À l’âge de 94 ans, Michel Déon, le dernier « Hussard » vivant, le « jeune homme vert », n’a guère les faveurs des gazettes littéraires bien-pensantes. Un ostracisme qu’il partage outre-Rhin avec l’un des plus grands écrivains européens du siècle dernier, l’Allemand Ernst Jünger, qui a atteint l’âge mémorable de 103 ans. L’anarchisme de droite, ça conserve !
Michel Déon, comme Ernst Jünger, demeure sans doute l’exemple rare d’une « littérature qui ne se donne pas aux éphémères », selon l’élégante formule de son ami Dominique de Roux, mort lui trop tôt, à 42 ans. Avant de partir vivre en Grèce, qui lui a inspiré ses plus beaux récits (Le rendez-vous de Patmos, Le balcon de Spetsai, etc.), Michel Déon avait partagé durant la guerre, à Lyon, l’aventure éditoriale de Charles Maurras comme secrétaire de rédaction de l’Action française. Dans les années 50, Michel Déon, bien qu’il s’en défende aujourd’hui, rejoint « ce groupe de jeunes écrivains que, par commodité, je nommerai fascistes », comme les diabolisa Bernard Frank, dans les Temps Modernes, les affublant néanmoins du joli nom de « Hussards » qui passera à la postérité.
L’amour du style, un style bref, cinglant, « à chaque phrase, il y a mort d’homme », caractérisaient ces « Hussards » réunis autour de Roger Nimier, le plus brillant d’entre eux, Blondin le plus insolent, François Nourissier, Félicien Marceau ou encore Jacques Laurent, plus grand public. Hétéroclites certes, hérétiques virulents dans leur négation de l’existentialisme ambiant, ils ferraillaient contre l’intellectualisme engagé de Saint-Germain-des-Prés. Dans leur ligne de mire, les « papes » de l’existentialisme, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, qu’Antoine Blondin, en singe désaltéré, rhabilla pour l’hiver : « Un agrégé replet et une amazone altière troussaient des concepts en toute simplicité à deux pas du croquant, comme on fabrique des gaufres. »
La plupart des « Hussards », Roger Nimier en tête, militeront pour l’Algérie française, manifestant ouvertement leur hostilité à la politique du général de Gaulle en Algérie. Michel Déon retrace cette épopée dans les « Gens de la nuit », dont le grand prêtre fut sans conteste Antoine Blondin : « Le noctambule qui découvre, chaque nuit, une métaphysique dans la machine à sous d’un bar-tabac de la rue du Bac. »
Puis, Michel Déon s’éloigna de ces nuits trop arrosées pour la lumière de la mer Égée où il partagea la vie du peuple grec qui, aujourd’hui comme hier, écrit-il, « mange, boit, chante, danse, peine, souffre, et un jour meurt, passant du rire aux larmes aussi vite qu’il passe des larmes au rire. »
Et même s’il a voulu en faire abstraction, la mythologie l’a souvent rattrapé, omniprésente dans la vie quotidienne : « Le berger de la montagne s’appelle Léonidas, le jardinier de nos voisins Épaminondas, un garçon de café Alcibiade, et les petites filles répondent aux noms d’Andromaque, Antigone, Iphigénie. Combien de Français se prénomment Vercingétorix, Mérovée ou Clovis ? »
Ad multos annos, Michel Déon !
Michel Déon, comme Ernst Jünger, demeure sans doute l’exemple rare d’une « littérature qui ne se donne pas aux éphémères », selon l’élégante formule de son ami Dominique de Roux, mort lui trop tôt, à 42 ans. Avant de partir vivre en Grèce, qui lui a inspiré ses plus beaux récits (Le rendez-vous de Patmos, Le balcon de Spetsai, etc.), Michel Déon avait partagé durant la guerre, à Lyon, l’aventure éditoriale de Charles Maurras comme secrétaire de rédaction de l’Action française. Dans les années 50, Michel Déon, bien qu’il s’en défende aujourd’hui, rejoint « ce groupe de jeunes écrivains que, par commodité, je nommerai fascistes », comme les diabolisa Bernard Frank, dans les Temps Modernes, les affublant néanmoins du joli nom de « Hussards » qui passera à la postérité.
L’amour du style, un style bref, cinglant, « à chaque phrase, il y a mort d’homme », caractérisaient ces « Hussards » réunis autour de Roger Nimier, le plus brillant d’entre eux, Blondin le plus insolent, François Nourissier, Félicien Marceau ou encore Jacques Laurent, plus grand public. Hétéroclites certes, hérétiques virulents dans leur négation de l’existentialisme ambiant, ils ferraillaient contre l’intellectualisme engagé de Saint-Germain-des-Prés. Dans leur ligne de mire, les « papes » de l’existentialisme, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, qu’Antoine Blondin, en singe désaltéré, rhabilla pour l’hiver : « Un agrégé replet et une amazone altière troussaient des concepts en toute simplicité à deux pas du croquant, comme on fabrique des gaufres. »
La plupart des « Hussards », Roger Nimier en tête, militeront pour l’Algérie française, manifestant ouvertement leur hostilité à la politique du général de Gaulle en Algérie. Michel Déon retrace cette épopée dans les « Gens de la nuit », dont le grand prêtre fut sans conteste Antoine Blondin : « Le noctambule qui découvre, chaque nuit, une métaphysique dans la machine à sous d’un bar-tabac de la rue du Bac. »
Puis, Michel Déon s’éloigna de ces nuits trop arrosées pour la lumière de la mer Égée où il partagea la vie du peuple grec qui, aujourd’hui comme hier, écrit-il, « mange, boit, chante, danse, peine, souffre, et un jour meurt, passant du rire aux larmes aussi vite qu’il passe des larmes au rire. »
Et même s’il a voulu en faire abstraction, la mythologie l’a souvent rattrapé, omniprésente dans la vie quotidienne : « Le berger de la montagne s’appelle Léonidas, le jardinier de nos voisins Épaminondas, un garçon de café Alcibiade, et les petites filles répondent aux noms d’Andromaque, Antigone, Iphigénie. Combien de Français se prénomment Vercingétorix, Mérovée ou Clovis ? »
Ad multos annos, Michel Déon !
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