Le président intérimaire Dioncounda Traoré et le capitaine Sanogo, en février 2013 au palais présidentiel (STRINGER / AFP)
Organiser au plus vite des élections libres et veiller au respect des droits de l'homme : telle est la demande pressante qu'une centaine de partis politiques et d'associations ont adressée, lundi 25 février à Bamako, au gouvernement de transition.
Qu'est-ce qui les inquiète donc tant ? Pendant qu'au nord, les projecteurs sont tournés vers les opérations militaires des armées française, malienne et de leurs alliés africains, qui se poursuivent contre les djihadistes, au sud, "il ne se passe pas grand-chose et c'est bien là le problème", juge un diplomate occidental à Bamako. Or l'avenir du Mali se joue tout autant au nord qu'au sud.
Certes, il y a des annonces. Le président intérimaire Dioncounda Traoré a dit espérer pouvoir organiser les élections avant le 31 juillet. Un délai jugé toutefois "ambitieux" par les observateurs occidentaux. "Ça va être juste sur le plan sécuritaire au nord, sur le plan technique avec la mise en place d'un fichier électoral biométrique, et sur le plan de la préparation des esprits, extrêmement divisés dans un climat politique qui est loin d'être apaisé. Mais on ne veut pas décourager les bonnes volontés", commente le même diplomate.
Mais on en sait déjà suffisamment pour en conclure que "le gouvernement n'est pas prêt à s'engager dans une dynamique de sortie de crise avec tous les acteurs", déplore le chercheur Gilles Yabi, directeur du bureau Afrique de l'Ouest de l'organisation International Crisis Group.
"Le Premier ministre Diango Cissoko répète à qui veut bien l'entendre que le gouvernement ne va discuter qu'avec les élus et les représentants des communautés du nord. Qu'il est hors de question de parler aux groupes armés", explique le diplomate joint par "Le Nouvel Observateur".
"Et chaque fois que l'on parle du MNLA [Mouvement national de libération de l'Azawad des touaregs indépendantistes, NDLR], ça l'énerve très fortement." Ce durcissement s'est traduit récemment dans les faits avec les mandats délivrés par la justice malienne contre des membres du MNLA et des groupes islamistes du nord.
Le MNLA ne se fait pas d'illusion sur les intentions de Bamako : "Les termes 'négociation' et 'médiation'" ont disparu du vocabulaire des autorités", remarque Moussa ag Assarid, représentant du mouvement indépendantiste touareg en Europe, qui accuse Bamako de "déni" de la question touarègue. "La position du MNLA n'est pas claire et celle des autorités maliennes frise parfois le racisme", résume le diplomate. Difficile d'entrevoir une possible réconciliation dans ce contexte... Au point que la France se retrouve à jouer un rôle de tampon entre les deux, en refusant à l'armée malienne l'accès à la ville de Kidal, au Nord, fief des rebelles touaregs.
Le dialogue nord-sud est d'autant plus complexe qu'"il y a aussi besoin d'un dialogue intercommunautaire qui soit d'abord nord-nord afin que toutes les communautés, touarègues, peules, songhaïs, etc, puissent revivre ensemble", souligne Gilles Yabi. "Et on en est encore loin : exactions, règlements de compte, réfugiés en dehors du pays qui ne sont pas encore prêts à un retour… Cette question pourrait être la priorité de la Commission", espère-t-il.
L'une des principales menaces pesant sur la transition, le capitaine putschiste Sanogo, auteur du coup d'Etat du 22 mars 2012 qui a plongé le Mali dans la crise, conserve lui aussi un pouvoir de nuisance. Investi mi-février à la tête d'un comité chargé de la réforme de l'armée malienne, il a accepté de quitter la caserne de Kati pour s'installer au siège de l'état-major des armées dans la capitale. Objectif de l'opération : le cantonner dans ce rôle et le rendre du coup plus contrôlable.
Mais "si son influence politique a été réduite par l'intervention militaire française, il a encore un certain ascendant sur l'armée, il a des hommes au sein du gouvernement et va continuer à avoir un rôle dans les mois qui viennent", avertit Gilles Yabi. "Dans la feuille de route, son nom ne figure pas dans la liste des personnalités de la transition qui ne pourront pas se présenter aux élections... On l'a bien remarqué", souligne le diplomate.
Dans un tel contexte, conclut ce dernier, "ce qui compte c'est que l'on aille à ces élections. Les autorités de transition sont trop fragiles pour prendre des engagements sur le long terme aussi lourds qu'une refonte de l'Etat malien." Bref, le plus vite sera peut-être le mieux.
Qu'est-ce qui les inquiète donc tant ? Pendant qu'au nord, les projecteurs sont tournés vers les opérations militaires des armées française, malienne et de leurs alliés africains, qui se poursuivent contre les djihadistes, au sud, "il ne se passe pas grand-chose et c'est bien là le problème", juge un diplomate occidental à Bamako. Or l'avenir du Mali se joue tout autant au nord qu'au sud.
Des élections en juillet ?
Pourtant, en intervenant militairement dans le désert du Nord-Mali, la France a aussi changé la donne à Bamako. Elle a sauvé in extremis le président intérimaire et son gouvernement d'un nouveau coup d'Etat (voire peut-être empêché que Bamako ne tombe aux mains des djihadistes), renforcé leur autorité et obtenu enfin l'adoption, fin janvier, d'une feuille de route prévoyant des élections et un dialogue national. Bamako semblait sur la bonne voie. Mais depuis, le gouvernement semble être revenu à son état d'apesanteur.Certes, il y a des annonces. Le président intérimaire Dioncounda Traoré a dit espérer pouvoir organiser les élections avant le 31 juillet. Un délai jugé toutefois "ambitieux" par les observateurs occidentaux. "Ça va être juste sur le plan sécuritaire au nord, sur le plan technique avec la mise en place d'un fichier électoral biométrique, et sur le plan de la préparation des esprits, extrêmement divisés dans un climat politique qui est loin d'être apaisé. Mais on ne veut pas décourager les bonnes volontés", commente le même diplomate.
Se réconcilier, mais avec qui ?
C'est avec le même état d'esprit que la communauté internationale semble accueillir la création d'une Commission de dialogue et de réconciliation. Bien qu'elle soit annoncée pour la fin du mois, on n'en connaît encore ni la composition ni les objectifs.Mais on en sait déjà suffisamment pour en conclure que "le gouvernement n'est pas prêt à s'engager dans une dynamique de sortie de crise avec tous les acteurs", déplore le chercheur Gilles Yabi, directeur du bureau Afrique de l'Ouest de l'organisation International Crisis Group.
"Le Premier ministre Diango Cissoko répète à qui veut bien l'entendre que le gouvernement ne va discuter qu'avec les élus et les représentants des communautés du nord. Qu'il est hors de question de parler aux groupes armés", explique le diplomate joint par "Le Nouvel Observateur".
"Et chaque fois que l'on parle du MNLA [Mouvement national de libération de l'Azawad des touaregs indépendantistes, NDLR], ça l'énerve très fortement." Ce durcissement s'est traduit récemment dans les faits avec les mandats délivrés par la justice malienne contre des membres du MNLA et des groupes islamistes du nord.
Le MNLA ne se fait pas d'illusion sur les intentions de Bamako : "Les termes 'négociation' et 'médiation'" ont disparu du vocabulaire des autorités", remarque Moussa ag Assarid, représentant du mouvement indépendantiste touareg en Europe, qui accuse Bamako de "déni" de la question touarègue. "La position du MNLA n'est pas claire et celle des autorités maliennes frise parfois le racisme", résume le diplomate. Difficile d'entrevoir une possible réconciliation dans ce contexte... Au point que la France se retrouve à jouer un rôle de tampon entre les deux, en refusant à l'armée malienne l'accès à la ville de Kidal, au Nord, fief des rebelles touaregs.
Le dialogue nord-sud est d'autant plus complexe qu'"il y a aussi besoin d'un dialogue intercommunautaire qui soit d'abord nord-nord afin que toutes les communautés, touarègues, peules, songhaïs, etc, puissent revivre ensemble", souligne Gilles Yabi. "Et on en est encore loin : exactions, règlements de compte, réfugiés en dehors du pays qui ne sont pas encore prêts à un retour… Cette question pourrait être la priorité de la Commission", espère-t-il.
Sanogo toujours en selle
Reste également à mettre en place un dialogue politique pour aller aux élections avec l'adhésion de tous les principaux acteurs politiques, pro et anti putschistes. Or, là aussi, la sortie de crise est semée d'embûches. Les récentes échauffourées qui ont opposé deux factions de l'armée malienne, les bérets verts et les bérets rouges, et la série d'interpellations d'hommes politiques par la sécurité de l'Etat sont autant de signes inquiétants qui montrent combien le climat est encore électrique à Bamako.L'une des principales menaces pesant sur la transition, le capitaine putschiste Sanogo, auteur du coup d'Etat du 22 mars 2012 qui a plongé le Mali dans la crise, conserve lui aussi un pouvoir de nuisance. Investi mi-février à la tête d'un comité chargé de la réforme de l'armée malienne, il a accepté de quitter la caserne de Kati pour s'installer au siège de l'état-major des armées dans la capitale. Objectif de l'opération : le cantonner dans ce rôle et le rendre du coup plus contrôlable.
Mais "si son influence politique a été réduite par l'intervention militaire française, il a encore un certain ascendant sur l'armée, il a des hommes au sein du gouvernement et va continuer à avoir un rôle dans les mois qui viennent", avertit Gilles Yabi. "Dans la feuille de route, son nom ne figure pas dans la liste des personnalités de la transition qui ne pourront pas se présenter aux élections... On l'a bien remarqué", souligne le diplomate.
Dans un tel contexte, conclut ce dernier, "ce qui compte c'est que l'on aille à ces élections. Les autorités de transition sont trop fragiles pour prendre des engagements sur le long terme aussi lourds qu'une refonte de l'Etat malien." Bref, le plus vite sera peut-être le mieux.
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