En ce premier « anniversaire » du chaos libyen et de la victoire des Frères musulmans en Tunisie et en Egypte, il paraît utile de rendre hommage aux cocus de l’AN I, à savoir ces journalistes qui se sont toujours trompés. Ceux-là mêmes qui tombèrent en pâmoison devant le prétendu « printemps arabe », qui applaudirent une révolution tunisienne qu’ils sentirent embaumant le jasmin, qui eurent des vapeurs et même des émois place Tahir au Caire. Ceux enfin qui laissèrent éclater une joie indécente lors de l’écrasement du régime libyen, mais qui se turent devant les images atroces du lynchage de son « guide ».
Les mêmes qui seront une nouvelle fois cocus quand le départ du président Assad aura débouché sur un affreux bain de sang, sur le pogrom des minorités alaouite, druze, chrétienne et sur une nouvelle victoire des Frères musulmans. Car, et ne nous y trompons pas, derrière tous ces évènements, cette organisation supranationale dont le but est la création d’un califat mondial, avance méthodiquement ses pions, abritée par le paravent de l’incommensurable bêtise des dirigeants politiques occidentaux. Et grâce, naturellement, à l’aide des journalistes cocus ! Ces journalistes cocus et contents qui, par aveuglement et par manque de culture, n’ont pas vu que les conséquences de la destruction du régime libyen allaient se faire sentir dans tout l’arc sahélien.
Dans ce numéro de l’Afrique Réelle, nous montrons ainsi que les évènements du Mali découlent très directement de cette colossale erreur que fut notre engagement aux côtés d’un camp contre un autre dans une guerre civile libyenne qui ne nous concernait en rien.
Après avoir longtemps déstabilisé la région, le colonel Kadhafi avait en effet changé de politique depuis quelques années et au moment où nous lui avons déclaré la guerre, il stabilisait l’arc de crise sahélien. Il avait ainsi mis « sous cloche » à la fois les velléités des Toubou libyo-tchadiens et l’irrédentisme des Touaregs du Mali et du Niger.
L’intervention franco-otanienne a eu pour résultat de libérer les forces de déstabilisation saharo-sahéliennes.
L’exemple des Touaregs qui ont repris la guerre au Mali en attendant de l’étendre au Niger est éloquent. Voilà des mouvements qui jusque là étaient « sous contrôle » et qui, depuis la disparition du colonel Kadhafi, ont décidé de jouer leur propre carte. Désormais, c’est l’autodétermination qu’ils exigent et cela, afin de préparer la sécession pure et simple afin que soit prise en compte la réalité géographique et humaine régionale contre l’utopie consistant à vouloir faire vivre dans le même Etat les agriculteurs noirs du Sud et les nomades berbères du Nord.
Le problème est qu’en raison de la proximité de trois autres foyers de déstabilisation respectivement situés dans le nord du Nigeria avec la secte fondamentaliste Boko Haram, dans la région du Sahara nord occidental avec Aqmi et dans la zone des confins algéro-maroco-mauritaniens avec le Polisario, cette nouvelle guerre risque d’embraser toute la sous-région.
Voilà encore des développements auxquels les journalistes cocus n’avaient pas pensé, ce qui ne les empêchera pas de continuer à discourir doctement sur des sujets qu’ils ne maîtrisent pas…
Bernard Lugan
Edito de L'Afrique Réelle N°26 (février 2012)
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