mardi 26 février 2013

Merkel prête à relancer le processus d'adhésion de la Turquie à l'UE

La chancelière allemande Angela Merkel a réitéré lundi à Ankara son engagement à relancer prudemment le processus d'adhésion moribond de la Turquie à l'UE, mais en demandant à Ankara de lever en échange son blocage sur la question de Chypre.


Ainsi qu'elle l'avait annoncé à la veille de sa visite, Mme Merkel s'est de nouveau déclarée, devant la presse, disposée à ouvrir un nouveau chapitre de discussions. « Nous voulons que ce processus avance. Même si j'ai des réserves sur une adhésion pleine et entière de la Turquie, je veux que les discussions se poursuivent. Mais nous avons besoin de progrès sur le protocole d'Ankara, sinon nous ne pourrons pas continuer à ouvrir des chapitres de discussion », a-t-elle déclaré à l'issue d'un entretien avec le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan.
Signé en juillet 2005, le protocole d'Ankara prévoit que la Turquie étende à tous les pays qui ont adhéré à l'Union européenne il y a un an, dont Chypre, les accords d'union douanière qui l'unissent aux pays européens.

Ankara, dont les troupes occupent depuis 1974 la partie septentrionale de Chypre, refuse toujours de reconnaître le gouvernement de sa partie méridionale et n'a, jusque-là, pas tenu son engagement. Ses ports et aéroports sont ainsi fermés aux navires et avions en provenance directe de Chypre.

« Ouvrir un nouveau chapitre est un premier pas, avançons pas à pas », a insisté Mme Merkel devant son hôte.

M. Erdogan s'est gardé de répondre directement à son invitée sur le sujet en indiquant "ne pas connaître" les intentions du nouveau président chypriote Nicos Anastasiades, largement élu dimanche, sur cette question. "Mais nous ferons notre possible pour surmonter ces difficultés (...) si nous sentons une volonté honnête de parvenir à une solution durable", a-t-il poursuivi.

SUJETS QUI FÂCHENT

Même modeste et prudent, le geste de la chancelière intervient après celui de la Hollande, qui s'est dit prêt au début du mois à lever son veto sur un des cinq chapitres de discussion bloqués par l'ex-président Nicolas Sarkozy, farouchement hostile à l'entrée de la Turquie dans l'UE.

Comme l'a souligné un sondage publié dimanche dans le Bild am Sonntag, près des deux tiers des Allemands (60%) demeurent hostiles à une adhésion de la Turquie.

Ankara a amorcé en 2005 des négociations en vue de rejoindre l'UE, mais les pourparlers piétinent, en raison de l'hostilité de pays européens comme la France et l'Allemagne à sa pleine adhésion mais aussi de blocages d'Ankara.

Outre la question européenne, Mme Merkel a également tenu à répondre à son hôte, qui a récemment accusé à plusieurs reprises l'Allemagne de complaisance à l'égard des militants kurdes ou de l'extrême gauche turque qui vivent sur son territoire, notamment après l'attentat-suicide qui a frappé, au début du mois, l'ambassade des États-Unis dans la capitale turque.

« Nous sommes très sensibles à la surveillance des membres du PKK », le Parti des travailleurs du Kurdistan en lutte contre Ankara depuis 1984, a-t-elle assuré.

La chancelière a jeté une autre pierre dans le jardin de M. Erdogan en indiquant à la presse avoir évoqué avec lui les nouvelles lois en matière judiciaire que le Parlement turc doit adopter pour mettre fin aux « longues détentions préventives » et créer des conditions de travail favorisant la liberté de la presse.

La Turquie est régulièrement montrée du doigt par les ONG de défense des droits de l'homme pour les dérives de son arsenal législatif antiterroriste et les nombreuses incarcérations de journalistes sur son territoire.

Mme Merkel devait s'exprimer en fin d'après-midi devant un forum de patrons turcs et allemands puis retrouver M. Erdogan pour un dîner, avant de regagner Berlin.

L'Allemagne constitue le premier partenaire économique européen de la Turquie, loin devant l'Italie et la France. M. Erdogan a rappelé lundi que le volume des échanges commerciaux entre les deux pays atteignait près de 35 milliards de dollars.

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