiri appelle les musulmans en Egypte à mener jihad contre le régime afin d’instaurer la charia. Selon lui, la révolution du peuple égyptien s’est terminée avec rien, parce que le « régime tyrannique corrompu » est revenu avec encore plus de force. Al-Zawahiri appelle à des attaques, des embuscades, des raids, des manifestations, des grèves, et des rassemblements visant à sauver les prisonniers. Il dit que cela devrait être un nouveau départ avec lequel tous les musulmans vont s’opposer aux « accords de cession » avec Israël et l’Egypte au sujet de la coopération en matière de sécurité avec les États-Unis (Institut d’information d’Al-Qaïda, 14 février 2018).
      Activités de l’Etat islamique dans le monde
      Crainte que les membres de l’Etat islamique de retour de Syrie et d’Irak arrivent en Libye et dans les pays du Sud du Sahara
      • En marge de la Conférence de Munich sur la sécurité, le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Shoukry a rencontré l’Envoyé des Nations Unies en Libye, Ghassan Salamé. Shoukry a mis en garde contre les tentatives des membres de l’Etat islamique de fuir la Syrie et l’Irak et de se rendre en Libye et dans les pays africains (Mali, Niger, Mauritanie, Tchad et Burkina Faso). Selon lui, l’Égypte est préoccupée par cette question, qui constitue une menace pour la sécurité et la stabilité dans la région (Al-Qods Al-Arabi, 17 février 2018).
      • Sky News a interviewé un membre de l’Etat islamique appelé Abu Saqr, qui a servi comme chef de la police d’Al-Raqqah lorsque la ville était sous le contrôle de l’Etat islamique. Dans l’interview, il a indiqué que la Libye était la nouvelle cible de l’organisation et la passerelle pour ses membres pour atteindre les pays européens. Abu Saqr a également noté qu’il y avait un certain nombre de réseaux de l’Etat islamique en Libye et a présumé que le pays allait devenir le siège principal de l’organisation (Al-Youm al-Sabea, 17 février 2018).
      Daghestan
      • Le 18 février 2018, un homme armé d’un fusil de chasse et d’un couteau a ouvert le feu à l’extérieur d’une église dans la ville de Kizlyar au Daghestan (près de la frontière avec la République tchétchène). Il a tiré sur les fidèles qui quittaient l’église. L’auteur de l’attaque a été abattu par la police après une lutte. Au moins cinq personnes ont été tuées et quatre autres ont été blessées, dont deux agents de sécurité. Selon les autorités russes, le tireur était Khalil Khalilov, 22 ans, un résident local. Elles ont précisé que l’enquête avait commencé et que toutes les possibilités sont examinées, y compris une attaque terroriste (Commission d’enquête russe, site Internet de l’agence de presse TASS, 18 et 19 février 2018).
      • L’agence de presse Amaq de l’Etat islamique n’a pas tardé à émettre un communiqué officiel indiquant qu’un membre de l’organisation était responsable de la fusillade. Selon un communiqué émis par la Province du Caucase, le tireur s’appelait Khalil le Daghestanais (Twitter, 18 février 2018). Selon des rapports non officiels, l’auteur a rejoint l’organisation l’an dernier et appartenait à cellule endormie (RBC, 18 février 2018). La chaîne Telegram Directorate 4 a publié une vidéo montrant le suspect prêtant allégeance à l’Etat islamique sur fond d’un drapeau de l’organisation, avec un fusil de chasse à ses côtés (lenta.ru, 18 février 2018).
      Activités de contre-terrorisme
      Tunisie
      • La police tunisienne aurait démantelé un réseau de trafic de jeunes femmes destinées à rejoindre les rangs de l’Etat islamique en Syrie. Le réseau avait recruté de jeunes femmes dans quatre gouvernorats tunisiens et les membres se déplaçaient librement d’un gouvernorat à l’autre malgré les strictes mesures de sécurité des forces de sécurité tunisiennes. Les autorités tunisiennes ne sont pas en mesure d’estimer le nombre de jeunes femmes tunisiennes enrôlées dans les rangs de l’Etat islamique, mais affirment que 40 % ont un bagage universitaire. Les experts en sécurité et les ONG estiment qu’elles sont plusieurs centaines et que la plupart d’entre elles se trouvent en Syrie et en Libye (Al-Youm al-Sabea, 15 février 2018).
      Maroc
      • Le ministère marocain de l’Intérieur a signalé l’arrestation de trois membres de l’Etat islamique dans les villes d’Al-Ayoun (contrôlée par le Maroc dans la partie Nord-Ouest du Sahara Occidental), Sala (près de Rabat), et Marrakech. Les trois hommes, âgés de 24 à 30 ans, ont prêté allégeance au chef de l’Etat islamique Abu Bakr al-Baghdadi. Ils étaient impliqués dans des activités d’incitation au meurtre et avaient tenté d’acquérir le savoir-faire et de l’expérience dans la fabrication d’explosifs et l’assemblage d’engins piégés. L’un d’eux avait fait des préparatifs pour commettre des attentats dans tout le pays (assabah.me, 15 février 2018).
      Liban
      • L’armée libanaise a annoncé que sept citoyens libanais et un citoyen syrien ont été jugés pour la mise en place d’un réseau affilié à l’Etat islamique au Liban (Compte Twitter officiel de l’armée libanaise, 15 février 2018). Les membres de la cellule, qui ont été arrêtés dans la zone d’Arsal au Nord-Est du pays, avaient prévu de mener des attaques terroristes à Beyrouth. Ils avaient reçu des instructions d’un commandant de l’Etat islamique du camp de réfugiés d’Ain al-Hilweh près de Sidon. Un autre terroriste a été tué lors d’une tentative d’arrestation à Tripoli, dans le Nord du Liban (Agence de presse Sana, 15 février 2018).
      [1] A ce sujet, votre notre bulletin "Pleins feux sur le jihad mondial" du 8-14 février 2018. 
      [2] Le Groupe Vagner est la plus grande organisation militaire en Russie. L'organisation réalise des projets militaires dans le monde entier et est même impliquée dans les combats dans les zones de conflit. L'organisation est active en Syrie de diverses façons, entre autres, dans la protection des champs de pétrole. La relation entre l'organisation et le Kremlin n'est pas claire, mais ses dirigeants auraient reçu des prix au Kremlin, et ses combattants sont formés dans les installations du ministère russe de la Défense (Wikipedia ; New York Times, 13 février 2018). 

Les Émirats arabes unis toujours plus près de Mars

Plus de 3 000 Émiratis ont émis le souhait de devenir astronaute après un appel à candidature de leur gouvernement. Ce n’est que l’un des volets d’un ambitieux programme spatial qui tourne en orbite autour de la planète Mars.

Ils partirent à 3 000 mais, à l’arrivée, ils ne seront plus que quatre. Les Émirats arabes unis (EAU) ont reçu plus de 3 000 candidatures pour devenir astronaute, a annoncé Saeed al-Gergawi, le directeur du programme Mars 2117, rapporte Les Échos, dimanche 18 février.
Pour le "Monsieur Espace" des EAU, ce serait l’expression de l’engouement de la population pour le programme national d’exploration spatiale qui vise, en toute simplicité, à être la première nation à installer une colonie habitable sur Mars.



To become a UAE Astronaut, you’ve to be physically fit and if you’re already a enthusiast, your chances of qualifying as an astronaut are bright! Don’t miss this opportunity; view criterion and apply today: http://mbrsc.ae/astronauts/ 
Plus de 5 milliards de dollars
Tous les candidats ne vont pas devenir des astronautes, ni même construire leur maison sur Mars. Il y a de tout parmi les aspirants “emironautes” : le plus jeune a 17 ans et le plus vieux 65 ans. Les responsables du programme Mars 2117 vont, pendant deux ans, effectuer un tri afin de ne retenir que quatre candidats, dont la première mission sera de rejoindre la Station spatiale internationale (ISS).
Cet appel à la population n’est qu’une petite goutte dans l’océan des ambitions nationales dans ce secteur. Le pays espère devenir la première puissance spatiale régionale. Certes, il ne prend pas de risque en affichant sa volonté de fonder la “première ville martienne” en 2117… c’est lointain.
Mais les EAU ont déjà mobilisé 5,4 milliards de dollars (4,34 milliards d’euros) pour mettre plusieurs projets en place. Le plus avancé est le programme de sonde martienne “Hope”. Elle devrait faire ses premiers tests en vol d’ici la fin de l’année, afin de se préparer pour un long voyage d'une durée de moins d’un an vers Mars en 2021. Elle aura pour objectif d’effectuer une analyse complète de l’atmosphère sur la planète rouge.
Toujours dans l’optique de coloniser Mars, les Émirats arabes unis comptent aussi dépenser 136 millions de dollars (109 millions d’euros) pour construire la réplique d’une “ville martienne” dans le désert. La Mars scientific city comptera plusieurs dômes sur une surface de 177 000 m² qui doivent permettre de se préparer aux conditions de vie sur la lointaine planète, telles que les radiations et les basses températures. Ces dômes seront dotés de laboratoires pour travailler sur la meilleure manière de fabriquer de la nourriture, générer de l’énergie ou gérer les réserves d’eau sur Mars. Une équipe de scientifiques internationaux devra y séjourner et travailler durant un an, une fois que l’édifice sera achevé à une date qui n’a pas encore été rendue publique.
Un satellite "made in EAU"
Tout l’effort spatial du pays du Golfe n’est pas uniquement tourné vers Mars. Avant la fin de l’année le gouvernement espère aussi lancer “KhalifaSat”, le premier satellite entièrement conçu par des ingénieurs locaux. Les Émirats arabes unis ont déjà mis plusieurs satellites en orbite, mais tous avaient été élaborés avec l’aide technique des Sud-Coréens.
Ce vaste programme ne sert pas uniquement à impressionner la galerie. Il participe à l’effort national de diversification économique. À l’instar de l’Arabie saoudite, les EAU cherchent à réduire leur dépendance aux revenus pétroliers. La course aux étoiles permet d’investir dans les technologies de pointe qui peuvent avoir des retombées économiques dans la vie de tous les jours. Sans la recherche spatiale - notamment pour les satellites -, il n’y aurait pas eu de GPS ni d’Internet, et nos parents n’auraient jamais connu le lait en poudre pour bébés. Reste à savoir de quelles innovations le programme martien des Émirats arabes unis va accoucher.
Première publication : 19/02/2018

Emirats Arabes Unis: réformer le discours religieux, une priorité dans le monde arabe

Réformer le discours religieux est une priorité dans le monde arabe, a déclaré Ali Abdel-Aal, président de la Chambre des représentants, le parlement égyptien, à la tête d’une délégation parlementaire égyptienne qui s’est rendue dans les Emirats Arabes Unis (EAU) du 26 au 27 février 2018.

La délégation, reçue par Amal Al-Qobiasi, présidente du Conseil national fédéral des Emirats, le parlement émirati, a participé à cette occasion à une session plénière du parlement des Emirats.

Lutte antiterroriste sur le plan des idées

Amal Al-Qobiasi a salué les relations stratégiques à tous les niveaux entre l’Egypte et les Emirats, “particulièrement dans le domaine de la lutte antiterroriste”. Abdel-Aal et Amal Al-Qobaisi ont visité à Abou Dhabi le Centre Sawab mis sur pied en partenariat entre les Etats-Unis et le gouvernement des EAU, une plateforme de médias sociaux dont l’objectif est de contrer les discours extrémistes et la propagande en ligne.
Non seulement le Centre Sawab aide à révéler les interprétations extrémistes et perverties de l’islam, mais il aide aussi à diffuser une compréhension modérée et correcte des versets et des traditions islamiques”, a déclaré Amal Al-Qobaisi.

Promouvoir l’islam modéré

Abdel-Aal a indiqué pour sa part que “la réforme du discours religieux est devenue une question très urgente dans la lutte contre le terrorisme”. “Comme vous le savez tous, les idéologies extrémistes et radicales sont le premier pas sur la voie du terrorisme”, a-t-il déclaré,  Abdel-Aal, ajoutant qu'”il est vrai que les mesures de sécurité sont un outil nécessaire dans la lutte contre les activités terroristes, mais une réflexion modérée et éclairée est devenue indispensable ces dernières années pour déraciner le terrorisme”.
La délégation parlementaire égyptienne a également visité le Centre international Hedaya pour combattre l’extrémisme violent, basé également à Abou Dhabi. La présidente du Conseil national fédéral des Emirats a expliqué que le Centre Hedaya a été créé pour aider à combattre les idéologies radicales et extrémistes et visant la réforme des programmes d’enseignement, la réhabilitation des victimes du terrorisme et l’orientation des personnes condamnées pour des crimes terroristes afin qu’elles aient une compréhension correcte de l’islam. (cath.ch/ahram/be)

De la razzia à la ratatouille : Les textes de l’islam

Le grand islamologue hongrois Isaac Yehouda Goldziher disait trouver dans les textes islamiques des « passages de l’ancien ou du Nouveau Testament, des dires de Rabbins, des notes d’apocryphes chrétiens, des doctrines de philosophes grecs, des maximes perses ou indiennes et même la prière du Seigneur ; tous[ces passages] surgissant comme autant de dires prophétiques ».[1]

Puin Gert renchérit et parle de « cocktails de textes ».
Pour ma part, j’utilise l’expression « razzia et ratatouille de textes coraniques » mais nous allons constater combien c’est une mixture toxique. L’exégèse montre clairement que Mahomet s’identifiait à Jésus, que ce dernier a été spolié de tous ses attributs : Mahomet serait lui-aussi, le premier et le dernier, l’alpha et l’oméga, le rédempteur, le sauveur, bref un autre messie. D’après la Tradition, une lumière émane de Mahomet, il aurait été créé depuis Adam, absorbant ainsi tous les attributs christiques sauf celui de la chasteté.[2]
Pour cet aperçu des razzias de textes coraniques, véritables scalps et de leur arrangement en soupe indigeste, le fil d’Ariane sera celui de la Femme au travers de deux univers où elle s’illustre particulièrement : le monde aquatique et celui du monde animal et des insectes.

Fantasmes aquatiques

L’image de l’eau souterraine paradisiaque est particulièrement obsédante dans le Coran ; c’est quasiment l’ultime espérance eschatologique. Jouir de la présence d’une verdure luxuriante, les pieds dans la flotte serait le nec plus ultra, l’unique activité coranique paradisiaque non dénuée de luxure. Tout le monde connaît les fameuses houris (les vierges dans le paradis, qui seraient la récompense sexuelle éternelle des bienheureux de l’islam), mais on ignore souvent les sculptures de nus de l’art omeyyade (doc 3) qui dépeignent merveilleusement les préoccupations mentales islamiques toutes focalisées sur ces voluptueuses naïades des sources.[3] Alors que toute la rhétorique de l’enfer s’est construite autour de l’image du feu, de la chaleur brûlante du sable du désert aride, celle du paradis, s’est bâtie sur le fantasme de l’élément liquide, coulant dans les oasis, les rivières et les ruisseaux d’un éden. Ces images fantasmées sont présentes dans les représentations de la Mosquée de Damas, puisées dans la source biblique. Mais dans l’Ancien Testament, ces liquidités encadrent une cosmogonie au-dessus de Tehom [4]. Elles ne sont pas une fin en soi ni un horizon eschatologique. Les abîmes dans la cosmologie biblique entourent la Terre mais n’accaparent pas les désirs lubriques des croyants. Plusieurs passages bibliques associent le monde liquide de Tehom à l’outre-monde (Ps 71. 20, Ps 107, Jb 38), retravaillant ainsi des mythes babyloniens de la déesse primordiale Tiamat (personnifie les eaux salées des océans où règne le chaos).
La quête de Zhu al-Qarnayn (« celui aux deux cornes », Alexandre le Grand selon les philologues) aboutit à la découverte d’une eau boueuse « où le soleil plonge » (Q18/86). Sa recherche de la mer des confins de la terre a été reconnue comme la copie d’un texte syriaque, La légende d’Alexandre, selon le grand orientaliste Noldeke (1836). Les ablutions prennent une telle importance dans le hadith que l’eau purifie même du péché. Tout le livre 2 du S ahih muslim, le plus célèbre d’entre eux, se déroule dans l’eau ; le terme nawafil qui désigne la prière est le calque phonétique de tefila, la prière juive, elle-même précédée d’ablutions.[5] Soulignons que la purification aquatique s’impose après avoir touché le chien, l’urine ou la femme.
A propos de l’eau, le Coran met en cause un phénomène universellement admis, la diffusion. Le seul argument apporté à la démonstration est la pseudo-conversion à l’islam du commandant Cousteau qui aurait découvert dans la mer deux eaux qui ne se mélangent pas, l’une salée et l’autre douce. Si cette affirmation est vraie à l’instant initial de la rencontre des deux eaux, elle est fausse par la suite : effectivement les deux eaux finissent par se mélanger.[6] Mais par la magie du sophisme immobile de l’islam, la frontière entre les deux eaux reste immuable pour que le texte coranique paraisse miraculeux, quitte à contredire la science.
En fait, cette conception sort tout droit de mythes mésopotamiens où l’univers n’est qu’un tout indifférencié rempli par l’eau originelle où Apsu, maître de l’eau douce (dans la mythologie sumérienne et akkadienne), et Timiat, la divinité babylonienne personnifiant l’eau salée, engendrent plusieurs générations de divinités.
Cette appétence pour la liquidité se trouve aussi dans les « sciences » de l’embryon. Les versets coraniques de 12 à 14 de la sourate 23 composent autour de la liquidité et des changements d’état de la matière : « Nous avons certes créé l’homme dun extrait dargile, puis Nous en fîmes une goutte de sperme dans un reposoir solide ». L’épisode entre l’argile et le sperme n’est pas indiqué. Cet intérêt pour le sperme vient des Grecs. La Semence de Galien dit : « Car toutes les parties de l’utérus ont le désir d’envelopper le sperme mais ne peuvent encore le faire car elles sont encore trop loin pour le toucher ». Le Coran renchérit : « Ensuite, Nous avons fait du sperme une adhérence, (traduite aussi caillot de sang), et de l’adhérence Nous avons créé un embryon » (traduit aussi bouillie). Les médecins grecs Hippocrate (370 avant J.-C.) et Galien (2e siècle après J.-C.) avaient notamment composé quelques essais concernant l’embryologie. Harith Ibn Kalada, médecin et futur compagnon de Mahomet, étudiait à l’Académie de médecine de Gundishapur en Perse, dans laquelle Galien y était enseigné.

Du Bestiaire et des insectes

Le Coran raffole des bestioles et rafistole des récits animaliers épars et disparates ; trois de ses sourates portent le nom de ces dernières. La sourate Les femmes est intercalée entre La vache, la table et les Bestiaux. Un hadith invite à prendre ses femmes même sur le bât d’un chameau. Certes, ce n’est que très récemment les savants saoudiens ont reconnu le qualificatif de « mammifères » aux femmes mais la doctrine coranique sur les Femmes supputait déjà cette dénomination. Il y a mille quatre cents ans déjà, Allah aurait « dicté » une sourate Les Femmes, jetant ainsi les bases de cette classification ! Malgré cette noble « dictée », les ulémas saoudiens ont attendu plus de mille quatre cents ans d’exégèse pour affirmer que les femmes avaient plus de droits qu’une chaise ou une table ; avant 2017, elles étaient considérées comme une propriété individuelle de l’homme. Désormais, elles ont un statut équivalent à certaines espèces animales (tels les singes supérieurs), on doit donc, au grand minimum, les nourrir, les abreuver et leur conférer un minimum d’attention et de respect. Ce qui n’était pas le cas au préalable.[7]
La sourate 2 s’intitule La vache et dès le verset 26, elle s’extasie sur le moustique. Le message talmudique « Hachem ne crée rien d’inutile » est repris avec avidité ici où il est affirmé qu’Allah prend en exemple le moustique. Mille quatre cents ans plus tard, la science occidentale découvre des caractéristiques étonnantes et fabuleuses à ce moustique. Donc Allah a donné le miracle du Coran ! Ensuite, le Coran sacralise les fourmis (sourate 27), les abeilles (sourate 16) et les araignées (sourate 29). La tradition islamique quant à elle, tergiverse sur les chevaux fantastiques mais maudit les chiens, quitte à inventer de nouveaux parasites. Un hadith vante les vertus de l’urine de chameaux. Depuis des religieux n’ont cessé de recommander ces vertus et des scientifiques musulmans de les confirmer en dépit des dangers sanitaires.
La sacralisation des abeilles est un relent d’Aristote qui, dans son ouvrage sur L’histoire des Animaux – les Abeilles, n’hésite pas à les considérer comme insectes divins. Tous les miracles sur le sujet puisent dans les travaux des Grecs et des Égyptiens. L’histoire de l’araignée islamique qui tisse sa toile pour protéger le divin Messager se trouve déjà dans un midrash où le roi David fut poursuivi par le roi Saül.[8] Cet épisode est évoqué dans la Sira(biographie) : Mahomet est sauvé des Koraïchites par l’araignée et sa toile.
Les chiens sont maudits. Est-ce un relent mosaïque, voire grec, où les créatures canines hybrides ou monstrueuses ont un rôle de premier plan dans le mythe (Cerbère et Scylla) ? Est-ce par un rejet de la culture perse où le chien est plutôt valorisé ? Selon la croyance zoroastrienne, le chien suit immédiatement l’homme dans la hiérarchie de création. Ces hadiths rapportés par Abou Hurayra, [9] évoquent deux points fondamentaux, il faut se débarrasser de ce qui reste dans le plat lapé par le chien et le laver sept fois avec de la terre. L’argumentaire islamique est le suivant : « Les médecins insistent sur l’obligation d’utiliser de la poussière pour laver le plat. Le secret qui se cache dernière cette méthode de nettoyage est que les microbes contenus dans la bave ou la salive du chien sont trop petits, ils peuvent facilement se cacher au fond du plat utilisé pour nourrir le chien. Ce microbe étant d’une nature liquide le rôle de la poussière est donc d’absorber le virus… Scientifiquement, la poussière contient deux matières éliminatrices des virus et des bactéries qui sont le Tatraxlin et l’Alttaralit et sont utilisées dans les opérations de stérilisation contre quelques germes (virus et bactéries). »… Le gros problème de cet article est qu’il ne cite aucune référence et n’utilise qu’un langage flou et imprécis. Les deux supposés antidotes, Tatraxlin et Alttaralit n’existent nulle part.
Concernant les animaux de type montures messianiques, on atteint l’apothéose de la razzia anarchique et frauduleuse. Si le prophète Isaïe (21:7) a vu un char attelé de deux chevaux, un cavalier sur un âne, un autre sur un chameau, c’est dans l’ouvrage Secrets de Siméon ben Yohaï [10] que ces montures sont citées. « Siméon emprisonné par le roi d’Édom, figure de l’Empereur de Byzance reçoit la révélation des mystères à partir de l’interprétation des oracles de Balaam [ ] lorsqu’il s’inquiète de la venue du royaume d’Ismaël. » Aussitôt [ ], l’ange supérieur, lui répondit : « Ne crains pas, fils d’homme ; le Tout-Puissant amènera le royaume d’Ismaël en vue de vous délivrer du méchant royaume d’Édom. Surgira (chez les Fils d’Ismaël) un prophète selon sa volonté, qui conquerra pour eux-mêmes la terre. [ ] Le cavalier monté sur un chameau représente les Fils d’Ismaël : ceux-ci sont une libération pour Israël, et ils préparent la venue du cavalier monté sur un âne qui représente le Messie [Zacharie 9:9]. »
Selon L. A. de Prémarre [11], « ces images ont inspiré les récits de la Tradition islamique sur les voyages du calife Omar en Syrie-Palestine après la conquête. Durant son califat, Omar vint quatre fois en Syrie-Palestine : la première fois, il était monté sur un cheval ; la deuxième fois sur un chameau ; la troisième fois, il interrompit son voyage avant dy entrer en raison de lépidémie de peste ; la quatrième fois, il était monté sur un âne. Omar est tout à la fois le Libérateur, monté sur un chameau, et le Messie, monté sur un âne et en haillons. Lécho des attentes messianiques juives est perceptible dans un récit que Tabarî attribue à Sâlim [725], un petit-fils d’Omar. Il faut noter que, dans aucune de ces deux versions, il nest indiqué qu’Omar se rendit lui-même à Aelia. Outre le fait quaucun des textes contemporains ou proches de ce temps-là ne mentionne Omar comme constructeur dun oratoire sur lesplanade, lhistoire des vêtements sales et déchirés d’Omar est la transposition sur lhagiographie de Sophronios dun récit islamique faisant partie de lhagiographie d’Omar, et dont on retrouve la trace chez Tabarî. Tout se passe non pas à lîliya (Aelia = Jérusalem) avec Sophronios, mais à Aylat (Eilat, sur le golfe de Aqaba) avec lévêque local, lequel nest pas nommé. »
Mahomet lui, ira à Aelia mais sa chevauchée sera mythique et sur un équidé à tête de femme non voilée. La cavalcade fantastique de Mahomet ressemble au voyage céleste décrit dans le livre zoroastrien, l’Ardā-Vīrāfnāmak, et l’équidé ailé du preux cavalier, le bouraq (doc 1), ressemble davantage à une antiquité perse (doc 2), ou à Pégase du mythe grec [12] qu’au modeste ânon du Christ. Cette monture a un visage de femme non voilée tout comme les visages des statues de femmes dénudées, affectionnées par les Omeyyades.
C’est donc une monture mythique perse ou grecque qu’a enfourchée le messager Mahomet pour actualiser les récits d’Isaïe. Il n’hésita pas à réquisitionner toutes les mythologies, à piller tous les récits des peuples conquis pour concocter une compilation aussi débridée qu’absurde. A noter que cette ascension sans aucune preuve, ni trace archéologique, ni scripturaire, encore moins témoin oculaire (sauf la représentation mythique imaginaire du bouraq, sans valeur au plan du réel de cette figuration fictive) : c’est un mauvais Sindbad sur son tapis volant des contes des mille et une nuits, seul argumentaire ridicule pour revendiquer ni plus ni moins l’esplanade du Temple.
Bref, si les textes islamiques sont tous issus de razzias, leur accommodation hétéroclite en manuel de spiritualité et livre saint est particulièrement infecte. Si ces butins de guerre textuels maladroitement agglomérés ressemblent plus à un mirage empli de lubricité qu’à une invitation à la spiritualité, cette mixture ne peut qu’éblouir les incultes, attendrir les naïfs crédules et conforter les pervers dans leurs vices par des promesses graveleuses.
L’humanité doit réagir pour ne pas sombrer dans le chaos de ce fatras et refuser de respirer les miasmes nauséabonds de cette bouillie de textes tous pillés et compilés en une mixture infâme.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Leila Qadr 
Doc 1 – Représentation islamique du bouraq
Doc 2 – Antiquité perse
Doc 3a – Statue de femme, Khirbat al-Mafjar, Jordanie, 8e siècle
Doc 3b – Statue de femme, Khirbat al-Mafjar, Jordanie, 8e siècle
The Rockefeller Museum, Jérusalem.

[1] Isaac Yehouda Goldziher, Introduction to islamic theology and law. Princeton University Press. Developpment of law, p. 40.
[4] Gn 1. 2, et ténèbres à la surface de l’Abîme [tehȏm].
[6] « Et c’est Lui qui donne libre cours aux deux mers : l’une douce, rafraîchissante, l’autre salée, amère. Il assigne entre les deux une zone intermédiaire et un barrage infranchissable » (Q25 :53).
[10] Mis fictivement sous le nom d’un célèbre rabbin du 2siècle de notre ère, Siméon ben Yohaï.
[11] L. A. de Premarre. (2002), Les Fondations de l’islam. Édition du Seuil. p. 156.