Il a été décrit par Bloomberg comme "l'homme le plus dangereux de la vie politique aux Etats-Unis". Désormais, il est l'un des hommes les plus puissants et influents du pays. Stephen "Steve" Bannon vient d'être nommé par le président-élu, Donald Trump, "haut conseiller et chef de la stratégie" dans la future et nouvelle administration. L'ancien directeur de campagne, proche des milieux d'extrême droite, va conseiller dans les moindres détails le prochain président républicain, comme l'avait fait en son temps David Axelrod ou John David Podesta avec Barack Obama. Steve Bannon devrait travailler de pair avec Reince Priebus, président du parti républicain, nommé, lui, comme secrétaire général de la Maison-Blanche.
Alors que Donald Trump s'est récemment essayé au discours plus apaisé, qu'il a nommé de nombreuses figures très consensuelles du parti pour faire partie de son équipe, la nomination de Steve Bannon, qui n'a aucune expérience politique, à un poste aussi important indique bel et bien que Donald Trump n'a pas l'intention d'abandonner ses idées les plus droitières.
1Breitbart News
Steve Bannon, 62 ans, s'est fait connaître en reprenant la direction du site Breitbart News en 2012, après la mort de son fondateur Andrew Breitbart. Fondé en 2007, ce site est devenu la référence pour tous les partisans de la droite dure, de l'extrême droite aux nationalistes, en passant par les suprématistes et néonazis en tout genre, réunis sous la bannière de "l'Alt-Right", qui estiment que "l'identité blanche" est menacée par le multiculturalisme et l'immigration.
A la faveur de la candidature de Donald Trump, le site s'est fait remarquer, dès 2015, pour ses nombreux articles racistes, islamophobes, anti-immigrants. Régulièrement, le site relaye des informations fausses, complotistes ou vulgaires, comme en février où il affirmait que la charia allait remplacer la Constitution américaine si rien n'était fait ou encore que l'islam recommandait la "culture du viol".
Dans un autre article, le site soutient qu'"il n'y a pas de discrimination contre les femmes à l'embauche, elles sont juste nulles en entretien" ; ou encore que "la contraception rend les femmes peu attractives et folles"... Un de ses journalistes, Milo Yiannopoulos, auteur de nombreux tweets haineux, avait fait scandale après avoir tenu des propos racistes à l'encontre de l'actrice noire Leslie Jones.
C'est Breitbart News, devenu au fur et à mesure véritable arme de propagande du candidat républicain, qui a, le premier, relayé le scandale sexuel d'Anthony Weiner, ex-compagnon du bras droit d'Hillary Clinton, Huma Abedin, qui a conduit à l'affaire de la messagerie privée de la candidate démocrate. "Beaucoup d'employés ont peur de Steve Bannon. Il est vindicatif, méchant et n'hésite pas à être insultant. Bannon est une version miniature de Trump", a dit de lui un ancien rédacteur en chef du site démissionnaire, Ben Shapiro.
Le Southern Poverty Law Center (qui surveille les mouvements extrémistes) rappelle que le site Breitbart News fait partie des 1.000 premiers sites les plus populaires sur internet et des 200 sites les plus visités aux Etats-Unis. Tous les mois, il attire 21 millions de visiteurs et offre une alternative à ceux qui considèrent la chaîne conservatrice Fox News comme trop polie et trop lisse.
2Apolitique
Né dans une famille modeste de Norfolk en Virginie, Steve Bannon n'a pas toujours été républicain. Sa famille, avait-il confié à Bloomberg, était catholique irlandaise démocrate, pro-Kennedy et pro-syndicats. Très peu politisé, il est devenu un grand admirateur de Ronald Reagan - qu'il est toujours - après être entré dans la marine, déployé sur un navire de guerre en mer d'Arabie et dans le Golfe persique pendant quatre ans. "J'ai vu à quel point Jimmy Carter avait foutu le bordel", dira-t-il à Bloomberg. Steve Bannon s'est mué en personnage anti-establishment quand George Bush, devenu président, a, selon lui, "autant merdé que Carter". "Le pays entier était un désastre", a-t-il dit.
3"Seinfeld"
Après avoir quitté la marine, décroché un MBA à la Harvard Business School, travaillé chez Goldman Sachs dans la fusion-acquisition, Steve Bannon a créé une société d'investissement, Bannon & Co, avec d'anciens collègues. Cette société spécialisée dans les médias, s'est intéressée à l'industrie du cinéma et a commencé à investir dans les studios MGM. Steve Bannon a participé à la série culte "Seinfeld", notamment, pour laquelle il a reçu de juteux droits d'auteur et à partir de laquelle il a bâti une partie de sa fortune.
4Hollywood
Après avoir fait fortune, il est devenu producteur à Hollywood. L'un des films qu'il a produit, "Titus" avec Anthony Hopkins, sorti en 1999, a été nommé aux Oscars. A cette époque, selon l'une de ses collègues qui a travaillé dix-huit ans avec lui, Steve Bannon n'est pas encore "le Steve raciste dépeint aujourd'hui". Puis, il a commencé à faire ses propres films, se spécialisant dans les histoires politiques inspirées du 11-Septembre et de sa propre désillusion du président Carter. En 2004, il réalise un documentaire sur Ronald Reagan qu'il célèbre. Il a également produit en 2011 un documentaire sur une des représentantes du Tea Party, Sarah Palin, ainsi qu'un film en 2012 qui critique le mouvement Occupy Wall Street.
5Campagne
Steve Bannon a été nommé directeur de campagne de Donald Trump, à la suite de la démission de Paul Manafort. C'est lui qui a poussé le candidat a surfé sur un populisme exacerbé pour gagner la course. Sa nomination dans la campagne avait été vécue comme une provocation par un establishment républicain de plus en plus inquiet. Mais elle a été révélatrice du pouvoir d'influence de militants locaux extrémistes sur la campagne du milliardaire.
6Paul Ryan
Le speaker (président) républicain de la Chambre des représentants est devenu son ennemi public numéro 1. A travers Breitbart News, Steve Bannon n'a pas cessé de l'attaquer. Selon lui, Paul Ryan, leader d'une élite qu'il exècre, est beaucoup trop proche de Wall Street, et trop modéré face au libre-échange et à l'immigration. Selon le site The Hill, ce dernier aurait explicitement demandé sa tête. Toujours selon le site, Steve Bannon estime que Paul Ryan va se positionner pour l'élection 2020 en se présentant comme le sauveur du parti républicain.
Lors de la campagne, Paul Ryan avait dénoncé les propos racistes et misogynes du candidat du parti.
7Ku Klux Klan
La nomination de Steve Bannon a été applaudie par David Duke, l'ancien dirigeant du Ku Klux Clan, qui se présentait au Sénat en Louisiane. Andrew Anglin, propriétaire du "Daily Stormer", feuille de chou d'extrême droite populaire chez les néonazis, a déclaré : "Nous l'avons fait." Richard Spencer, un des chefs de file de l'Alt-Right, qui dirige un think tank suprématiste s'est également félicité de la nomination de Steve Bannon, comme la meilleure option pour défendre ses idées.
1/ "Strategist" is the best possible position for Steve Bannon in the Trump White House.— Richard ???? Spencer (@RichardBSpencer) 14 novembre 2016
8Antisémitisme
Son ex-épouse, Mary Louise Piccard, l'a accusé d'antisémitisme. Devant la cour en 2007, elle a raconté que son mari avait refusé que leurs filles jumelles fréquentent l'école pour filles Archer à Los Angeles parce qu'il y avait trop d'étudiants juifs. "Il a dit qu'il n'aimait pas la façon dont ils élevaient leurs enfants à devenir des 'bruyants pleurnichards'." Steve Bannon a démenti ces accusations.
9Violences conjugales
Marié trois fois, il a été accusé par Mary Louise Piccard, sa deuxième épouse, de violences conjugales il y a vingt ans, lorsqu'ils vivaient à Santa Monica en Californie. Il a été inculpé en février 1996. L'affaire a été classée sans suite après que son ancienne épouse ne se fut pas présentée devant les tribunaux. Selon la presse américaine, qui cite le dossier judiciaire, elle aurait été poussée par son ancien époux à quitter la ville, pour ne pas avoir à témoigner.
10Marion Maréchal-Le Pen
La députée FN Marion Maréchal-Le Pen a proposé de "travailler ensemble" à Steve Bannon, qui souhaite implanter Breitbart News en France. "Je réponds oui à l'invitation de Stephen Bannon", a écrit la nièce de Marine Le Pen dans un tweet samedi, diffusé d'abord en anglais puis en français.
En fait d'invitation, Steve Bannon avait déclaré début juillet au site Radio-Londres.fr : "Nous pensons que la France est l'endroit où il faut être. Avec ses jeunes entrepreneurs, les femmes de la famille Le Pen... Marion Maréchal-Le Pen est la nouvelle étoile montante. Nous cherchons à ouvrir un Breitbart Paris, voire un Breitbart France." Les proches de Steve Bannon ont en revanche démenti que le nouveau stratégiste ait tendu la main à la famille frontiste .
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