La cohésion des six puissances chargées du dossier du nucléaire iranien est menacée d'érosion avec des pays en campagne électorale - Etats-Unis, France - et donc moins enclins à la fermeté sur les enjeux internationaux, et le retour à la présidence russe de Vladimir Poutine.
Face au "double langage" de Téhéran, disponible pour dialoguer avec Washington, Moscou, Londres, Paris, Berlin et Pékin tout en poursuivant sans ciller son programme nucléaire controversé, il faut rester "extrêmement ferme", souhaite le chef de la diplomatie française, Alain Juppé.
Une déclaration qui traduit la crainte d'une scission du front international opposé à Téhéran, seul levier jusqu'à présent pour retarder ou éviter une action militaire d'Israël évoquée de plus en plus souvent.
De facto, l'unité des six montre des signes d'essoufflement, même si ces derniers continuent de s'inquiéter d'un futur Iran doté de la bombe atomique et ont appelé jeudi Téhéran à s'"engager dans un dialogue sérieux" et "sans pré-conditions" sur son programme nucléaire.
"Au Conseil de sécurité, il ne se passera plus rien concernant l'Iran", explique un responsable occidental sous couvert d'anonymat, en précisant que la Russie et la Chine ont été très claires en ce sens.
Les dernières sanctions visant le pétrole iranien et la Banque centrale iranienne ont été prises séparément par l'Union européenne et les Etats-Unis, et non par l'ONU qui a adopté six résolutions contre Téhéran dont quatre assorties de mesures coercitives.
Le retour à la présidence russe de Vladimir Poutine, moins malléable que Dmitri Medvedev, laisse aussi présager des dissensions à l'approche de nouvelles discussions multilatérales avec l'Iran. En février, le Russe avait accusé les Occidentaux de chercher à "changer le régime" en Iran, sous couvert d'une lutte contre la prolifération des armes de destruction massive.
Au-delà d'un Iran disposant de l'arme atomique, la crainte des Occidentaux est effectivement que cette évolution fasse voler en éclats le régime de non-prolifération. "Si (l'Iran) parvenait à acquérir un potentiel militaire nucléaire, d'autres nations du Moyen-Orient voudront développer des armes nucléaires", juge le chef de la diplomatie britannique, William Hague.
La Chine, qui se fournit en pétrole en Iran, devrait vouloir préserver de son côté ses intérêts économiques, même aux dépens de l'unité collective.
"En 2009, date de la révélation d'un site nucléaire secret en Iran, le dossier iranien était une cause commune. L'est-il toujours aujourd'hui ?", s'interroge un diplomate. "L'objectif de l'Iran, c'est de faire éclater le groupe des Six", insiste une autre source.
Au cours des dernières années, Moscou et Pékin "n'ont cessé de faire du strip-tease devant l'Iran" pour obtenir des gestes sur son programme nucléaire, caricature le responsable occidental. Aujourd'hui, "ils sont en string et les Iraniens continuent de regarder par la fenêtre", ironise-t-il.
Paradoxalement, cette intransigeance iranienne qui a été à l'été 2011 jusqu'à un rejet de propositions jugées "laxistes" par Paris pourrait servir la cohésion des Six.
Obnubilés par la crainte d'une attaque israélienne aux conséquences imprévisibles, les Occidentaux semblent prêts aux compromis. Point de départ de la fronde onusienne, le gel de l'enrichissement d'uranium, qui peut conduire à la fabrication d'une bombe, n'est plus réclamé avec autant d'insistance. "Il y a longtemps qu'on y a renoncé", confirme un spécialiste du dossier.
Pour une autre source, les Six se satisferaient sans doute d'un arrêt de l'enrichissement à 20% en laissant l'Iran continuer à faire tourner ses centrifugeuses pour un faible enrichissement à 5%, à la condition qu'un vrai dialogue s'instaure avec Téhéran.
Source : AFP
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