mardi 3 novembre 2015

L’Allemagne tente de se sortir du conflit syrien

Ce projet sera très difficile à réaliser, à la fois parce que l’Allemagne a une lourde responsabilité dans la guerre et parce que la France persiste à vouloir détruire la République arabe syrienne.

Les services secrets allemands auraient participé aux côtés du Mossad à l’assassinat de Rafic Hariri en fournissant une arme qu’ils étaient les seuls à détenir [1].
L’idée était de provoquer une réaction populaire anti-syrienne, puis de faire débarquer les Marines pour repousser l’« occupant », conformément au plan de l’US Committee for a Free Lebanon et du Middle East Forum(Ending Syria’s Occupation of Lebanon : The U.S. Role) [2]. Cependant l’opération échoua puisque la Syrie, soulignant qu’elle était militairement présente au Liban à la requête de la communauté internationale (Accords de Taef [3]), évacua le pays lorsque la rue en fit la demande.

L’Allemagne encore s’impliqua dans la guerre actuelle, cette fois aux côtés du Royaume-Uni et de la France, en confiant la présidence de la réunion du « Groupe de travail sur le relèvement économique et le développement » des « Amis de la Syrie », à un haut diplomate, Clemens von Goetze. En juin 2012, il partagea lors d’une réunion à Abu Dhabi les richesses de la Syrie entre les États qui accepteraient de saboter la Conférence de Genève. Avant même d’avoir renversé la République arabe syrienne, les alliés se répartissaient les concessions d’exploitation de son gaz. Le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, créa un secrétariat permanent, doté d’un budget de 600 000 euros, pour gérer le pillage des hydrocarbures qu’il confia à Gunnar Wälzholz qui avait déjà servi identiquement contre l’Afghanistan [6].

Lorsque la France sabota la Conférence de Genève, l’Allemagne toujours aida à réaliser le plan —conçu dès 2007 par John Negroponte, alors directeur du Renseignement national US— de guerre de type nicaraguayen. Il s’agissait de multiplier les groupes terroristes pour « saigner » le pays. Elle mit à disposition la coordination internationale des Frères musulmans, toujours présente sur son territoire, à Aix-la-Chapelle, depuis la Guerre froide. C’est actuellement depuis là que la retraite d’Ahrar el-Sham, d’al-Qaïda, de Daesh et des autres est organisée.
Pourtant, aujourd’hui, le gouvernement Merkel constate l’efficacité des bombardements russes, les atermoiements états-uniens, et le bouleversement de l’équilibre stratégique international. Il cherche donc à se retirer de ce combat perdu et à faire la paix avec la Syrie. Ce revirement correspondrait évidemment à un rapprochement tant attendu —et tant redouté par Washington— entre Berlin et Moscou.
Cette évolution peut être expliquée au public à l’occasion de la crise des migrants. Préparée un an à l’avance à la demande du patron de l’industrie lourde Ulrich Grillo et exécutée par le président Recep Tayyip Erdoğan, le Haut-commissaire aux Réfugiés António Guterres, et le spéculateur George Soros, des centaines de milliers de personnes ont traversé les Balkans pour aller travailler à moindre prix en Allemagne [7]. Toutefois, l’opération s’est interrompue avec le début de l’intervention militaire russe, les Allemands ayant peur que des jihadistes fuyant les bombardements ne se mêlent aux migrants et aux réfugiés. D’ores et déjà, la population allemande se dresse contre les étrangers car le patronat a profité de l’occasion pour abolir le salaire minimum dans plusieurs États fédérés. Du coup, la « crise des réfugiés » fournit un possible alibi à un changement de politique face à la Syrie.
Quoi qu’il en soit, le rapprochement entre l’Allemagne et la Syrie sera difficile à négocier. Le ministre des Affaires étrangères et ancien patron du Renseignement, Frank-Walter Steinmeier, espère pouvoir organiser une réunion de type 5+1 (format de Vienne pour l’Iran) pour résoudre le conflit syrien. Mais la Russie le pousse à être plus ambitieux et à réunir autour de la table le président Poutine, la chancelière Merkel, le président Hollande et le président el-Assad (format Normandie comme pour l’Ukraine).


[1] « Révélations sur l’assassinat de Rafiq Hariri », par Thierry Meyssan,Оdnako (Russie), Réseau Voltaire, 29 novembre 2010.
[2] « Les plans de l’US Committee for a Free Lebanon », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 8 mars 2005.
[3] « Accord de Taëf (23 octobre 1989) », Réseau Voltaire, 23 octobre 1989.
[4] « Attentat contre Rafic Hariri : Une enquête biaisée ? », entretien de Jürgen Cain Külbel avec Silvia Cattori, Traduction Eva Hirschmugl , JPH,Réseau Voltaire, 15 septembre 2006.
[5] « La commission Mehlis discréditée », par Talaat Ramih, Réseau Voltaire, 9 décembre 2005.
[6] « Les "Amis de la Syrie" se partagent l’économie syrienne avant de l’avoir conquise », par German Foreign Policy, Horizons et débats (Suisse),Réseau Voltaire, 14 juin 2012.
[7] « La fausse "crise des réfugiés" », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 7 septembre 2015.


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