L’Afrique est désormais au cœur d’une stratégie géopolitique de haute importance. Comme jamais auparavant, l’Iran espère avoir une place de choix sur le continent africain afin de légitimer sa posture internationale et rassembler le soutien des pays africains.
La diplomatie de « conquête africaine » de l’Iran se décline sur plusieurs fronts :
- tractations et cooptations politiques par des réseaux d’influence,
- mise en place de projets de rapprochement économiques,
- activation de programmes de coopération de hauts niveaux,
- accélération de l’aide au développement… etc.
L’État d’Israël ne voit pas d’un bon œil ce rapprochement. Un travail de longue haleine l’attend donc pour contrer l’offensive iranienne.
Pour faire avancer ses pions sur l’échiquier du continent africain, Téhéran a financé une nouvelle route de passage sur la frontière algéro-mauritanienne.
L’annonce de l’ouverture officielle de la route internationale Tindouf (en Algérie) vers Zouerate (Mauritanie) est prévue dans quelques jours.
Elle reliera le sud-ouest de l’Algérie au nord de la Mauritanie, proche de la frontière avec le Sahara occidental.
Grâce à ses relais, notamment en République islamique de Mauritanie mais également ses liens forts avec l’Algérie, l’Iran entend à la fois renforcer ses leviers géopolitiques et pénétrer les réseaux dans le nord-ouest de l’Afrique.
Des réseaux bien implémentés en Algérie, permettent à l’Iran, à travers ce projet, d’accentuer sa coopération avec l’Afrique de l’Ouest. Ainsi la Mauritanie devient un pays d’intérêt pour les iraniens.
Le gouvernement mauritanien entretient de bonnes relations avec Téhéran. D’ailleurs en juin 2017, le ministre des Affaires étrangères iranien, Mohammad Javad Zariff, était en visite officielle en Mauritanie et en Algérie.
Zariff avait exprimé la détermination de l’Iran à renforcer la coopération avec Nouakchott et Alger.
Le Maroc devrait être isolé dans la stratégie algério-iranienne
Cette nouvelle route internationale entre l’Algérie et la Mauritanie va supplanter le Maroc qui était la seule porte d’entrée en Afrique.
Les autorités mauritaniennes ont l’intention de fermer leur frontière nord, le seul passage frontalier entre la Mauritanie et le Maroc, au niveau d’El-Guergarat, et d’ouvrir un nouveau passage sur la frontière algéro-mauritanienne à Chom-Tindouf.
Cet événement est le plus important de l’histoire de la région.
La République islamique d’Iran semble vouloir pénétrer vers le cœur du continent africain et couper la route traditionnelle qui fait du Maroc la porte d’entrée vers l’Afrique.
Cette manœuvre s’explique par l’aggravation des tensions dans les relations diplomatiques entre le Maroc (allié des pays du Golfe, sunnites) et la Mauritanie (allié de l’Iran) parallèlement à l’amélioration du niveau de coordination dans les relations entre Nouakchott et Alger.
La mise à exécution de ce projet ne manquera pas de renforcer l’isolement du Maroc et l’affaiblissement du rôle qu’il a joué ces dernières années dans l’accaparement des espaces traditionnels occupés par l’Algérie, alliée de l’Iran.
En agissant ainsi, la Mauritanie (avec notamment le soutien intéressé d’Alger et Téhéran) privera le Maroc du passage terrestre lui permettant d’atteindre les pays d’Afrique subsaharienne et de l’Ouest. Par ailleurs, ce changement de cap de Nouakchott, qui a décidé de se rapprocher d’Alger, aura des conséquences incommensurables sur la connexion du Maroc avec l’Afrique subsaharienne, et pour cause. Le Maroc, qui sera puni pour ses prises de position contre l’Iran dans les affaires régionales et internationales, pourrait «étouffer économiquement » après la fermeture de son seul passage frontalier d’entrée vers l’Afrique.
Par contre l’Algérie, qui a des solides liens avec les Iraniens, va tirer profit de l’ouverture de l’axe routier. L’Algérie aura une connexion avec le Sud-Ouest du continent. Et la Mauritanie va aussi pouvoir remonter vers le nord.
Avec des alliés solides à l’ouest du continent, la stratégie africaine de l’Iran est en marche et s’implante durablement dans le paysage africain.
Ceci pourrait mener à plus de clivages entre les États membres de l’Union africaine (UA), déjà mise à mal par un manque de solidarité et des divergences politiques importantes.
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