mercredi 14 septembre 2011

Les Talibans marquent des points dans la guerre psychologique

« Ce n’est pas vraiment grand-chose (…) une demi-douzaine de roquettes tirées de 800 m ce n’est pas le Têt (1), c’est du harcèlement », déclarait mercredi 14 septembre l’ambassadeur américain à Kaboul, en référence à l’offensive menée en janvier 1968 par les Vietcongs pendant la guerre du Vietnam. Minimisant la portée des attaques des talibans mardi à Kaboul, Ryan Crocker a estimé que « si c’est tout ce qu’ils peuvent faire (…) cela montre leur faiblesse ».
Il a même jugé que la réaction des forces de sécurité afghanes était un « vrai succès ». « Elles ont fait ça elles-mêmes. C’était une opération afghane. Nous n’avions pas de forces engagées. » Le processus « de transition », qui prévoit le transfert de la responsabilité de la sécurité aux forces afghanes d’ici à fin 2014 « se déroulera selon le rythme prévu ».

Rappel des faits

Les forces afghanes sont venues à bout mercredi, après plusieurs heures de siège, d’un groupe de kamikazes qui avaient pris position mardi dans un immeuble en construction d’une dizaine d’étages, en plein centre de Kaboul. De là, ils avaient commencé à tirer au fusil d’assaut et à la roquette, visant notamment le QG de l’Otan et l’ambassade américaine. 
Quatre afghans, un garde et trois demandeurs de visa, ont été blessés lors des attaques contre l’enceinte diplomatique tandis que le complexe de l’Otan a subi des « dégâts mineurs ».
Neuf kamikazes ont été tués, selon la police : six dans l’immeuble et trois autres, abattus à l’ouest de la capitale et sur la route de l’aéroport. Revendiquée par un porte-parole taliban, la responsabilité des attaques a été attribuée par l’ambassadeur américain au réseau Haqqani, affilié aux talibans et réputé proche d’Al-Qaida.

Attaque sophistiquée

Spectaculaire, quoique sans portée militaire, cette nouvelle série d’attaques au cœur de la capitale avait clairement un objectif psychologique et médiatique : montrer aux Afghans et aux Occidentaux la capacité des insurgés à pénétrer, ne serait-ce que quelques heures, les quartiers les plus sécurisés de Kaboul, miner la confiance des citoyens dans les forces de sécurité afghanes et souligner le lien entre insécurité et présence étrangère dans le pays. 
Dans la perspective du retrait des troupes occidentales, les talibans affichent également leur détermination à poursuivre le combat, plutôt que de négocier une « réconciliation » avec le gouvernement afghan.
« L’ampleur de cette attaque prouve que les terroristes ont reçu l’aide de responsables de la sécurité au sein du gouvernement, affirmait, par ailleurs, Mohammed Naim Hamidzai Lalai, président de la Commission du parlement pour la sécurité intérieure. Une attaque aussi sophistiquée serait impossible à planifier sans des complicités à l’intérieur. »
En dehors du survol de l’immeuble par des hélicoptères, les forces afghanes, officiellement en charge de la sécurité de Kaboul depuis moins de deux mois, n’ont pas reçu une aide très visible de l’Otan mais elles ont toujours besoin de soutien en logistique et moyens de surveillance et communication. 
Reste la bataille de perception, plus que jamais à l’avantage des insurgés. « C’est difficile, cela continuera à être difficile mais ce n’est pas désespéré. La clé, c’est la patience stratégique », affirmait la semaine dernière Ryan Crocker, ajoutant que « le plus gros problème de Kaboul est la circulation ».
(1) L’offensive du Têt, en janvier 1968, est une bataille mythique de la guerre du Vietnam.
François d’Alançon

Source : LaCroix.fr

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