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Ainsi qu'elle l'avait annoncé à la
veille de sa visite, Mme Merkel s'est de nouveau déclarée, devant la presse,
disposée à ouvrir un nouveau chapitre de discussions. « Nous voulons que ce
processus avance. Même si j'ai des réserves sur une adhésion pleine et entière
de la Turquie, je veux que les discussions se poursuivent. Mais nous avons
besoin de progrès sur le protocole d'Ankara, sinon nous ne pourrons pas
continuer à ouvrir des chapitres de discussion », a-t-elle déclaré à l'issue
d'un entretien avec le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan.
Signé en juillet 2005, le protocole
d'Ankara prévoit que la Turquie étende à tous les pays qui ont adhéré à l'Union
européenne il y a un an, dont Chypre, les accords d'union douanière qui
l'unissent aux pays européens.
Ankara, dont les
troupes occupent depuis 1974 la partie septentrionale de Chypre, refuse toujours
de reconnaître le gouvernement de sa partie méridionale et n'a, jusque-là, pas
tenu son engagement. Ses ports et aéroports sont ainsi fermés aux navires et
avions en provenance directe de Chypre.
« Ouvrir un nouveau chapitre est un
premier pas, avançons pas à pas », a insisté Mme Merkel devant son
hôte.
M. Erdogan s'est gardé de répondre
directement à son invitée sur le sujet en indiquant "ne pas connaître" les
intentions du nouveau président chypriote Nicos Anastasiades, largement élu
dimanche, sur cette question. "Mais nous ferons notre possible pour surmonter
ces difficultés (...) si nous sentons une volonté honnête de parvenir à une
solution durable", a-t-il poursuivi.
SUJETS QUI
FÂCHENT
Même modeste et prudent, le geste de
la chancelière intervient après celui de la Hollande, qui s'est dit prêt au
début du mois à lever son veto sur un des cinq chapitres de discussion bloqués
par l'ex-président Nicolas Sarkozy, farouchement hostile à l'entrée de la
Turquie dans l'UE.
Comme l'a
souligné un sondage publié dimanche dans le Bild am Sonntag, près des deux tiers
des Allemands (60%) demeurent hostiles à une adhésion de la
Turquie.
Ankara a amorcé en 2005 des
négociations en vue de rejoindre l'UE, mais les pourparlers piétinent, en raison
de l'hostilité de pays européens comme la France et l'Allemagne à sa pleine
adhésion mais aussi de blocages d'Ankara.
Outre la question européenne, Mme
Merkel a également tenu à répondre à son hôte, qui a récemment accusé à
plusieurs reprises l'Allemagne de complaisance à l'égard des militants kurdes ou
de l'extrême gauche turque qui vivent sur son territoire, notamment après
l'attentat-suicide qui a frappé, au début du mois, l'ambassade des États-Unis
dans la capitale turque.
« Nous sommes très sensibles à la
surveillance des membres du PKK », le Parti des travailleurs du Kurdistan en
lutte contre Ankara depuis 1984, a-t-elle assuré.
La chancelière a jeté une autre
pierre dans le jardin de M. Erdogan en indiquant à la presse avoir évoqué avec
lui les nouvelles lois en matière judiciaire que le Parlement turc doit adopter
pour mettre fin aux « longues détentions préventives » et créer des conditions
de travail favorisant la liberté de la presse.
La Turquie est régulièrement montrée
du doigt par les ONG de défense des droits de l'homme pour les dérives de son
arsenal législatif antiterroriste et les nombreuses incarcérations de
journalistes sur son territoire.
Mme Merkel devait s'exprimer en fin
d'après-midi devant un forum de patrons turcs et allemands puis retrouver M.
Erdogan pour un dîner, avant de regagner Berlin.
L'Allemagne constitue le premier
partenaire économique européen de la Turquie, loin devant l'Italie et la France.
M. Erdogan a rappelé lundi que le volume des échanges commerciaux entre les deux
pays atteignait près de 35 milliards de dollars.
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