Denis Allex, agent de la DGSE, est retenu dans le désert somalien par les shebab depuis plus de 800 jours. Alors que deux journalistes de France 3, Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier, ont été libérés le 29 juin 2011 après avoir été retenus en Afghanistan pendant 547 jours, il y a un otage dont on parle beaucoup moins et dont la situation est beaucoup plus complexe. Denis Allex, agent français de la DGSE est toujours retenu en otage et semble oublié de tous.
Tout commence début juillet 2009 lorsque Denis Allex et Marc Aubrière arrivent à Mogadiscio. Ils se font passer pour des journalistes. Ils sont en réalité envoyés en Somalie pour former la garde rapprochée de Sharif Ahmed, le président somalien qui tente en vain de gouverner un pays morcelé par la guerre civile. Les deux hommes sont pris en otages directement dans leur chambre d’hôtel le 14 juillet par des miliciens en armes. Ces derniers ont été très bien renseignés sur l’arrivée de ces deux occidentaux dans la capitale somalienne. Les deux français ont été séparés durant leur détention, mais Marc Aubrière parviendra à recouvrer la liberté le 26 août 2009 dans une situation rocambolesque qui laisse très perplexe : il aurait faussé compagnie à ses ravisseurs, tué deux autres et marché durant cinq heures dans le désert pour être finalement récupéré par les forces gouvernementales dans Mogadiscio. Un scénario digne d’un film à la Jason Bourne…
Quant à son collègue, sa situation est plus préoccupante. Bernard Bajolet, coordonnateur national du renseignement et nommé depuis ambassadeur à Kaboul, donnait des nouvelles rassurantes le 27 janvier 2010 en affirmant qu’il était bien vivant. Une preuve de vie a bien été envoyée au cours du printemps de la même année, il s’agit d’une vidéo envoyée par ses ravisseurs aux autorités françaises.
En juin 2010, des sources somaliennes affirmaient que Denis Allex était forcé par ses geôliers à les former au combat ce qui n’est pas sans soulever une certaine inquiétude quant à la durée de sa captivité que ses ravisseurs souhaiteraient bien encore prolonger.
Pour ce qui est de leur appartenance à la DGSE, la presse a rapidement fait état de leur affiliation à la Direction des Opérations. Les deux hommes appartiendraient en réalité à une société de sécurité privée à laquelle la DGSE avait sous-traitée cette mission de formation. Les deux hommes étant des anciens du Service Action, ils n’en étaient pas à leur première mission de sécurité privée puisque au moins l’un des deux a servi en Irak après l’invasion américaine en 2003.
Alors que le débat sur la sécurité privée en France soulève de nombreuses interrogations et qu’un vide juridique reste à combler en la matière, il n’est pas anormal que la DGSE sous-traite certaines de ses activités comme le font d’autres services de renseignement comme la CIA américaine. Néanmoins, la limite d’emploi de ces sociétés serait de ne pas les utiliser dans le cadre d’opérations clandestines qui resteront, quoiqu’il en soit, le cœur de métier de la DGSE.
Concernant Marc Aubrière et Denis Allex, il a ainsi été préférable d’affirmer leur appartenance directe à la DGSE que de parler de sous-traitants au risque de passer encore pour une affaire de « barbouzerie » qui n’aurait pas été sans rappeler certaines affaires du passé qui ont ternies durablement l’image du renseignement français.
Alors que Denis Allex entre dans sa troisième année de détention, sa libération a de faibles chances d’intervenir à court terme. La négociation est très difficile à établir avec les miliciens shebab qui ont conscience de la haute valeur ajoutée de leur otage. Par ailleurs, une opération d’exfiltration serait extrêmement risquée à mettre en œuvre à la fois pour la vie de l’otage et pour les hommes chargés d’aller le récupérer.
Par Quentin Michaud -Pour l’excellent site : Les Grandes Oreilles (à mettre dans les favoris!)
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