jeudi 4 juillet 2013

Coup d’État en Égypte : retour à la case militaire

Mohamed Morsi destitué. La Constitution suspendue. Le pays dirigé par le président de la Haute Cour constitutionnelle. De nouvelles élections programmées.
Le Président issu des Frères musulmans n’aura pas résisté à la poussée des manifestations de rue épaulées par l’armée. Si, sur la place Tahrir, des cris de joie ont accueilli la nouvelle, d’autres « révolutionnaires » s’interrogeaient sur cette victoire acquise grâce à une armée qu’ils avaient tout fait pour chasser il y a à peine plus de deux ans.
Dans l’après-midi, des blindés s’étaient positionnés près du palais présidentiel. D’autres devant le siège de la télévision nationale. Quant aux chaînes favorables au Président, elles ne diffusaient plus de programme. En fin de journée, le leader islamiste avait appelé à résister « pacifiquement » à ce « coup d’État ».
À l’heure où ces lignes sont écrites, les réseaux sociaux font état d’affrontements entre pro et anti-Morsi, dans certains quartiers du Caire et dans d’autres villes du pays.
Aujourd’hui en Égypte, l’homme fort est sans conteste le général Abdel Fattah Al-Sissi. Chef d’état-major des armées et ministre de la Défense, c’est lui qui a annoncé, lors d’une allocution télévisée, la suspension de la Constitution et le limogeage de Morsi. Et de justifier : « Nous espérions trouver une issue afin de satisfaire les revendications du peuple. Cependant, les réponses du président n’ont pas convaincu les aspirations de la rue. » Le grand cheikh de la mosquée Al Azhar et le patriarche Tawadros II, primat de l’Eglise copte orthodoxe, ont apporté leur soutien aux décisions annoncées par le général Al-Sissi. Les salafistes d’al-Nour également.
Alors, retour à la case départ ? Cela y ressemble. L’armée, gangrénée par la corruption, reste le vrai maître du pays. Elle y détient des intérêts colossaux. Écartée un temps des premières loges du pouvoir, elle vient de prendre sa revanche. Largement aidée, il faut le dire, par des islamistes qui se sont montrés incapables de faire face à la situation, de répondre aux aspirations de la population, d’échapper à leurs propres dérives autoritaires.
Soixante et un an après la révolution de juillet 1952 qui avait vu les « officiers libres » de Nasser renverser le roi Farouk, c’est un autre militaire qui vient de chasser le premier président démocratiquement élu de l’histoire de l’Égypte… sous les acclamations d’une majorité de la population. La démocratie n’est pas à l’ordre du jour sur les bords du Nil


Robert
Ménard
Journaliste.
Fondateur de Reporters sans frontières.
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