Le régime syrien a appelé jeudi le Conseil de sécurité de l'ONU à sanctionner le Front Al-Nosra, le groupe le plus influent au sein de la rébellion, après l'annonce officielle de son adhésion au réseau Al-Qaïda, tandis qu'à Washington, le président Barack Obama débloquait une aide alimentaire et médicale de dix millions de dollars pour la rébellion syrienne.
Profitant de l'aubaine représentée par l'acte d'allégeance public d'Al-Nosra au chef d'Al-Qaïda Ayman al-Zawahiri qui a appelé à l'établissement d'un Etat islamique en Syrie, le pouvoir s'est empressé de demander à l'ONU de classer le groupe sur sa "liste noire" des entités et individus liés au réseau extrémiste.
La demande formulée par le ministère des Affaires étrangères fait référence aux résolutions 1267 et 1989 qui prévoient des sanctions comme un gel des avoirs, une interdiction de voyager et un embargo sur les armes et qui comprennent actuellement 64 entités et 227 individus.
Depuis le début en mars 2011 du conflit en Syrie, déclenché par une révolte pacifique qui s'est ensuite militarisée face à la répression, le régime de Bachar al-Assad, se refusant à admettre toute contestation, accuse les rebelles d'être des "terroristes financés par l'étranger".
Le ministère syrien a d'ailleurs souligné dans un communiqué avoir "régulièrement averti l'ONU sur les liens entre les groupes terroristes armés et Al-Qaïda, ainsi que sur les crimes du Front al-Nosra".
Les Affaires étrangères syriennes ont demandé au Conseil de sécurité de faire pression sur "les Etats qui soutiennent le terrorisme en Syrie pour qu'ils cessent leurs activités illégales", en référence notamment à la Turquie, à l'Arabie saoudite et le Qatar.
Ces pays sont accusés par Damas d'abriter et de financer les rebelles, regroupés en majorité sous l'ombrelle de l'Armée syrienne libre (ASL) mais qui ne comprennent pas Al-Nosra, groupe déjà classé sur la liste des "groupes terroristes" établie par Washington qui le soupçonnait de liens avec Al-Qaïda.
Ce n'est que mercredi que le chef d'Al-Nosra a confirmé publiquement l'adhésion du groupe jihadiste bien organisé et armé à Al-Qaïda, une annonce qui a d'ailleurs plongé l'opposition dans l'embarras.
Les Comités locaux de coordination (LCC), une des premières organisations à avoir animé la révolte sur le terrain, ont refusé "totalement les propos du chef d'Al-Qaïda et son appel à établir un Etat islamique en Syrie".
Le chef de l'opposition, Ahmed Moaz al-Khatib, a estimé que "la pensée d'Al-Qaïda ne nous sied pas et les révolutionnaires en Syrie doivent prendre une position claire sur ce sujet".
L'opposition est d'autant plus gênée qu'elle ne cesse de réclamer une aide militaire à la communauté internationale pour faire face à la puissance de feu du régime. Or les pays occidentaux ont refusé jusqu'à présent de crainte que l'arsenal ne tombe aux mains d'"extrémistes".
A Washington, Barack Obama a jugé jeudi que la guerre en Syrie avait attteint un point "crucial" et il a débloqué pour la rébellion syrienne une aide alimentaire et médicale de deix millions de dollars.
Cette somme "pouvant atteindre dix millions de dollars (...) vient s'ajouter aux 117 millions de dollars d'assistance non létale fournie à la Coalition de l'opposition syrienne", a expliqué Caitlin Hayden, porte-parole du Conseil de sécurité nationale, le cabinet de politique étrangère de la Maison Blanche.
Par ailleurs, selon des diplomates à l'ONU, les pays occidentaux ont des "preuves solides" que des armes chimiques ont été utilisées au moins une fois dans le conflit syrien.
"Il y a plusieurs exemples dans lesquels nous sommes complètement sûrs que des obus chimiques ont été utilisés de façon sporadique", a en outre assuré un diplomate occidental sous couvert de l'anonymat.
La Grande-Bretagne et la France ont soumis des informations aux Nations unies concernant les allégations selon lesquelles les forces gouvernementales ont utilisé des armes chimiques face aux rebelles, notamment dans la ville de Homs le 23 décembre.
A Londres, jeudi, les chefs de la diplomatie du G8 se sont dits "atterrés" par le nombre de morts causé par le conflit, évalué à plus de 70.000 par l'ONU, mais ils n'ont pas mentionné l'épineuse question de la livraison d'armes aux rebelles.
Sur le terrain, les combats continuent de tuer, et au moins 69 personnes ont péri jeudi à travers le pays, selon un bilan provisoire de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).
Dans le sud, au moins 57 personnes sont mortes dans un assaut de l'armée contre deux villages de la province de Deraa lancé mercredi après la défection de soldats qui s'y sont réfugiés, a précisé l'OSDH. Il s'agit de 16 rebelles, 12 soldats et 29 civils dont 6 enfants.
Dans le nord, un hélicoptère transportant des provisions pour les militaires assiégés dans le camp de Wadi Deif a été abattu et ses quatre passagers tués, selon l'OSDH qui a mis en ligne une vidéo.
Enfin, l'aviation syrienne a effectué un second raid en moins de 24 heures dans une région frontalière libanaise partisane de la rébellion, faisant des blessés, selon des responsables libanais.
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