dimanche 7 avril 2013

Syrie : Assad a-t-il déclenché son "Plan B" ? Il détruit Damas et veut reconquérir Homs via le Hezbollah


Assad commandite une opération de charme en direction d’Israël pour promouvoir l’alliance des minorités
 par Stefano B.C.

Devant les cuisantes défaites des forces du régime à Alep, Al-Raqqa et Deraa, Bachar Al-Assad et ses alliés iraniens et libanais semblent avoir mis à exécution leur "Plan B" qui consiste à détruire Damas et à prendre Homs, coûte que coûte, pour sécuriser son repli vers l’Etat alaouite sur la côte méditerranéenne, et pour garder une continuité territoriale avec le fief du Hezbollah, dans la Békaa libanaise.


Ce plan, prévisible depuis plus d’un an, est activement soutenu par l’Iran. Téhéran cherche à tout prix à renforcer sa présence sur la Méditerranée (Tartous), et à assurer la continuité territoriale avec le Hezbollah, grâce à la ville stratégique de Homs, et à sa province. Ce qui explique que le Hezbollah a massé plus de 6.000 combattants, encadrés par près de 150 officiers iraniens, dans la région d’Al-Qusayr, à la frontière syro-libanaise. Ce jeudi soir, 4 avril 2013, l’Armée syrienne libre a reconnu avoir perdu plusieurs positions, reprises par le parti de Hassan Nasrallah, notamment à Joussiyeh. L’intervention du Hezbollah s’est effectuée sous une couverture aérienne syrienne (l’aviation a bombardé la localité libanaise de Ersal), alors que l’artillerie et les rampes de lancement de missiles du Hezbollah, basées à Hermel (Liban), ont violemment pilonné la province de Homs. L’objectif est de la conquérir et de contrôler Homs, considérée comme un verrou stratégique qui relie Damas à la côte (est-ouest), pour permettre le repli du régime dans son fief alaouite, et relie ce dernier au Liban.

Parallèlement à cette offensive, le régime a violemment bombardé Damas, et plus particulièrement le quartier Barzé, situé au nord de la capitale, où les opposants semblent avoir réalisé une importante percée. Ils sont déjà très présents dans les banlieues nord-est, est, et sud-est de Damas, et tentent une jonction avec l’ouest pour soulager les villes assiégées de Moadamiyeh et de Daraya. Cette nuit, au moins 14 missiles sol-sol, de gros calibre, se sont abattus sur Barzé, faisant plusieurs victimes et des dégâts considérables.

Ainsi, selon le porte-parole de l’ASL, « le régime est conscient que sa chute est inévitablement proche. Il met à exécution son “Plan B”, avec la contribution des Iraniens et du Hezbollah. Il cherche à raser Damas et à se replier vers le pays alaouite, via Homs ».

Un projet rejeté par les Alaouites

La première inconnue qui met en péril le projet d’un futur Etat alaouite dirigé par Assad est que les opposants alaouites sont de plus en plus nombreux à rejeter ce scénario. Le 24 mars dernier, ils se sont réunis au Caire pour apporter leur soutien à la révolution : « Cette révolution est celle de tous les Syriens », ont-ils affirmé, ajoutant que « la plupart des alaouites détestent la famille Assad », responsable de tous les maux du pays. Mais les alaouites ressentent une peur paradoxalement entretenue et alimentée par le régime à travers ses tentatives de donner une connotation islamique à la révolution.

L’alliance des minorités

La deuxième inconnue concerne l’adhésion à ce projet des autres minorités. Bien que Bachar Al-Assad caresse les Kurdes dans le sens du poil en leur cédant la gestion de certains territoires, mais surtout pour les opposer aux révolutionnaires, il est peu probable qu’ils oublient les 50 ans de la politique du Baath, particulièrement méprisante, et qu’ils s’allient avec leur ancien bourreau (ou plus exactement leur bourreau de toujours). Les Chrétiens, souvent accusés à tort d’être des alliés du régime, prennent leur distance et s’engagent dans la révolution, à l’exception de quelques prélats connus pour être des agents desMoukhabarate. A cet égard, l’une des ambassadrices de Bachar Al-Assad, la religieuse Agnès-Mariam de la Croix, a récemment tenté de séduire Israël et de l’appeler à l’aide, « pour protéger les minorités du danger des barbus ». La religieuse de service a tenu une conférence truffée de mensonges à Paris, à l’invitation de l’Alliance France-Israël, où elle a fait l’éloge de l’Etat juif, qualifié de « Nation des Lumières » qui éclairera et sauvera les peuples d’Orient. Elle a ainsi balayé d’un revers de main son antisémitisme et son négationnisme passés... Après avoir dénoncé « les islamistes qui combattent en Syrie », Agnès-Mariam a refusé de « condamner leurs cousins du Hamas et du Hezbollah » ! Des détails que les médias qui ont relayé cette conférence ont omis de signaler ! Ils ont simplement repris ses mensonges sur les exactions des terroristes : « un vieil homme de 72 ans a été violé par 42 combattants ; une jeune femme enlevée s’est retrouvée amputée des deux jambes et des deux bras. Avant d’être envoyée chez elle, les terroristes lui ont coupé les deux seins », affirme la sainte Agnès-Mariam, sans sourciller ! La minorité druze semble quant à elle entièrement engagée dans la révolution, sous l’impulsion de Walid Joumblatt. Lors de sa conférence, Agnès-Mariam a pourtant affirmé que « les chrétiens engagés dans la révolution sont seulement 15 jeunes, et les druzes sont cinq ».

L’avenir incertain du Liban

La dernière inconnue mais pas la moindre concerne la marge de manœuvre dont bénéficiera le Hezbollah dans les semaines à venir. Le parti de Dieu aurait en effet accéléré son plan de conquête de Homs avant qu’un nouveau gouvernement ne soit formé au Liban, d’autant plus qu’il a peu de chance de pouvoir y occuper les postes clés comme ce fut le cas dans le gouvernement Mikati démissionnaire. Le président libanais Michel Sleiman s’apprête en effet à désigner un nouveau Premier ministre. Le député de Beyrouth Tamam Salam (fils de l’ancien premier ministre Saëb Salam), soutenu par les souverainistes (Forces Libanaises, Courant du Futur et leurs alliés du 14 Mars) et par Walid Joumblatt, est favori. Reste à savoir si le Hezbollah et le Courant Patriotique Libre le laissent former son cabinet, et s’ils l’autorisent à gouverner !!
Car en définitive, la viabilité de l’Etat alaouite, issu de la partition de la Syrie, scénario activement recherché par Assad, dépendra essentiellement de l’instabilité du Liban qui favorisera l’alliance des minorités, chère au régime syrien. Tous les ingrédients sont ainsi réunis pour imploser le pays du Cèdre.
Stefano B. C.

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