Nous n'aimons pas le peuple russe, ce peuple frère, parce que nous sommes américanisés et que les Américains souhaitent étendre leur empire et rencontrent une résistance du côté russe depuis toujours.
Nous sommes une nation sans mémoire. Une nation qui, depuis le débarquement de Normandie, au mépris de l’Histoire, se range sur la doxa américaine, croyant dur comme fer que les Russes sont des ennemis. Nous n’avons pas compris que ces Américains ont déstabilisé l’Ukraine, dressant en somme des Russes contre d’autres Russes, et qu’ils continuent leur manège entamé il y a cinquante ans, provoquant coups d’État et révolutions de l’Amérique du Sud au Moyen-Orient, de l’Asie à l’Afrique, mettant tout en œuvre pour que leurs âmes damnées gouvernent comme des pantins dans les pays qui jusqu’alors n’étaient pas leurs vassaux serviles.
Leur entreprise de colonisation des esprits est une mise à mort de l’homme dans l’homme, et il n’y a rien de plus désespérant au monde. Nous sommes aveuglés par cet État puéril aux desseins grossiers qui se résume à une superproduction hollywoodienne, une entreprise de divertissement et de communication, qui conquiert les esprits et fait main basse sur les mentalités par un martèlement incessant de gros titres et de slogans, par une scénarisation permanente de ses actions politiques, par une mise en scène permanente de soi, sans pudeur, narcissique et superficielle.
L’Amérique fabrique son histoire de plastique comme un blockbuster, en s’habillant du costume du super-héros sauveur d’une humanité essentiellement composée d’Américains moyens, comme si le reste du monde n’existait déjà plus. Et, bien entendu, tout cela procède d’un retournement vulgaire. Dans un contexte où toute alternative au modèle libéral américain se doit d’abdiquer, où l’Autre n’a pas lieu d’être, Poutine a toujours été un président honni et on en parle toujours avec une haine qui confine au ridicule. Car Poutine fait de la résistance ! Ne voit-on pas, pourtant, que les Russes sont nos frères ? Ne comprend-on pas tout ce qu’on leur doit ? Ne voit-on pas dans l’Histoire qui nous est commune combien nos échanges avec la Russie sont nécessaires ? Sommes-nous si aveugles à la beauté et sourds à l’intelligence ?
Comme si nous souhaitions tellement fort que, partout dans le monde, s’étende l’empire américain… Comme si nous souhaitions en finir avec la Russie en la réduisant en esclavage, en destituant Poutine par suffisance et mesquinerie, depuis nos confortables fauteuils de commissaires européens. La mort de Nemtsov est une aubaine : on accuse Poutine de l’avoir fait assassiner sans se poser la moindre question, et surtout pas celle de savoir à qui profite ce crime.
Nous sommes devenus fous. Nous n’aimons pas le peuple russe, ce peuple frère, parce que nous sommes américanisés et que les Américains souhaitent étendre leur empire et rencontrent une résistance du côté russe depuis toujours. Cette résistance est ontologique. Elle devrait nous alerter et nous devrions la considérer comme exemplaire. Il semble que nous ayons abandonné nos racines et notre pensée propre, notre génie et notre grandeur. La Russie est l’espoir en acte d’une décolonisation des esprits, d’une décolonisation des mentalités.
Où donc souhaitons-nous nous situer ? Hors de l’Histoire ? Je n’ose croire que nous soyons à ce point et volontairement un peuple servile, sans âme, coupé de son passé et sans avenir. Je n’ose croire que nous souhaitions en finir avec nous-mêmes. Je n’ose croire que nous soyons déjà morts.
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