A trois semaines de l’élection présidentielle dans ce pays riche en pétrole, on n’observe aucune agitation particulière.
Les rues de la capitale, Bakou, n’arborent pas d’affiches de nature politique et les chaînes de télévision privées ne diffusent aucun spot des candidats. Le président sortant, Ilham Aliev, 51 ans, ne se soucie même pas de faire une campagne dynamique.
La population de l’Azerbaïdjan estime que participer à ces élections serait une pure perte de temps – pire encore que les fois précédentes. Avant même d’aller voter, elle est convaincue qu’Ilham Aliev, à ce poste depuis 2003, sera réélu pour un troisième mandat de cinq ans. “Beaucoup de gens sont mécontents de la redistribution inégale des revenus du pétrole, de l’arbitraire, de l’absence d’accès à une éducation et à une médecine de qualité. Mais l’opposition n’a pas su transformer ce mécontentement en véritable mouvement de protestation”, explique le politologue de Bakou Torgoul Djouvarly.
Lors de sa récente conférence de presse, le principal candidat de l’opposition, ancien député et historien de 61 ans, Djamil Gassanli, n’a pas tant attiré l’attention sur sa propre plateforme politique que sur “les conditions inéquitables de la campagne” et sur les probabilités de “manipulations à grande échelle des résultats en faveur d’Ilham Aliev”. Sa candidature est présentée par une coalition de partis et d’organisations d’opposition, regroupés sous le nom de Conseil national des forces démocratiques.
“Djamil Gassanli est une personne digne et respectable, mais l’opposition n’a malheureusement pas su se préparer à cette campagne”, fait remarquer le directeur du Centre de recherches politiques de Bakou, Elhan Chakhinoglou. Le Conseil national des forces démocratiques avait tout d’abord proposé un autre candidat, le célèbre scénariste et réalisateur de cinéma Roustam Ibraguimbekov. Mais sa candidature a été rejetée par les autorités électorales pour cause de double nationalité, russe et azerbaïdjanaise. Le long bras de fer autour de la possibilité ou non de présenter cette candidature a coûté un temps précieux à l’opposition. Les seules questions qui demeurent sans réponse à ce jour concernent l’exactitude des résultats officiels et le taux de participation, constate Elhan Chakhinoglou. Il faut noter que les observateurs occidentaux n’ont jusqu’à présent jamais déclaré les élections en Azerbaïdjan honnêtes et justes.
Selon le directeur du Centre de surveillance des élections et de la formation de la démocratie de Bakou, Anar Mamedli, si la campagne électorale passe “pratiquement inaperçue pour la population”, elle n’est toutefois pas dénuée de drames. C’est ainsi que le 17 septembre, dans l’est du pays, des loups se sont attaqués à vingt brebis alors que le berger était en train de suivre attentivement les débats sur la campagne à la télévision publique, fait savoir l’agence d’information officielle Vesti.az. Selon toute vraisemblance, les habitants de la capitale ne partagent pas le même intérêt pour la politique que ce berger. Une personne seulement sur les douze interrogées au hasard, récemment, par Eurasianet a entendu parler d’autres candidats que le président Aliev. Hormis Ilham Aliev et Djamil Gassanli, cinq députés du Parlement, deux autres représentants peu connus de l’opposition et le chef du parti progouvernemental Moussavat moderne, Khafiz Gadjiev, sont également en lice.
Aucun correspondant étranger. L’indifférence de la population a également gagné les centres urbains, où des manifestations antigouvernementales de grande ampleur avaient eu lieu il y a quelque temps. Dans la ville de Gouba, située à 180 kilomètres au nord de la capitale, une importante vague de protestations avait conduit, en 2012, à l’éviction du responsable de l’administration locale, nommé par le président. Pourtant, “on n’y observe absolument aucune agitation ni aucun signe particulier” de campagne électorale, note le journaliste indépendant local Ramin Makhmoudov. Un calme semblable règne également à Ismaïly, où, en janvier, des actions de protestation similaires avaient débouché sur une série d’arrestations, dont celle d’un candidat potentiel de l’opposition, Ilgar Mamedov. Dans ces deux localités, l’électorat, ramené au calme par les remaniements bureaucratiques, n’a apparemment plus l’intention de se mobiliser pour exiger des changements.
Cependant, un tel état d’esprit “ne va pas favoriser des élections libres et honnêtes”, considère Anar Mamedli, dont l’association d’observateurs du scrutin mènera un suivi à long terme dans 89 des 125 circonscriptions du pays, essentiellement en dehors de Bakou. Comme lors des élections précédentes, les représentants du pouvoir vont déployer des moyens administratifs, financiers et médiatiques énormes pour créer les conditions les plus favorables au président sortant, explique Torgoul Djouvarly.
Les membres du parti présidentiel, Eni Azerbaïdjan, ont annoncé que le président ne ferait pas une campagne imposante car “il n’en a pas besoin”. Toutefois, au cours de ces dernières semaines, il s’est rendu dans plus de dix régions, où il a rencontré des habitants. Il a également inauguré des entreprises, hôpitaux et écoles, et signé une résolution augmentant de 10 % les salaires de presque toutes les catégories de fonctionnaires et de 15 % les pensions de retraite.
Le Conseil national des forces démocratiques et les autres candidats de l’opposition avaient l’intention de faire une campagne active en région, où la situation socio-économique est moins bonne que dans la capitale. Cepen dant, comme à Bakou, les autorités électorales ont limité les réunions à la périphérie des centres des districts.
Aucun battage n’a lieu à la télévision non plus. Pas une seule chaîne de télévision privée ni aucune radio ne s’est enregistrée auprès de la Commission électorale centrale pour diffuser des spots publicitaires payants, talk-shows ou débats. Les candidats exposent leur programme en direct uniquement sur la télévision publique. La loi oblige en effet celle-ci à accorder à chacun d’entre eux dix-huit minutes d’antenne gratuite au total et la possibilité de participer à des débats d’une heure. Enfin, contrairement aux élections précédentes, il n’y a pas de journalistes étrangers à Bakou.
Pendant ce temps, depuis le début de l’année scolaire, le principal sujet de discussion sur Facebook, le réseau social le plus répandu en Azerbaïdjan (plus de 1 million d’utilisateurs enregistrés), porte sur les problèmes actuels de l’enseignement et non sur la prochaine élection présidentielle.
–Chakhine Abbassov
Paru le 19 septembre
Les rues de la capitale, Bakou, n’arborent pas d’affiches de nature politique et les chaînes de télévision privées ne diffusent aucun spot des candidats. Le président sortant, Ilham Aliev, 51 ans, ne se soucie même pas de faire une campagne dynamique.
La population de l’Azerbaïdjan estime que participer à ces élections serait une pure perte de temps – pire encore que les fois précédentes. Avant même d’aller voter, elle est convaincue qu’Ilham Aliev, à ce poste depuis 2003, sera réélu pour un troisième mandat de cinq ans. “Beaucoup de gens sont mécontents de la redistribution inégale des revenus du pétrole, de l’arbitraire, de l’absence d’accès à une éducation et à une médecine de qualité. Mais l’opposition n’a pas su transformer ce mécontentement en véritable mouvement de protestation”, explique le politologue de Bakou Torgoul Djouvarly.
Lors de sa récente conférence de presse, le principal candidat de l’opposition, ancien député et historien de 61 ans, Djamil Gassanli, n’a pas tant attiré l’attention sur sa propre plateforme politique que sur “les conditions inéquitables de la campagne” et sur les probabilités de “manipulations à grande échelle des résultats en faveur d’Ilham Aliev”. Sa candidature est présentée par une coalition de partis et d’organisations d’opposition, regroupés sous le nom de Conseil national des forces démocratiques.
“Djamil Gassanli est une personne digne et respectable, mais l’opposition n’a malheureusement pas su se préparer à cette campagne”, fait remarquer le directeur du Centre de recherches politiques de Bakou, Elhan Chakhinoglou. Le Conseil national des forces démocratiques avait tout d’abord proposé un autre candidat, le célèbre scénariste et réalisateur de cinéma Roustam Ibraguimbekov. Mais sa candidature a été rejetée par les autorités électorales pour cause de double nationalité, russe et azerbaïdjanaise. Le long bras de fer autour de la possibilité ou non de présenter cette candidature a coûté un temps précieux à l’opposition. Les seules questions qui demeurent sans réponse à ce jour concernent l’exactitude des résultats officiels et le taux de participation, constate Elhan Chakhinoglou. Il faut noter que les observateurs occidentaux n’ont jusqu’à présent jamais déclaré les élections en Azerbaïdjan honnêtes et justes.
Selon le directeur du Centre de surveillance des élections et de la formation de la démocratie de Bakou, Anar Mamedli, si la campagne électorale passe “pratiquement inaperçue pour la population”, elle n’est toutefois pas dénuée de drames. C’est ainsi que le 17 septembre, dans l’est du pays, des loups se sont attaqués à vingt brebis alors que le berger était en train de suivre attentivement les débats sur la campagne à la télévision publique, fait savoir l’agence d’information officielle Vesti.az. Selon toute vraisemblance, les habitants de la capitale ne partagent pas le même intérêt pour la politique que ce berger. Une personne seulement sur les douze interrogées au hasard, récemment, par Eurasianet a entendu parler d’autres candidats que le président Aliev. Hormis Ilham Aliev et Djamil Gassanli, cinq députés du Parlement, deux autres représentants peu connus de l’opposition et le chef du parti progouvernemental Moussavat moderne, Khafiz Gadjiev, sont également en lice.
Aucun correspondant étranger. L’indifférence de la population a également gagné les centres urbains, où des manifestations antigouvernementales de grande ampleur avaient eu lieu il y a quelque temps. Dans la ville de Gouba, située à 180 kilomètres au nord de la capitale, une importante vague de protestations avait conduit, en 2012, à l’éviction du responsable de l’administration locale, nommé par le président. Pourtant, “on n’y observe absolument aucune agitation ni aucun signe particulier” de campagne électorale, note le journaliste indépendant local Ramin Makhmoudov. Un calme semblable règne également à Ismaïly, où, en janvier, des actions de protestation similaires avaient débouché sur une série d’arrestations, dont celle d’un candidat potentiel de l’opposition, Ilgar Mamedov. Dans ces deux localités, l’électorat, ramené au calme par les remaniements bureaucratiques, n’a apparemment plus l’intention de se mobiliser pour exiger des changements.
Cependant, un tel état d’esprit “ne va pas favoriser des élections libres et honnêtes”, considère Anar Mamedli, dont l’association d’observateurs du scrutin mènera un suivi à long terme dans 89 des 125 circonscriptions du pays, essentiellement en dehors de Bakou. Comme lors des élections précédentes, les représentants du pouvoir vont déployer des moyens administratifs, financiers et médiatiques énormes pour créer les conditions les plus favorables au président sortant, explique Torgoul Djouvarly.
Les membres du parti présidentiel, Eni Azerbaïdjan, ont annoncé que le président ne ferait pas une campagne imposante car “il n’en a pas besoin”. Toutefois, au cours de ces dernières semaines, il s’est rendu dans plus de dix régions, où il a rencontré des habitants. Il a également inauguré des entreprises, hôpitaux et écoles, et signé une résolution augmentant de 10 % les salaires de presque toutes les catégories de fonctionnaires et de 15 % les pensions de retraite.
Le Conseil national des forces démocratiques et les autres candidats de l’opposition avaient l’intention de faire une campagne active en région, où la situation socio-économique est moins bonne que dans la capitale. Cepen dant, comme à Bakou, les autorités électorales ont limité les réunions à la périphérie des centres des districts.
Aucun battage n’a lieu à la télévision non plus. Pas une seule chaîne de télévision privée ni aucune radio ne s’est enregistrée auprès de la Commission électorale centrale pour diffuser des spots publicitaires payants, talk-shows ou débats. Les candidats exposent leur programme en direct uniquement sur la télévision publique. La loi oblige en effet celle-ci à accorder à chacun d’entre eux dix-huit minutes d’antenne gratuite au total et la possibilité de participer à des débats d’une heure. Enfin, contrairement aux élections précédentes, il n’y a pas de journalistes étrangers à Bakou.
Pendant ce temps, depuis le début de l’année scolaire, le principal sujet de discussion sur Facebook, le réseau social le plus répandu en Azerbaïdjan (plus de 1 million d’utilisateurs enregistrés), porte sur les problèmes actuels de l’enseignement et non sur la prochaine élection présidentielle.
–Chakhine Abbassov
Paru le 19 septembre
Erevan vote pour Aliev
●●● Si Ilham Aliev dépassait son “arménophobie”, pour Erevan, “l’issue la plus avantageuse [du scrutin présidentiel azerbaïdjanais] serait la victoire du président sortant”, a déclaré le président Serge Sargsian au Congrès annuel de la jeunesse arménienne, le 17 août. Raisons principales : la voie de règlement du conflit du Haut-Karabakh [au point mort depuis le cessez-le-feu de 1994] “quasiment tracée” et “l’acceptation publique des principes de règlement proposés par le Groupe de Minsk”, rapporte le site arménien Armenia Online. Le président de l’Arménie veut ainsi dire qu’il ne souhaite pas de changements, que “le statut quo actuel convient à l’Arménie”, car “le format des négociations, avec la médiation du Groupe de Minsk, arrange tout le monde, les pourparlers se poursuivent, et entre-temps les armes se taisent”, analyse le site arménien Gala.
Eurasianet
| Chakhine Abbassov
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