RFI: Alors que deux jours auparavant, l’administration américaine faisait savoir que les preuves n’étaient pas suffisantes pour conclure à une réelle utilisation d’armes chimiques dans le conflit, elle a changé de position ce jeudi 25 avril. Comment expliquer ce changement d’attitude ?
Jean-Claude Allard : La question des armes chimiques est présente depuis le début du conflit pour deux raisons : la question de l’existence de ces armes et celle de leur emploi.
Aujourd’hui, cette question revient suite à l’envoi d’une lettre des parlementaires à la Maison Blanche, qui demandent un point de situation. La Maison Blanche a été obligée de répondre, en reconnaissant un certain nombre de choses, mais avec extrêmement de prudence, car tout ce qu’elle peut annoncer est lié à la fameuse « ligne rouge » de Barack Obama et peut donc lui lier les poings pour une intervention.
Pourquoi cette prudence ? Parce qu’il n’y a pas de certitude quant à la provenance des indicateurs qui sont, je le rappelle, des analyses de sang et des analyses de terrain faites sur des prélèvements de terrain et sur des victimes présumées. Donc, on ne sait pas réellement la façon dont ont été faites les contaminations. Est-ce par accident, ou est-ce par emploi délibéré ? Et dernier point que soulève la Maison Blanche, c’est que, en cas d’emploi délibéré, qui l’a fait ?
Bachar el-Assad a accusé les rebelles de les avoir employés à Alep et les rebelles accusent Bachar el-Assad de les employer à Damas et à Homs. Aucune commission d’enquête n’a pu aller sur le terrain à ces différents endroits, parce que Bachar el-Assad l’a refusé. Cela peut être une preuve.
Est-ce aller trop loin que de parler de pressions sur Barack Obama, de pressions israéliennes, notamment ?
La question israélienne est plus liée à la question de l’existence des armes qu’à celle de leur l’emploi. C'est-à-dire qu’il y a des stocks d’armes et de munitions dispersés sur le territoire syrien.
Si les rebelles s’emparent de ces stocks, Israël s’interroge sur lesquels d’entre eux auront la main dessus ? On sait aujourd’hui que la rébellion syrienne est divisée. Al-Nosra a fait allégeance à Aqmi. Le Hezbollah a des ramifications avec certains groupes rebelles. Si les stocks d’armes tombent dans l’un ou l’autre de ces deux groupes, c’est une menace pour Israël. Il y a deux actions à traiter : l’emploi ou la sécurisation des stocks d’armes.
Le secrétaire américain de la Défense, Chuck Hagel, a reconnu l’utilisation d’armes chimiques. Une reconnaissance toutefois extrêmement prudente. Il parle de « différents degrés de certitude. » Qu’est-ce que cela signifie, en clair ?
Cela signifie qu’il faut avoir la certitude de la provenance des échantillons qui ont été testés. Savoir si l’emploi a été délibéré, ou accidentel. Dernier point, éventuellement, est la possibilité d’un emploi de provocation.
Quel intérêt aurait Bachar el-Assad d’utiliser les armes chimiques ? Il sait depuis le début que c’est la « ligne rouge » de l’Occident. Il sait par ailleurs que l’Occident n’a pas envie de s’impliquer dans ce conflit. On le voit avec l’aller-retour sur la livraison d’armes rebelles. Sa stratégie devrait donc être de s’appuyer sur la Russie et la Chine comme il l’a fait jusqu’à présent et de continuer à maintenir la rébellion, en agissant avec des moyens conventionnels, de façon à ne pas exciter l’Occident, qui risquerait d’armer sa rébellion. Donc stratégiquement, il n’y a pas trop d’intérêt pour el-Assad, d’utiliser l’arme chimique.
On évoquait la Russie et la Chine. Si cette reconnaissance d’utilisation d’armes chimiques était avérée, cela pourrait-il changer leur point de vue ?
Vraisemblablement, oui. Aujourd’hui, Russie et Chine soutiennent Bachar el-Assad parce qu’il est, à leur esprit, encore possible de le soutenir, tout en composant avec l’Occident. C’est le même cas avec la Corée du Nord. Tant qu’il y a des provocations, c’est bien. Mais à partir du moment où ça ne franchit pas cette fameuse « ligne rouge. »
La Russie et la Chine soutiennent Bachar el-Assad, je pense qu’elles sont présentes en Syrie à ses côtés, qu’elles ont des informations. Elles n’ont pas intérêt à pousser Assad à l’utilisation des armes chimiques. Elles ont dû jouer jusqu’à présent un rôle de modérateur. Mais elles ont d’autres intérêts que de soutenir Assad : elles ont intérêt à se développer économiquement, à devenir de grandes puissances industrielles, économiques et autres. Si Assad a vraiment commis cette faute, elles l’abandonneront.
Jean-Claude Allard : La question des armes chimiques est présente depuis le début du conflit pour deux raisons : la question de l’existence de ces armes et celle de leur emploi.
Aujourd’hui, cette question revient suite à l’envoi d’une lettre des parlementaires à la Maison Blanche, qui demandent un point de situation. La Maison Blanche a été obligée de répondre, en reconnaissant un certain nombre de choses, mais avec extrêmement de prudence, car tout ce qu’elle peut annoncer est lié à la fameuse « ligne rouge » de Barack Obama et peut donc lui lier les poings pour une intervention.
Pourquoi cette prudence ? Parce qu’il n’y a pas de certitude quant à la provenance des indicateurs qui sont, je le rappelle, des analyses de sang et des analyses de terrain faites sur des prélèvements de terrain et sur des victimes présumées. Donc, on ne sait pas réellement la façon dont ont été faites les contaminations. Est-ce par accident, ou est-ce par emploi délibéré ? Et dernier point que soulève la Maison Blanche, c’est que, en cas d’emploi délibéré, qui l’a fait ?
Bachar el-Assad a accusé les rebelles de les avoir employés à Alep et les rebelles accusent Bachar el-Assad de les employer à Damas et à Homs. Aucune commission d’enquête n’a pu aller sur le terrain à ces différents endroits, parce que Bachar el-Assad l’a refusé. Cela peut être une preuve.
Est-ce aller trop loin que de parler de pressions sur Barack Obama, de pressions israéliennes, notamment ?
La question israélienne est plus liée à la question de l’existence des armes qu’à celle de leur l’emploi. C'est-à-dire qu’il y a des stocks d’armes et de munitions dispersés sur le territoire syrien.
Si les rebelles s’emparent de ces stocks, Israël s’interroge sur lesquels d’entre eux auront la main dessus ? On sait aujourd’hui que la rébellion syrienne est divisée. Al-Nosra a fait allégeance à Aqmi. Le Hezbollah a des ramifications avec certains groupes rebelles. Si les stocks d’armes tombent dans l’un ou l’autre de ces deux groupes, c’est une menace pour Israël. Il y a deux actions à traiter : l’emploi ou la sécurisation des stocks d’armes.
Le secrétaire américain de la Défense, Chuck Hagel, a reconnu l’utilisation d’armes chimiques. Une reconnaissance toutefois extrêmement prudente. Il parle de « différents degrés de certitude. » Qu’est-ce que cela signifie, en clair ?
Cela signifie qu’il faut avoir la certitude de la provenance des échantillons qui ont été testés. Savoir si l’emploi a été délibéré, ou accidentel. Dernier point, éventuellement, est la possibilité d’un emploi de provocation.
Quel intérêt aurait Bachar el-Assad d’utiliser les armes chimiques ? Il sait depuis le début que c’est la « ligne rouge » de l’Occident. Il sait par ailleurs que l’Occident n’a pas envie de s’impliquer dans ce conflit. On le voit avec l’aller-retour sur la livraison d’armes rebelles. Sa stratégie devrait donc être de s’appuyer sur la Russie et la Chine comme il l’a fait jusqu’à présent et de continuer à maintenir la rébellion, en agissant avec des moyens conventionnels, de façon à ne pas exciter l’Occident, qui risquerait d’armer sa rébellion. Donc stratégiquement, il n’y a pas trop d’intérêt pour el-Assad, d’utiliser l’arme chimique.
On évoquait la Russie et la Chine. Si cette reconnaissance d’utilisation d’armes chimiques était avérée, cela pourrait-il changer leur point de vue ?
Vraisemblablement, oui. Aujourd’hui, Russie et Chine soutiennent Bachar el-Assad parce qu’il est, à leur esprit, encore possible de le soutenir, tout en composant avec l’Occident. C’est le même cas avec la Corée du Nord. Tant qu’il y a des provocations, c’est bien. Mais à partir du moment où ça ne franchit pas cette fameuse « ligne rouge. »
La Russie et la Chine soutiennent Bachar el-Assad, je pense qu’elles sont présentes en Syrie à ses côtés, qu’elles ont des informations. Elles n’ont pas intérêt à pousser Assad à l’utilisation des armes chimiques. Elles ont dû jouer jusqu’à présent un rôle de modérateur. Mais elles ont d’autres intérêts que de soutenir Assad : elles ont intérêt à se développer économiquement, à devenir de grandes puissances industrielles, économiques et autres. Si Assad a vraiment commis cette faute, elles l’abandonneront.
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