mardi 15 novembre 2011

Qui sont les opposants à Assad?

Huit mois de répression sanglante (plus de 3500 tués selon l'Onu) n'ont pas permis à Bachar el-Assad, de plus en plus isolé après sa mise à l'index par la Ligue arabe, d'écraser le soulèvement populaire contre la dictature du parti Baas au pouvoir depuis 1963.
L'opposition, atomisée au départ, est de mieux en mieux coordonnée, même si des désaccords persistent sur la méthode et si des méfiances subsistent entre opposants de l'intérieur et figures exilées.
L'immense majorité des opposants défend le caractère pacifique du soulèvement et insiste sur l'unité du peuple syrien. Mais la brutalité de la répression et l'émergence de l'Armée libre syrienne, composée de déserteurs, font redouter à certains une guerre civile.
Revue d'effectifs.

1. Le Conseil national syrien

Créé le 15 septembre à Istanbul (Turquie), le CNS est la plus vaste coalition de partis et de personnalités de l'opposition. Le CNS a été salué par la France et l'Union européenne, mais n'a pas été reconnu, à ce stade, comme le gouvernement légitime de la Syrie; hormis par le Conseil national de transition libyen.
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Figure de proue: Burhan Ghalioun (photo Reuters), professeur de sociologie politique et directeur du Centre d'études de l'Orien contemporain de la Sorbonne nouvelle (Paris III).

Composition:
 230 membres, issus d'horizons très différents tels
- la Déclaration de Damas pour le changement démocratique, un mouvement né peu après l'arrivée au pouvoir de Bachar el-Assad en 2000 (20 sièges);
- les Frères musulmans syriens, interdits depuis les années 1980, quand un soulèvement armé contre Hafez el-Assad, le père de l'actuel président, a été noyé dans le sang à Hama;
- les Comités locaux de coordination (55 sièges), des organisations de jeunes spontanées, qui ont bourgeonné localement, et se sont fédérées au plan national; elles sont à l'origine des manifestation les plus suivies, où l'on appelle à renverser Assad et où l'on a acclamé, récemment, le nom de Burhan Ghalioun;
- la Commission générale de la révolution syrienne, qui fédère elle même une quarantaine de mouvements d'opposition.
- des organisations kurdes et des leaders tribaux et des indépendants tels Burhan Ghalioun.

Ici, une interview en français de Burhan Ghalioun sur France 24.
Objectif : le renversement du régime plutôt que le dialogue; le CNS dénonce les ouvertures d'Assad comme des pièges grossiers.
Moyens préconisés : les manifestations pacifiques, même si le CNS a remercié les déserteurs de l'armée syrienne qui protègent, les armes à la main, certains défilés. Le CNS est hostile à une intervention militaire étrangère, mais les manifestants sur le terrain ont appelé à une protection internationale.
Ici, l'allocution de Burhan Ghalioun au peuple syrien (sous-titrée en anglais) à l'occasion de la fête musulmane du Sacrifice, le 7 novembre.


2. Le Comité national de coordination pour le changement démocratique (CNC)
Créé le 18 septembre dans un hôtel proche de Damas. Il émane de l'opposition de l'intérieur, alors qu'environ 40% des dirigeants du CNS vivent en exil.

Composition : un conseil de 80 membres où sont représentées treize partis de gauche, trois partis kurdes, des indépendants et des organisations de jeunesse.

Objectif : la fin du régime de parti unique et une transition démocratique. Le CNC a appelé le régime à retirer l'armée des rues et à mettre fin aux attaques contre les manifestants et à relâcher les prisonniers politiques afin de créer un environnement permettant l'ouverture d'un dialogue.

Moyens préconisés: manifestations, dialogue avec le régime; hostilité à une intervention militaire étrangères, mais soutien à des sanctions économiques pour faire plier le Baas.


3. Des organisations de jeunesse
Hama, le 11 novembre. Vidéo mise en ligne par Shaams News Network (ou Réseau des nouvelles de Damas), un groupe de jeunes activistes syriens qui publie sur la toile des informations sur les manifestations et oppose la transparence à la censure du régime.
Plusieurs organisations de jeunesse coexistent, très proches dans l'esprit des mouvements qui ont lancé les premiers appels à manifester en Egypte en janvier. Elles ont organisées au plan local. La plus connue est la Commission générale pour la révolution syrienne, mais on peut aussi citer le collectif Ghad.

Objectifs:
 le renversement du régime. Ces groupes ont pour la plupart rejeté les appels au dialogue du CNC.

Moyens préconisés: les manifestations de rue, l'activisme sur les réseaux sociaux.



4. L'Armée libre syrienne
Deux groupes armés sont apparus dans le courant de l'été, le mouvement des Officiers libres et surtout l'Armée libre de Syrie, qui semble aujourd'hui absorber le gros des déserteurs, de plus en plus nombreux  à refuser de tirer sur les manifestants.
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Figure de proue : le colonel Riad le-Assaad (photo Reuters), qui n'a aucun lien de parenté avec la famille Assad au pouvoir, est réfugié dans le sud de la Turquie avec une soixantaine d'officiers entrés en résistance; il vit sous la protection de l'armée turque; le siège de l'ALS est officiellement à Djisr le-Choghour, une localité syrienne distance de quelques kilomètres, où des unités de l'armée avait fraternisé avec les manifestants, en juin, contraignant Damas à dépêcher sur place la redoutée 4e brigade, l'unité d'élite de l'armée dirigée par le le propre frère du président, Maher le Assad.

Composition : l'ALS s'est structurée en bataillons locaux, notamment à Homs (ce qui expliquerait les combats actuels dans cette ville) et Deir es-Zor, et en commandos qui harcèlent les troupes fidèles au régime. Elle revendique 15 000 hommes, ce qui est invérifiable et probablement exagéré, de l'avis même du CNS. Plusieurs centaines sont réfugiés dans le nord du Liban, d'où le récent minage de la frontière entre les deux pays.

Objectifs : protéger les manifestants; renverser le régime.
Moyens préconisés : embuscades contre les forces de sécurité du régime (qui parle d'un gros millier de militaires et de policiers tués depuis mars); l'ALS réclame l'établissement d'un sanctuaire sous protection internationale le long de la frontière turque, où elle pourrait accueillir les déserteurs (qui fuient avec leurs seules armes de service), s'équiper et préparer une marche sur Damas.
Le colonel Assaad affirme que la troupe, qui est principalement de confession sunnite alors que l'encadrement supérieur est alaouite comme le clan Assad, changera alors massivement de camp.

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