vendredi 6 janvier 2012

Le chef du CNT craint une guerre civile en Libye


La Libye risque de sombrer dans la guerre civile si les milices révolutionnaires qui ont contribué à la chute de Mouammar Kadhafi ne rentrent pas dans le rang, a déclaré le président du Conseil national de transition (CNT), Moustapha Abdeljalil, qui vient de nommer le général Youssef al Mankouch à la tête de l'armée.
Mardi, des affrontements entre une milice locale et des combattants originaires de la ville de Misrata ont fait quatre morts à Tripoli, la capitale.
"Nous nous trouvons aujourd'hui confrontés à deux choix", a dit Abdeljalil lors d'une réunion mardi soir à Benghazi, dans l'est de la Libye.
"Soit nous répondons sans faiblesse à ces événements (les combats entre milices) qui entraînent les Libyens dans une confrontation militaire que nous ne pouvons accepter, soit c'est la sécession et la guerre civile", a-t-il ajouté.
"Sans sécurité, il ne peut y avoir de justice, de progrès, d'élections, chacun veut faire sa propre loi. Il n'y a pas de sécurité tant que les combattants refusent de rendre leurs armes."
MOSAIQUE
Plus de deux mois après la capture et la mort de Mouammar Kadhafi, Tripoli ressemble à une mosaïque de fiefs se trouvant chacun entre les mains de milices différentes. La police est quasiment invisible, hormis pour réguler la circulation, et on ne distingue non plus aucune trace de la nouvelle armée nationale.
Même si leur présence dans la capitale est moins visible depuis fin décembre, des miliciens continuent d'occuper des bâtiments autrefois utilisés par les forces de Mouammar Kadhafi et ils sortent dans les rues une fois la nuit tombée.
Deux grandes milices sont issues de Tripoli même. L'une est dirigée par Abdel Hakim Belhadj, islamiste passé par des camps taliban en Afghanistan et désormais installé dans une suite d'un hôtel de luxe à Tripoli. L'autre est contrôlée par Abdoullah Naker, ancien ingénieur en électronique ne cachant pas son mépris à l'égard de Belhadj.
Des milices étrangères à la capitale sont aussi actives dans Tripoli, telles que celle de Zentane, qui contrôle l'aéroport international.
Les milices de Misrata se sont en grande parties retirées du centre de Tripoli mais maintiennent une présence dans les faubourgs de l'est de la capitale tandis que des combattants de la minorité berbère délimitent leurs territoires à l'aide de drapeaux bleus, verts et jaunes.
Un autre groupe de combattants originaires de l'est de la Libye, berceau de la révolution, ajoute à la confusion. Proches des chefs du CNT, ils souhaitent former le noyau dur de la nouvelle armée, ce qui irrite leurs rivaux.
CONDITIONS
Moustapha Abdeljalil vient de nommer commandant en chef des forces armées libyennes Youssef al Mankouch, un général qui était à la retraite et originaire de Misrata, l'un des bastions de la révolte l'an dernier contre le régime de Mouammar Kadhafi.
Mankouch a participé très tôt au soulèvement qui a conduit à la chute et à la mort de Kadhafi le 20 octobre et occupe actuellement le poste de vice-ministre de la Défense.
Cette nomination est la première mesure d'importance que prend le CNT pour mettre sur pied une nouvelle armée nationale. Elle place les miliciens face à une alternative: céder le contrôle de leurs territoires à l'armée ou défier ouvertement le nouveau pouvoir.
Dans une interview diffusée par la télévision libyenne, Youssef al Mankouch a déclaré que le mécanisme d'incorporation des miliciens au sein de l'armée serait bientôt prêt.
"Le message que j'adresse aux révolutionnaires est (...) qu'ils doivent prouver une nouvelle fois au monde entier qu'ils sont des patriotes, prouver au monde qu'ils vont s'intégrer au sein des institutions de l'Etat et oeuvrer à l'édification d'une armée nationale puissante", a-t-il dit à la chaîne Al Hourra.
Les miliciens ne semblent pas encore convaincus. Un membre du conseil militaire de Misrata a ainsi jugé que le moment n'était pas forcément venu pour les milices de renoncer à leurs activités.
"Une fois que l'Etat aura prouvé sa capacité à assumer sa responsabilité de protéger les frontières et garantir la sécurité du pays, alors nous remettrons nos armes", a dit Fessi Bachaga.
Abdoullah Naker, chef de l'une des deux principales milices de Tripoli, a lui aussi posé ses conditions à l'intégration de ses hommes au sein de la nouvelle armée.
"Nous agirons ainsi une fois que seront garantis les droits et la solde des révolutionnaires", a-t-il dit dimanche.

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