vendredi 29 juin 2012

Printemps arabe/ Rien n'est joué


Régime militaire ou théocratie ? Contrairement à ce que laissent penser les élections égyptiennes, l’avenir des pays arabes et islamiques ne se réduit pas à ce choix simpliste. Entretien avec le géopoliticien Walid Pharès.
 

 
PAR MICHEL GURFINKIEL.
 
Né au Liban, éduqué au Liban et en France, Walid Phares vit aux Etats-Unis depuis 1990. Professeur à la National Defense University américaine, auteur de nombreux ouvrages en arabe et en anglais, il conseille actuellement le candidat républicain Mitt Romney sur les questions géopolitiques liées à l’islamisme et au Proche-Orient.
 
Va-t-on en Egypte vers un « compromis historique » entre l’armée et les islamistes ?
 
  En fait, ce compromis est déjà en place depuis plus d’un an. Mais c’est un compromis instable, où chaque partenaire tente de l’emporter sur l’autre. 
 
Sur quoi repose ce compromis ?
  
Au début, il s’agissait de faire face à un ennemi commun : la jeunesse libérale, qui aspire à un mode de vie de type occidental, fondé sur les libertés individuelles. Les militaires, « propriétaires » du pays depuis Nasser, ont longtemps traité cette opposition par leur mépris. Jusqu’au choc de janvier 2011 : les jeunes libéraux réussissent à mobiliser des foules de plus en plus grandes sur la place Tahrir, au Caire, en recourant à des technologies de communication difficiles à contrôler, comme les « réseaux sociaux ». Le choc n’est pas moindre pour les islamistes : ils croyaient constituer la principale force d’opposition, et voilà que des pans entiers de la société, les cadres, les intellectuels, les femmes, les coptes, les ouvriers et même la paysannerie, se rallient aux libéraux et les rejoignent sur la place Tahrir. Tant pour les militaires que les islamistes, il est alors impératif, vital, de marginaliser les libéraux. Une alliance tacite se noue, qui permet aux islamistes de gagner les législatives.
 
 
Mais ensuite les islamistes évoquent de plus en plus ouvertement leurs buts véritables : remplacer le régime militaire par une théocratie. Ce qui entraîne un renversement d’alliance pour l’élection présidentielle : le candidat des militaires, l’ancien général d’aviation Ahmed Shafik,  tente de s’appuyer sur une partie au moins des libéraux. En définitive, c’est le candidat des Frères musulmans, Mohamed Morsi, qui l’emporte, quoique de justesse. Les militaires se sont prémuni par une série de décrets constitutionnels qui leurs octroient des pouvoirs exceptionnels, surtout en matière de défense, de sécurité et de souveraineté. Et par un arrêté du Tribunal constitutionnel qui dissout le parlement à majorité islamiste. Un nouveau compromis s’instaure, bien différent du premier : une sorte d’équilibre de la terreur, où les uns menacent de recourir à une répression impitoyable et les autres de déclencher un « méga-Tahrir ».
  
 
Y a-t-il vraiment eu un « printemps arabe », en Egypte et ailleurs ?
     
  Assurément, même s’il a été suivi par un « hiver islamique » glacial. Le schéma égyptien se retrouve un peu partout : ce sont les libéraux qui renversent la dictature, ou initient le renversement ; mais ils sont rapidement évincés par les islamistes et les salafistes. Ou pour reprendre l’observation d’un intellectuel égyptien : une démocratisation trop rapide donne toujours le pouvoir, dans un premier temps, aux forces antidémocratiques, parce que celles-ci disposent de réseaux militants mieux structurés. En terre d’islam, les islamistes contrôlent les mosquées : le principal lieu public – sinon le seul, dans la mesure où tous les autres sont quadrillés par la police et les services secrets. C’est un énorme avantage lors des premières élections libres. On l’a vu en Algérie dès 1992. On le voit aujourd’hui en Egypte, en Tunisie…
 
Mais à terme, le printemps arabe – ou arabo-islamique  - reviendra. D’ailleurs, sa véritable date de naissance n’est pas 2011, mais 2005 : quand le peuple libanais a contraint l’occupant syrien au départ. Il a rejailli en 2009, avec la révolte populaire iranienne contre le trucage des élections. Aujourd’hui, les sociétés civiles arabes et islamiques s’organisent, apprennent à se structurer et reconstituent leurs réseaux afin de résister à la montée islamiste.
 
  Quelles ressemblances et quelles différences entre les divers « printemps » ?
 
 
 En Tunisie, les laïques du Centre et les progressistes ont formé une opposition solide face au parti islamiste Nahda et à ses alliés salafistes. Cet exemple aura une grande influence sur les autres pays arabes,  de la même façon que la « révolution du jasmin », en janvier 2011, a inspiré d’autres soulèvements.
 
Une victoire totale des islamistes en Egypte pourrait conduire à la création d’un espace islamiste géant de Gaza au Maroc. Mais les libéraux égyptiens n’ont pas encore dit leur dernier mot.
 
En Libye, l’échec est total. Paradoxalement, le pays où les Occidentaux ont le plus investi en termes militaires et financiers, est en passe de devenir le pays le plus anti-occidental du « printemps arabe ». Les milices islamistes et les groupes jihadistes liés à Al Qaida quadrillent le pays, les tribus importantes sont entrées en dissidence, les minorités africaines et amazighes se soulèvent. A terme, nous risquons de nous trouver devant une version nord-africaine de l’Afghanistan sous les Talibans.
 
Bahrein se situe sur une ligne de confrontation entre l’Iran et l’Arabie Saoudite. En raison de sa sociologie : population à majorité chiite, monarchie sunnite.
 
Le Yémen connaît des divisions encore plus profondes : clivage nord-sud qui risque de scinder à nouveau le pays en deux, comme c’était le cas jusqu’en 1990 ; au Nord-Yemen, rébellion chiite appuyée par l’Iran, considérée comme un risque stratégique majeur par l’Arabie Saoudite ; dans le centre du pays, prolifération des cellules d’Al Qaida. Ce qui rend problématique une solution durable, en dépit des efforts de la classe politique de Sanaa pour trouver un successeur à Ali Abdallah Saleh.
 
Le cas le plus complexe, c’est évidemment la Syrie. A la différence de la Libye de Kadhafi, le régime d’Assad dispose du soutien de trois autres puissances régionales : l’Iran, une partie de l’Irak, et le Hezbollah libanais. Mais l’opposition syrienne dispose elle aussi de soutiens extérieurs, si bien que le régime ne parvient plus à la dompter. Une sorte de « statu quo violent » s’est donc installé, avec pour corollaire un nombre croissant de victimes civiles. Une intervention occidentale est impossible sans un soutien américain : ce qui la rend hautement improbable, sauf cataclysme, avant novembre : les Etats-Unis étant bridés, jusque là, par l’élection présidentielle. Mais là encore, la question se répète ; si Assad tombe, qui le remplacera ? Les islamistes,  comme c’est la cas presque partout ailleurs ? Le chaos, comme en Libye ?
 
 
La crise peut-elle atteindre d'autres pays du Moyen-Orient ?
  
La crise couve dans l’ensemble de la région. Nous  assisterons vraisemblablement à de graves difficultés au Liban et en Irak,  par porosité avec la Syrie. La Jordanie verra une montée des islamistes, l’Algérie sera confrontée à nouvelle vague islamiste, mais aussi au séparatisme kabyle. Les salafistes se renforcent déjà au Mali ; leur influence va s’étendre en Mauritanie, au Niger et bien sûr au Nigeria. Le Soudan fait face à de nouveaux soulèvements non arabes, aussi bien au Darfour qu’en Nubie ou dans les tribus Bejas, à l’est du pays. L’opposition libérale peut se manifester à nouveau en Iran, et toucher les minorités ethniques.
 
 
Les pays occidentaux ont-ils encore un rôle à jouer dans cette région du monde ?
  
 
Incontestablement. Dans le monde arabo-islamique, l’Occident reste en fait la référence absolue : l’exemple même d’une société libre, pacifique, développée, puissante. Mais les Occidentaux ne s’en rendent pas compte, ou ne veulent pas s’en rendre compte. Une sorte de tropisme les conduit à soutenir systématiquement les régimes les plus archaïques, les plus moins démocratiques, les plus anti-occidentaux, qu’il s’agisse de monarchies, de théocraties ou de dictatures, puis, quand ceux-ci s’effondrent – et ils s’effondrent tous, un jour ou l’autre – à se tourner vers les révolutionnaires les plus extrémistes. Un exemple accablant de ce comportement a été fourni par Barack Obama, qui est allé prononcer au Caire un discours d’une invraisemblable servilité à l’égard de l’islamisme en juin 2009, au moment même où la société civile iranienne tout entière se révoltait contre la dictature des mollahs.
 
 
 
 
© Michel Gurfinkiel & Valeurs Actuelles, 2012

Tuerie de Liège: la preuve que le Gouvernement belge ment !


 
"Très vite, la police identifie l'auteur et confirme qu'il s'agit d'un acte isolé, qui ne s'est déroulé que sur la place Saint-Lambert. "
 
 
 
C’était le 13 décembre 2011, Nordine Amrani tire et lance des grenades sur la foule amassée sur la place Saint-Lambert à Liège.
Etonnamment la police avait fait fermer le marché de Noël dans la matinée.
 
Très vite le premier ministre et la ministre de l’intérieur annoncent qu’il s’agit de l’acte isolé d’un déséquilibré (encore un !).
 
Aujourd’hui, en exclusivité, le journaliste Max Loiseau démontre dans l’édition de ce jour de l’hebdomadaire PERE UBU-PAN que le gouvernement belge ment !
Car à Liège c’était bien un attentat terroriste islamiste qui a été perpétré le 13/12/2011 !
Et un juge d’instruction est sur la piste des complices.
 
In extenso voici l’article paru ce jour
 
 
La justice liégeoise pense que Nordine Amrani n’a pas agi seul !
 
C’est une exclusivité UBU-PAN. Nordine Amrani, l’auteur de l’attaque sur la place Saint-Lambert à Liège en décembre dernier qui a toujours été présenté comme un déséquilibré isolé aurait peut-être eu des complices, c’est en tout cas ce que pense la justice liégeoise. C’est aussi ce que nous dénonçons chez UBU-PAN depuis le premier jour.

Il y a deux semaines, le Vif sous la plume de Marie-Cécile Royen, écrivait qu’il y avait un black-out sur l’enquête… que rien ne filtrait ! Un juge d’instruction a l’affaire en charge, il s’agit de Madame Rusinowski. L’affaire est donc bien à l’instruction depuis 6 mois… Certaines victimes quant à elles, se sont constituées parties civiles.

J’ai donc interrogé maître Xavier Magnée, avocat pénaliste reconnu et lui ai posé une seule question : Que se passe-t-il en cas de décès du suspect (d’un délit ou d’un crime), si celui-ci a agi seul ? Réponse de Xavier Magnée : « Le décès du suspect éteint obligatoirement et systématiquement l’action publique et civile si celle-ci ne s’était pas constituée avant le décès de l’auteur. » Ce qui veut dire clairement pour nos lecteurs, que si Amrani avait effectivement agi seul, l’enquête aurait du s’arrêter avec son décès, les parties civiles n’auraient pas pu se constituer, Amrani étant décédé au moment des faits. Maître Magnée me précise que si une instruction est en cours, elle se fait donc à charge de « X ». Il me précise : « C’est donc que la justice cherche d’éventuels complices ou coauteurs. »

Je contacte donc Maître Alexandre Wilmotte (avocat des parties civiles) qui me confirme qu’il y a bien une instruction à charge de « X » et que certaines victimes se sont constituées parties civiles pour avoir accès au dossier. Margaux Donckier (porte parole d’Anemie Turtelboom, ministre de la justice) a répondu de manière laconique à ma question sur le sujet : « Désolée, mais je ne peux pas répondre à votre question. Il faut s’adresser au parquet de Liège. »
Le parquet de Liège répond aux abonnés absents…

Il y a donc une gêne évidente, notre question (d’ordre technique) dérange.

Voilà de manière non équivoque, la preuve que la justice liégeoise enquête sur d’éventuelles complicités, ce qui exclut clairement la version officielle : Amrani aurait agi seul et dans un moment de folie ! Si la justice cherche les éventuels complices, c’est que la préméditation ne fait aucun doute. On en revient donc à ce que nous dénonçons depuis le début chez UBU-PAN : L’attaque de Liège pourrait être un acte terroriste ! Les déclarations politiques ne sont donc que des mensonges dans le but d’endormir la population !

mercredi 27 juin 2012

Allemagne : le gouvernement Merkel veut turquifier l’armée

Rendre absolument irréversible la substitution de population en cours, tel est le mot d’ordre de tous les politiciens du Système à travers l’Europe. Il n’est donc pas surprenant qu’une de leurs priorités soit d’augmenter toujours davantage la « diversité » ethnique dans les armées européennes.
En Allemagne, où le service militaire est devenu un volontariat l’année dernière, la part des engagés issus de l’immigration est déjà de plus d’un quart : 26%, soit à peine moins que leur part dans la classe d’âge correspondante dans l’ensemble de la population (27%). Mais ce n’est pas encore assez pour le gouvernement Merkel. Le ministre chrétien-démocrate de la Défense, Thomas de Maizière, vient d’expliquer qu’il voulait plus d’immigrés dans l’armée allemande, afin que celle-ci « soit représentative de la moyenne de la population ».
Un des moyens imaginés par Maizière est d’obtenir du gouvernement turc la reconnaissance du service militaire allemand, de telle sorte que les binationaux qui effectuent leur volontariat en Allemagne soient dispensés du service militaire de 15 mois obligatoire en Turquie. Le ministre chrétien-démocrate s’est rendu mercredi à Ankara pour rencontrer son homologue turc, et s’y est livré à une opération de séduction, jusqu’à saluer en turc les soldats qui lui présentaient les armes (« Merhabe asker! », a-t-il crié, c’est-à-dire « Bonjour, soldats! »).
Surtout, Maizière s’est fait accompagner de deux officiers allemands d’origine turque, le médecin militaire féminin Leval Kaya-Yildis, et le major Erhan Ursavas, dont la présence très médiatisée entend « donner un double signal : du côté turc, que les immigrés sont les bienvenus dans la Bundeswehr ; à destination de l’Allemagne, qu’encore plus d’immigrés seraient les bienvenus dans les forces combattantes ».
Leval Kaya-Yildis, dont le père était arrivé comme travailleur immigré en Allemagne en 1963, et qui est elle-même mariée à un Turc, s’est présentée comme « une musulmane convaincue » et a recommandé la Bundeswehr comme « une patrie pour les musulmans ». Elle a expliqué que, lors de son séjour comme médecin militaire en Afghanistan, elle n’avait pas seulement soigné les soldats allemands mais s’était surtout occupée des musulmanes afghanes, qui refusaient de se laisser soigner par des médecins mâles. Elle a ainsi trouvé dans la Bundeswehr « son accomplissement comme médecin ». Le mess ne lui sert « évidemment » que des menus sans porc. N’y a-t-il pas pourtant « un danger, s’il lui arrivait quelque chose en Afghanistan, d’être enterrée chrétiennement ? » Aucun danger, rassure-t-elle : “Nous prendrions immédiatement contact avec un imam” ».
Bref, le message aux musulmans (à papiers) allemands est clair : engagez-vous, rengagez-vous !
[cc] Novopress.info, 2012, Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d'origine [http://fr.novopress.info/]

Dhimmitude : le grand bon en avant ?

COLOGNE/KÖLN (NOVOpress via PI News) — Il n’y aurait en Allemagne que quelque quatre millions d’adeptes de l’islam, dont la moitié avec la nationalité allemande. Mais ils savent occuper l’espace public, avec l’aide d’une police à la dhimmitude étonnamment avancée.
Il y a peu, deux membres du parti de défense des droits du citoyen Freiheit (Liberté) (1) ont décidé de se rendre à un prêche du salafiste Pierre Vogel (ancien boxeur professionnel reconverti à l’islamisme radical) à Cologne. Ils y trouvent une conséquente présence policière pour sécuriser la manifestation, et nos deux compères y font comme d’autres l’expérience du comportement surprenant de la police. Alors que devant eux une femme voilée accompagnée de ses enfants se faufile comme si de rien n’était entre un véhicule blindé et un canon à eau, nos deux amis se font arrêter : sans conteste possible un contrôle au faciès.

Témoignage

- Bonjour.
- Halte! Restez là. Puis-je voir vos papiers ?
- Bien sûr.
Plusieurs minutes passent, alors que cinq policiers scrutent les papiers et discutent avec animation. Deux autres nous gardent à l’œil pendant ce contrôle.
- À quel groupuscule appartenez vous ? D’où venez vous ?
- Nous voulons assister à la conférence de monsieur Vogel.
- Vous êtes de gauche, de droite ?
- Non, non, vous vous méprenez. Nous ne venons pas en tant que représentants d’un mouvement politique. Nous voulons juste nous informer.
- Bon! Montrez moi ça : qu’avez vous donc là sur vous ?
- La constitution.
- Pourquoi donc la constitution ?
- La question ne pourrait-elle pas plutôt être : pourquoi pas ?
- Je pense que vous savez parfaitement pourquoi on ne devrait pas brandir la constitution ici !
- Non. Pour quelle raison ?
- Vous savez bien où vous vous trouvez ici. Vous n’avez donc pas vu les images de Bonn (2) et de ce qui s’y est passé ? Lors de manifestations comme celle-ci, ils arrive souvent qu’eux s’en prennent à la police.
- Et vous ne trouvez pas inquiétant qu’ici, en Allemagne, on ne puisse plus ouvertement arborer la constitution ?
Une femme policier s’approche avec les papiers.
- Tout est en ordre. Vous pouvez continuer, mais faites moi disparaître cette constitution !
- Vous parlez sérieusement?
- Oui! Rangez moi ça!
Le même jour, une jeune femme fait une expérience tous aussi surprenante:
La police m’a interdit de me rendre à la manifestation salafiste, en me précisant que si j’avais porté une burqua, ils n’y auraient eu aucun souci. Visiblement, si l’on est femme, il faut aujourd’hui porter une burqua pour conserver le droit à la libre circulation en Allemagne!

Un autre témoin cite une manifestation salafiste au centre de Berlin, tombant le jour de la finale de la coupe de football

Il y avait une grande manifestation salafiste, une bonne centaine de policiers, et beaucoup de badauds qui souvent ne savent même pas ce qui se passe. Tout à coup apparurent une quarantaine de supporters de l’équipe de Borussia-Dortmund (appelée familièrement BVB) et qui braillaient « BVB!BVB! ». Un policier s’est alors avancé vers eux et leur a intimé le silence. Motif: les salafistes ne comprendraient pas ce qui est scandé et risqueraient de se sentir provoqués, pensant qu’il s’agisse là d’appels hostiles à l’islam…

Michael Stürzenberger, député au Land de Bavière, membre de Freiheit et journaliste indépendant témoigne

Le 9 mai je voulais me rendre en tant que journaliste à une manifestation de PRO-NRW(3) (opposants a construction d’une mosquée-cathédrale à Cologne) …[à la gare] il y avait déjà deux véhicules de police qui étaient à l’évidence là à cause de la manifestation à proximité de PRO. Je me suis approché de l’un des véhicules dans lequel il y avait plusieurs policier pour demander mon chemin. L’on m’a sèchement rétorqué: « nous ne le savons pas et si nous le savions, nous ne dirions pas ».
Puis, comme pour ponctuer la fin de la conversation, ils ont refermé la porte latérale leur véhicule. Je leur demandai encore si c’était là leur illustration de [célèbre slogan] « la police: ton ami, ton secours ». Pas de réponse.
Alors j’ai exhibé ma carte de presse, et là seulement ils ont daigné m’indiquer le chemin. C’est à peine croyable. Soit ces agents sont eux même de gauche et affichent leur engagement politique par leur comportement en service. Soit ils ont reçu des ordres de la part de la coalition rouge-verte de gauche qui tient le Ministère de l’intérieur. Ce sont là vraiment les prémices d’une dictature de la pensée de gauche!
En 2009 à Duisburg, les forces de l’ordre on fait décrocher un drapeau israélien de la fenêtre d’un appartement parce que dans la rue il y avait une manifestation d’excités pro-palestiniens qui lançaient des pierres. Une mesure qui est maintenant loin d’être un cas isolé. Aujourd’hui, les libertés individuelles se trouvent rapidement mises en veilleuse pour peu qu’il s’agisse d’éviter des « provocations », la constitution mise sous le manteau, l’habillement occidental et les chants des supporters de foot interdits. Tout se passe comme si les dirigeants du pays avaient décidé de se soumettre de manière préventive devant la violence potentielle des musulmans.

Notes

1) Fondé en 2010, la parti Freiheit (liberté) réclame plus de liberté d’opinion,de presse, de réunion; plus de sécurité; plus de liberté religieuse, ou tout simplement le droit d’être agnostique. Il se prononce clairement contre la bureaucratie antidémocratique de Bruxelles, la dictature des partis politiques et toutes les idéologies totalitaires, tout particulièrement l’islam.
2) Le 5 mai dernier, lors d’une manifestation d’opposants à l’islamisation rassemblant une trentaine de participants qui arboraient des caricatures de Mahomet, leur conséquente protection policière a été prise à parti par 500 à 600 salafistes. 29 policiers ont été blessés par arme blanche, dont deux grièvement. Depuis lors, la police a procédé à diverses perquisitions et arrestations dans les milieux salafistes.
3) PRO-NRW est un petit parti d’un millier d’adhérent de Rhénanie Westphalie communément catalogué à l’extrême droite. Il s’oppose activement à la construction de mosquées et de minarets, à l’islamisation, et est aujourd’hui – est-ce étonnant ? – qualifié d’anticonstitutionnel.
Source : Politically incorrect

De la torture, en veux-tu en voilà par Bahar Kimyongür

A notre connaissance, jamais un bureau des droits de l'homme n'a occupé autant de place dans la presse mainstream. Nous parlons bien sûr de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), cette officine située à Londres, en très bons termes avec l'administration Cameron et animée par un homme d'affaires, Oussama Ali Souleimane alias Rami Abdel Rahmane. Dans ses communiqués repris comme parole d'évangile par les agences de presse, l'OSDH fait régulièrement passer des combattants armés pour des victimes civiles, classe les victimes « pro-Bachar » de l'insurrection pour des victimes de l'armée gouvernementale et gonfle sa liste nécrologique avec de décès « apolitiques », notamment des accidentés de la route. Surfant sur le succès de l'OSDH et dans l'espoir que les victimes du terrorisme de l'Etat turc soient un peu plus entendues, notre collaborateur et ami Bahar Kimyongür qui milite depuis plus de quinze ans pour la démocratisation de la Turquie, s'est autoproclamé « directeur de l'Observatoire turc des droits de l'homme » (OTDH). Les deux seules fois où il est passé à la télévision belge pour expliquer la situation en Turquie lui ont valu d'être poursuivi pour terrorisme. Syrie-Turquie, deux poids deux mesures ?



Voici des images qui ne feront pas le tour du monde (libre) :



Et pour cause, elles montrent un lynchage policier qui ne s'est déroulé ni en Iran, ni en Syrie mais en Turquie.

La Turquie, cette magnifique destination de vacances est aussi une belle dictature islamo-libérale placée sous la férule du Parti de la justice et du développement (AKP) depuis 10 ans et le garde-chiourme du monde « libre » depuis 60 ans, 1952 étant l'année de son adhésion à l'OTAN.

La victime de ce lynchage policier est un chauffeur pressé de conduire une femme enceinte à l'hôpital.

Pendant son contrôle d’identité, Ahmet Koca a eu le malheur de parler en kurde, la « langue des terroristes » selon ses tortionnaires.

Il subira une vé rita ble ratonnade pendant de longues minutes devant la femme enceinte qu'il conduisait et devant ses enfants.

Ahmet Koca sera assommé par une volée de coups de poings, de coups de pied, de coups de matraque et de ceintures.

Le cas d'Ahmet Koca est loin d'être isolé. L'an dernier, au moment où la presse occidentale nous rivait les yeux sur la Syrie, la Ligue turque des droits de l'homme (IHD) a enregistré 3.252 cas de torture et de mauvais traitements dans les centres de détention turcs.

Voici quelques données chiffrées concernant l'ampleur du terrorisme d’État sévissant dans ce pays qui, paradoxalement, se situe à l'avant-garde de la guerre pour la démocratie en Syrie :

- Avec 96 journalistes emprisonnés (chiffres publiés le 18 juin 2012 par la Plate-forme de solidarité avec les journalistes emprisonnés - TGDP), la Turquie compte le plus grand nombre de journalistes incarcérés au monde. Ces derniers sont accusés à tort et à travers de terrorisme d'extrême-gauche, de terrorisme séparatiste ou de complot putschiste.

- La Turquie compte actuellement 8.010 prisonniers politiques (chiffres officiels de 2011) soit le plus grand nombre de prisonniers politiques au monde

- Les prisonniers politiques sont tués à petits feux dans le silence des cellules d'isolement (prisons de type F). Quant aux prisonniers de droit commun, ils sont tués à grandes flammes, parqués comme du bétail dans des dortoirs surpeuplés (prisons de type E) où règne une chaleur de plus de 40 degrés. Le 16 juin 2012 à Urfa, une mutinerie s'est soldée par la mort de 13 détenus, victimes de l'incendie qu'ils ont eux-mêmes allumés pour protester contre leurs conditions de détention inhumaines. La plus jeune des victimes avait 18 ans. La plus « âgée » : 34 ans. La révolte carcérale s'est propagée vers les prisons d'Adana, Osmaniye, Gaziantep où l'on dénombre de plusieurs blessés.

- Pas moins de 2.200 étudiants et lycéens croupissent dans les prisons pour avoir manifesté pacifiquement pour un enseignement gratuit et démocratique ou pour le respect de leurs droits nationaux et culturels
- D'après les chiffres publiés par le ministère turc de la justice en avril dernier, 2.281 enfants se trouvent derrière les barreaux. Ils subissent régulièrement des abus sexuels notamment à la prison de Pozanti.

- En dix ans de règne de l'AKP, 171 enfants auraient été tués par les forces de sécurité d'après la Ligue turque des droits de l'homme (IHD)

- L'armée turque utilise des armes chimiques et du napalm contre les maquisards kurdes. Le 22 octobre 2011, 24 combattants kurdes ont perdu la vie sous les bombes chimiques interdites larguées par l'aviation militaire.

- L'armée turque utilise des drones israéliens Heron ou des drones américains Predator contre la rébellion kurde. De nombreux villageois sont victimes de ces opérations meurtrières. Le 28 décembre dernier, 34 civils kurdes ont été tués à Uludere/Roboski.

- La police exerce une violence létale contre les rassemblements démocratiques à travers l'usage de matraques ou de gaz lacrymogènes hautement toxiques. Le 28 mai dernier, Cayan Birben, 31 ans, est mort asphyxié par les bombes à gaz de la police. Birben est la 6e victime de ces gaz en un an.

- Le parlement turc compte huit députés de l'AKP réputés proches des djihadistes qui ont bouté le feu à l'hôtel Madimak le 2 juillet 1993 tuant 34 intellectuels. Il s'agit de Zeyid Aslan, Hüsnü Tuna, Ali Bulut, Ali Aslik, Halil Ürün, Haydar Kemal Kurt, Bülent Tüfekçi et Ibrahim Hakki Aksar.

Malgré la terreur que fait régner cette dictature pro-occidentale et membre de l'OTAN sur nos peuples, l'opposition turque n'a jamais sollicité la moindre intervention de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS) ni celle des États-membres de l'Alliance bolivarienne pour les Amériques (ALBA).

Consciente que seule la lutte sociale permettra de faire de la Turquie une patrie libre et démocratique, l'opposition turque remercie cette autre communauté internationale (dont se gausse bien entendu l'Occident nombriliste et "humanitaire") pour son respect envers notre droit de disposer de nous-mêmes.


Observatoire turc des droits de l'homme (OTDH)
otdh.turquie@yahoo.fr
Le 21 juin 2012

“La Syrie a tiré hier sur un CASA CN 235-100 turc (avion de sauvetage). Pour Ankara, cette fois la coupe est pleine”

De manière intéressante, Todays Zaman, média turc de référence, mentionne “lundi” :
“Syrian forces firing at a Turkish aircraft dispatched on a search and rescue (SAR) mission on Monday may have violated a bilateral agreement signed between Turkey and Syria.”

On note une fois de plus que le plus grand flou règne dans la presse:
Selon le Figaro : “L’incident, qui a eu lieu vendredi ou samedi, a été rapporté par le ministre des affaires étrangères turc Ahmet Davutoglu aux diplomates des pays de l’Union européenne et de l’Otan”. Vendredi ou samedi…

Selon Libération : “Aucun tir n’a été effectué, mais l’appareil, qui recherchait les pilotes du F-4 abattu vendredi, a été «accroché» par le radar d’une batterie anti-aérienne.” Aucun tir n’a été effectué.
Selon l’Express : “Par ailleurs, un avion de sauvetage en mer turc aurait essuyé des tirs syriens alors qu’il menait des recherches pour retrouver les pilotes de ce premier avion, selon la Turquie.” Aurait essuyé des tirs.

On récapitule donc:
1) en guerre de l’information peu importe la date à laquelle les faits sont survenus, ce qui compte c’est la date à laquelle on en parle.
2) en guerre de l’information, peu importe ce qui c’est réellement passé, ce qui compte c’est la manière dont on en parle…Ce qui compte c’est le “ressenti” de l’opinion.

Voir à titre d’illustration la dernière manipulation intervenue en Afrique, sans aucune contre enquête sérieuse ni vérification approfondie des médias : http://nanojv.wordpress.com/2012/06/04/rdc-m23-rumeurs-subversion/

mardi 26 juin 2012

« Les sept plaies de l'Amérique d'Obama » de Jean-Michel Quatrepoint

Jean-Michel Quatrepoint, journaliste économique, qui exerça au Monde puis comme directeur des rédactions de l’Agefi, de la Tribune, du Nouvel Economiste, auteur, dernièrement, de Mourir pour le yuan, paru en septembre 2011, a publié un article intitulé « Les sept plaies de l’Amérique d’Obama » dans le numéro 134 de la revue Politique Internationale.
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A quelques mois de l’élection présidentielle américaine de novembre 2012, l’auteur part d’un parallèle entre la situation internationale et économique des Etats-Unis à l’automne 1979, époque à laquelle Reagan menait sa campagne sur le thème « du retour de l’Amérique », et celle existant trente-trois ans plus tard. Confrontée à de graves revers dans la conduite de sa politique mondiale et surtout en proie à des difficultés économiques majeures, l’Amérique est, de nouveau, face à une interrogation essentielle : aujourd’hui, de quelle manière peut-elle recouvrer « ce dynamisme qui était sa marque de fabrique » ?

Si dans le domaine des relations internationales, la position des Etats-Unis paraît moins humiliante qu’elle ne le fut à la fin des années soixante-dix, en revanche le contexte économique et social, particulièrement préoccupant, retient toute l’attention de Jean-Michel Quatrepoint qui en analyse les différents aspects au travers de sept éléments, par référence aux sept plaies d’Egypte (1).

Après un court propos sur la position internationale des Etats-Unis, l’auteur caractérise leur situation économique avant de procéder à un examen critique de l’action de Barack Obama, la différenciant de l’approche de Ronald Reagan. Le contexte ainsi introduit, il passe en revue ce que sont, à son sens, les « sept plaies de l’Amérique d’Obama ».

Refluant sur la scène planétaire, l’Amérique est face, d’abord, à la dégradation profonde de son économie
Dans le domaine international, si des rapprochements peuvent avoir cours, pour autant, les positions, à plus de trente ans d’intervalle, ne sont pas analogues. Comparativement à la forme prise par l’abandon du Vietnam et à la faillite en Iran, Washington a su, cette fois, organiser « la retraite sur des positions préparées à l’avance ». Seulement, malgré l’exécution de Ben Laden, la guerre conduite en Afghanistan est un échec, celle d’Irak s’est avérée financièrement particulièrement coûteuse et dans le monde musulman en général, « les alliés de l’Amérique » doivent progressivement laisser la place aux islamistes.
Le plus alarmant tient à l’état de l’économie, marqué, malgré l’injection massive de liquidités, par un chômage devenu structurel, une pauvreté croissante, des déficits budgétaires et commerciaux en constante augmentation, une dette incontrôlée, certains Etats, telle la Californie en faillite. Depuis la grande dépression l’écart des revenus n’a jamais été aussi important. En recul dans le monde, l’Amérique découvre qu’elle n’est même plus la maîtresse chez elle, les Chinois, comme les Japonais auparavant, prennent des parts de marché. La confiance en son modèle, fondé sur la chance offerte à chacun de s’enrichir et le respect des règles, est profondément altérée : « trop de gens » ont maintenant l’impression « qu’ils ne pourront pas s’en sortir » ; la plupart considère que le « monde de la finance » a été insuffisamment sanctionné.
Pour un rebond, l’Amérique doit retrouver une « confiance en elle-même » au moment où elle sent qu’il ne s’agit peut-être pas de la fin d’un cycle commencé sous la présidence de Reagan mais de la mise en cause d’un modèle, celui de l’Occident qui a dominé la planète « depuis un peu plus de deux siècles ».

Un président louvoyant
Au-delà de cette appréhension de l’avenir, sans doute différente, entre deux époques, Jean Michel Quatrepoint met en exergue ce qui sépare les approches de Reagan et d’Obama. Le premier, lors de son accès au pouvoir, a non seulement un programme mais une assise idéologique, le retour aux sources du libéralisme prôné par l’Ecole de Chicago avec des références aux théories de Schumpeter ou de Hayek. Au contraire, le président en exercice, sans véritable programme, encore moins d’idéologie, comme d’ailleurs son adversaire Républicain de 2008, n’a pas su prendre de décisions « révolutionnaires » en appliquant, par exemple, au secteur financier les mesures administrées à celui de l’automobile.
Homme de compromis plus qu’homme d’action, Obama, est sous l’influence d’un entourage lié au milieu financier dont il faut remarquer qu’il est généralement plus proche des Démocrates que des Républicains. Ce même entourage, servant déjà Bill Clinton, s’était caractérisé par son approche particulièrement libérale (suppression du Glass-Steagall Act (2), complaisance à l’égard du secteur financier qui développa les prêts dits « subprimes », ouverture, sans condition, de l’OMC à la Chine).
Au fil de son mandat, le président s’est montré louvoyant, rassurant successivement sa droite et sa gauche alors que le pays aurait besoin d’un nouveau « New Deal » afin de porter remède à ce que l’auteur appelle, à l’instar de l’Egypte des pharaons, les sept plaies de l’Amérique. Elles sont ainsi présentées :
  •  « croissance en berne et chômage structurel »
  •  « le déficitaire en dernier ressort »
  •  « quand Apple creuse les déficits américains »
  •  « un capitalisme autophage »
  •  « les riches et les autres »
  •  « les lobbies contre la démocratie »
  •  « un modèle en bout de course »
« Croissance en berne et chômage structurel »
La réunion d’un ensemble de données statistiques, d’ordre macroéconomique, témoigne de la profondeur de la crise que traversent les Etats-Unis. Déjà, depuis trois décennies, le taux de croissance économique des pays occidentaux, sous l’effet de crises financières successives, a baissé, en moyenne, d’un point tous les dix ans. S’agissant de l’Amérique, l’augmentation moyenne du produit intérieur brut (PIB) qui était de 3,6% dans les années quatre vingt-dix a été abaissée à 2% après les différents évènements qui marquèrent la première décennie du millénaire : le krach boursier lié à la « bulle internet », les attentats du 11 septembre 2001, la crise des « subprimes ». En dollar constant (2005), après une chute de 3,4% en 2009, le PIB a progressé de 3% en 2010 et de 1,75% en 2011. Ces niveaux de croissance sont en deçà de ceux exigés pour résorber le chômage. Celui-ci touchait officiellement 8,9% de la population active en 2011, 9,6% en 2010, 9,3% en 2009 (5,8% en 2008). Selon le Ministère du Travail, précise l’auteur, en prenant en compte « toute la population, y compris celle qui a cherché un emploi, le taux de chômage réel par rapport à la population active s’établirait à 16% ». L’auteur précise que quelque quatorze millions de personnes seraient sans travail. De plus, le faible montant des retraites conduit les individus les plus âgés à prolonger leur activité professionnelle au détriment des jeunes : un emploi sur cinq contre un emploi sur sept, il y a trente ans, est occupé par une personne âgée de plus de 55 ans.
Par crainte d’une perte d’emploi mais aussi d’une baisse des revenus, les ménages « consomment peu », contribuant à l’atonie économique. Comme conséquence, il faut souligner, aussi, un phénomène social important : un repli sur la structure familiale. En trois ans, le nombre d’américains vivant « dans une famille pluri-générationnelle » serait passé « de 46,5 millions à 51,4 millions ».

« Le déficitaire en dernier ressort »
Les années deux mille ont été marquées par une augmentation considérable des déficits, qu’il s’agisse de la balance commerciale, du budget fédéral ou du budget des Etats. La conséquence est la croissance corrélative de l’endettement. La dette totale des Etats-Unis, tous les agents confondus (ménages, entreprises, secteur financier, dette publique), représentait en 2000 280% du produit intérieur brut. En 2011, elle atteignait 400% du produit intérieur brut.
En fait, l’Amérique consomme plus qu’elle ne produit. Pour elle comme pour les pays occidentaux, dans leur ensemble, la « mondialisation », dont l’admission de la Chine à l’OMC constitue l’un des évènements majeurs, ne s’avère pas aussi bénéfique que le postulaient leurs dirigeants qui se refusent à admettre la réalité présente. La forme prise par la relation économique avec la Chine marque, peut-être, une évolution, fondamentale qui tient à la dissociation entre les intérêts des entreprises multinationales américaines, dans la recherche de leur expansion, et ceux de la population de leur pays d’origine. Le régime de Pékin offre à ces entreprises « un réservoir quasiment inépuisable de main-d’œuvre bon marché » à condition que les biens produits soient exportés. L’Empire du milieu est ainsi devenu la seconde puissance économique mondiale, accumulant des « excédents considérables ». L’équilibre extérieur des Etats-Unis a ainsi été affecté, à l’échelon de la balance commerciale, par un déficit des échanges de produits manufacturés sensiblement amplifié. Au niveau global de la balance des paiements, dont la balance commerciale est une composante, l’équilibre a été altéré par le transfert de capitaux à long terme pour le financement des investissements et la localisation des bénéfices hors du territoire américain.
Jean-Michel Quatrepoint note qu’entre 2006 et 2010 le déficit des échanges commerciaux des Etats-Unis par rapport à la Chine est passé de 83 milliards de dollars en 2000 à 272 milliards de dollars en 2010.
Le cumul de ces déficits accroît « inexorablement » la dette de l’Etat fédéral souscrite, dorénavant, pour une large part, par la Réserve fédérale, prêteur en dernier ressort, la Chine et le Japon détenant respectivement aux environs de 1 200 milliards et de 900 milliards de dollars de bons du Trésor américain. Les Etats-Unis sont, ainsi, devenus le « déficitaire en dernier ressort ».

« Quand Apple creuse les déficits américains »
Citant en préambule une affirmation du président de General Motors datant de 1953, « Ce qui est bon pour l’Amérique est bon pour General Motors et réciproquement », l’auteur montre comment cette réciproque n’est plus vraie de nos jours. Au début des années 1990, les classes dirigeantes firent le choix de transférer vers les pays émergents « les productions de marchandises les plus polluantes », misant sur la haute technologie, le secteur financier et les services. Par rapport au secteur industriel ne sont conservés que la conception et « le marketing ». Le secteur financier, par la création de produits élaborés fondés sur des modèles mathématiques, a pour rôle de générer des plus-values. Il s’agit là du mouvement d’un capitalisme industriel vers un capitalisme financier. Ainsi, parallèlement à la baisse de la part du secteur industriel dans le produit intérieur brut, celle du secteur financier dans l’économie augmente sensiblement (8,4% du produit intérieur brut (3), 41% des bénéfices des entreprises américaines) (4). Dans la répartition de l’emploi, les services financiers représentent 6% du total au même niveau que les nouvelles technologies, les industries manufacturières occupant 7% de la main d’œuvre, le reste étant dévolu aux services qui offrent souvent des postes peu qualifiés et mal payés.
Le transfert de productions vers les pays émergents, en particulier la Chine, n’a pas seulement d’incidences quantitatives par rapport à la valeur ajoutée industrielle produite et à l’emploi mais il pourrait aussi se traduire à terme par une perte de la suprématie dans le domaine de la technologie. Outre le cas des panneaux solaires (depuis 2002 la balance commerciale dans ce secteur est devenue déficitaire de plus de 40 milliards de dollars par an), l’auteur se réfère à l’exemple d’Apple. L’entreprise ne compte plus aux Etats-Unis que 25 000 personnes, la production ayant été confiée à une société taiwanaise, Foxcom qui emploie en Chine 250 000 personnes exclusivement pour les besoins du fabricant d’ordinateurs. Dans un premier temps, après sa conception par des ingénieurs américains, les composants des produits sont confectionnés dans plusieurs pays dont la Corée, le Japon et l’Allemagne, pour les plus complexes puis assemblés en Chine. La valeur ajoutée de celle-ci dans le processus de fabrication est alors limitée (3,6% pour un iphone). Mais, avec la production de masse et la recherche de composants moins chers à réaliser et présentant les mêmes performances, la part des fournisseurs chinois augmente, permettant l’abaissement des coûts. Le revers est que ces fournisseurs ont pu copier certains composants. Globalement, pour un iPhone vendu 500 dollars sur le marché américain en 2009, la marge d’Apple était de 321 dollars (64%) et le coût de production de 179 dollars. Jean-Michel Quatrepoint évalue à une trentaine de dollars par appareil le prix d’un rapatriement de la production aux Etats-Unis, laissant encore une marge confortable à l’entreprise.
Ainsi, ce déplacement des productions vers des pays considérés comme émergents a des effets sociaux, en termes d’emplois, économiques, sur le plan de l’équilibre des échanges extérieurs et, enfin, technologiques au sens où il permet à ces pays d’acquérir des techniques de haut niveau et, potentiellement, des avantages concurrentiels. A cet égard, il faut remarquer que la Chine occupe, maintenant, la première place dans le domaine du photovoltaïque « à partir de technologies américaines ».
Comme l’indique Susan Hockfield, présidente du MIT [Massachusetts Istitute of Technology], la croissance des Etats-Unis ne saurait reposer sur les seuls services, 20 millions d’emplois devant être créés dans la prochaine décennie et le déficit commercial propre aux produits manufacturés réduit. Le montant de ce dernier est actuellement de l’ordre de 500 millions de dollars. Cependant cet infléchissement ne pourra se faire sans l’adhésion des entreprises multinationales américaines.

« Un capitalisme autophage »
Un autre aspect exprimant la dissociation croissante entre ces entreprises multinationales et le pays de leur création, de leur siège et de leur développement est l’esquive devant l’impôt dont elle pourrait être redevable vis-à-vis de ce pays. L’évasion fiscale dénoncée par le sénateur Obama en février 2007 au travers d’un projet de loi destiné à prévenir les abus (« Stop Tax Haven Abuse Act ») est appréhendée comme un moyen « d’optimisation fiscale », permise par la mondialisation (facilité de transfert des capitaux) et les nouvelles technologies de traitement de l’information. Pour réaliser leurs fins, les entreprises usent du « savoir-faire » de juristes, de fiscalistes et de comptables. Elles répondent, ainsi, à l’exigence d’un actionnariat qui s’inscrit dans une logique à court terme, sensible, d’abord, au rendement offert. Ce rendement peut encore être amélioré lorsque les sociétés procèdent au rachat de leurs propres actions, diminuant ainsi leur capital nominal et augmentant proportionnellement les dividendes distribués. De cette dernière possibilité, celle d’une « destruction de valeur », l’auteur tire le terme de « capitalisme autophage ».
Devenu président, l’ancien sénateur de l’Illinois a nommé comme responsable du Conseil des conseillers économiques le président de General Electric. Celle-ci, en 2010, malgré un bénéfice conséquent au niveau du groupe mondial comme pour les activités sises sur le territoire américain, non seulement n’a pas acquitté d’impôt aux Etats-Unis mais a profité d’un crédit d’impôt grâce à un report de pertes de GE Capital, la branche spécialisée dans la fourniture de services financiers aux particuliers et aux entreprises.
Ainsi, ce capitalisme américain, devenu « autophage », a perdu ses valeurs, transférant hors du territoire américain le travail, l’impôt, le capital et les investissements.

« Les riches et les autres »
Ayant basculé depuis une trentaine d’années dans une autre forme de capitalisme où dominent les marchés financiers et l’esprit qu’il implique en termes de fonctionnement économique et social, l’Amérique a vu croître corrélativement les inégalités. Celles-ci ont touché, d’abord, la distribution des revenus. « Entre 1980 et 2005, plus de 80% de l’augmentation des revenus des Américains ont été captés par 1% de la population. Un phénomène confirmé par une étude plus récente : entre 2002 et 2007, les deux tiers de la croissance totale des revenus ont encore été récupérés par ce 1% ». Elles affectent aussi les règles ordonnant la vie collective avec la mansuétude dont ont bénéficié les banquiers après la crise de 2007-2008 alors que les faillites des Caisses d’Epargne dans les années quatre-vingt avaient conduit à de nombreuses arrestations. Depuis lors, selon l’auteur, le groupe de pression constitué par le monde de la finance et des sociétés multinationales « a désormais d’innombrables relais au sein de l’appareil d’Etat ».

« Les lobbies contre la démocratie »
Jean-Michel Quatrepoint remarque que la défense des intérêts du monde financier exerce une influence de plus en plus prégnante sur les autorités politiques américaines. Entre 1990 et 2010, 2,3 milliards de dollars ont été dépensés à ce titre. La commission parlementaire du Congrès sur les Services financiers, qui compte le plus de membres, est la plus sensible aux pressions, initiant des textes comme la « tax holiday » (2004) dont les effets sont loin de répondre aux promesses de ses instigateurs et bénéficiaires. Aux termes de cette disposition fiscale, les capitaux correspondant aux bénéfices réalisés hors du territoire national pouvaient être transférés à la société mère, c’est à dire aux Etats-Unis, moyennant le paiement d’une taxe d’un faible montant (5,5%). En contrepartie, les sociétés s’engageaient à investir localement et à créer des emplois. En fait, l’essentiel des montants a été redistribué aux actionnaires et dès l’année suivante, les entreprises concernées ont repris le mouvement d’implantations à l’étranger y laissant les bénéfices perçus.
Face à cette prééminence d’intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général par le jeu des influences et des pressions, Jean-Michel Quatrepoint marque son pessimisme quant à l’évolution à venir. En effet, la Cour suprême a autorisé « les entreprises à financer directement des campagnes publicitaires pour les élections » lesquelles campagnes sont de plus en plus coûteuses.

« Un modèle en bout de course »
La crise financière, étendue dans ses conséquences aux domaines économique et social, débouche sur une mise en cause de l’aptitude des dirigeants politiques à déterminer les solutions. Cette défiance à l’égard du pouvoir de Washington et, plus largement, vis-à-vis d’élites incapables de faire prévaloir le bien commun qui donnerait ainsi un sens à leur action, est incarnée par des mouvements comme le « Tea Party » et les Indignés. Une telle évolution touche « bien des pays occidentaux » à un moment où le modèle représenté par le capitalisme occidental, caractérisé par le développement d’une vaste classe moyenne, politiquement dominante et ainsi garante de la démocratie, est contesté.
Ce qui est récusé dans d’autres aires de civilisation n’est pas le principe d’une économie de marché mais le lien entre « la démocratie politique telle qu’elle est entendue depuis Tocqueville et le développement économique ». Ce lien n’est pas la référence aussi bien pour la Chine, dont l’économie prospère sans le corollaire démocratique, que pour « le monde arabo-musulman » où les évolutions en cours au travers « de la montée d’un islamisme dit modéré » témoigne de la recherche d’une voie propre de développement fondée sur « un modèle théocratique » par rapport auquel la femme ou les minorités n’ont pas la même place qu’en Occident.
En soulignant que l’atteinte portée aux valeurs n’est pas sans relation avec la crise présente, l’auteur observe, alors, que si « l’Amérique et plus généralement les Occidentaux » persévéraient à détruire la classe moyenne comme à « démanteler les systèmes de protection sociale », « le pire est à craindre ».
Devant cet ensemble de phénomènes qui atteignent la société américaine dans ses profondeurs et qui affectent une puissance maintenant confrontée à d’autres paradigmes de développement, les Etats-Unis se trouvent au croisement de deux voies possibles, celles du déclin ou de la « résilience ». La première signifie de poursuivre la politique actuelle, dépourvue d’une vision, au gré des pressions d’intérêts particuliers, s’abandonnant au repli. La « résilience » suppose de définir « un nouveau modèle », s’appuyant sur les fondements qui ont constitué l’Amérique mais délaissant toutes les dérives qui l’ont corrodées. Néanmoins, cette Amérique devra se garder de « vouloir l’imposer au reste du monde » car « l’altérité est source de progrès et n’est pas un obstacle aux échanges ».
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Au regard de l’état ainsi brossé de celle qui demeure malgré tout la première puissance économique et militaire du monde, deux questions, au moins, suscitent une réflexion de la part du lecteur de l’article :
  • n’est-il pas possible de rétablir sur le territoire national un potentiel de production manufacturière ?L’exemple d’Apple, cité par Jean-Michel Quatrepoint, montre que le déplacement d’activités industrielles vers des pays aux faibles coûts de main-d’œuvre n’est pas une exigence indispensable à la préservation de l’entreprise. En l’occurrence, il ne s’agit que d’assurer un niveau de marge le plus élevé possible. Certes, il ne faut pas en tirer une règle générale applicable en toutes circonstances et négliger les nécessités de développer des implantations locales pour capter des marchés extérieurs. Néanmoins, lorsque le transfert de fabrication voire de sièges sociaux trouve sa justification dans la recherche d’une rentabilité accrue, de commodités juridiques, d’allègements de contraintes sociales, l’Etat, garant de l’intérêt collectif, est fondé à décider de mesures de sauvegarde. Celles-ci peuvent affecter les règles du commerce international, lesquelles, il faut en convenir, ne sont pas réellement respectées par tous leurs souscripteurs. Les mesures à adopter toucheraient, notamment, aux mouvements de capitaux liés aux investissements réalisés à l’étranger et à leurs revenus. Elles devraient avoir un effet direct sur l’équilibre de la balance des paiements. Elles seraient complétées par des dispositions fiscales.
  • n’assistons-nous pas à la dissociation entre les intérêts propres du capitalisme américain et le bien commun de la nation ?L’économie est au fondement de l’expansion du modèle américain. Celui-ci, dans la sphère occidentale et au-delà, a attiré et imprégné les esprits par différentes références, influant même sur la langue. Le mouvement de « mondialisation » qui s’inscrit dans cette voie, voulu et initié par une élite dirigeante américaine associant à ses vues celle d’autres pays, principalement en Europe, vise à asseoir, au travers du modèle, liant libéralisme économique et démocratie, une hégémonie assurant la prospérité des Etats-Unis. Mais cette primauté de l’économie, dans son acception la plus libérale et la plus individualiste, a son revers. Les entreprises américaines peuvent croître et s’enrichir hors des frontières nationales et les Américains s’appauvrirent. Le modèle, dans la perspective « d’une société mondiale », illusoire, pourrait demeurer mais sa base territoriale, vaciller. Alors, toutes choses étant égales par ailleurs, comme à l’hellénisme des cités grecques, puissantes et florissantes, succéda un temps hellénistique (5)où seule se maintint l’empreinte de leur civilisation, ne pourrions-nous pas assister a la persistance de l’influence économique et culturelle de l’Amérique cependant que s’éroderait sa puissance politique ?
Michel Leblay
20/06/2012
Notes :
(1) En réalité, selon le livre de l’Exode, dix plaies furent infligées à l’Egypte afin de convaincre le pharaon de laisser partir le peuple d’Israël. Cependant, il n’est pas rare qu’il soit fait mention des « sept plaies d’Egypte », les sept premières plaies étant décrites dans une division (« parasha ») du livre de l’Exode, les trois dernières dans la division suivante.
(2) Le « Glass-Steagall Act » ou « Banking Act » voté en 1933 » sous la présidence de Roosevelt rendait, notamment, incompatible les activités de banque de dépôts et de banque d'investissement.
(3) Selon James Bradford DeLong, le secteur de la finance et de l’assurance représenterait, aujourd’hui, 8,4% du PIB contre 2,8% en 1950, 3,8% en 1960 et 6% en 1990.
(4) Voir : http://economicsofcontempt.blogspot.fr/2009/03/is-financial-sector-too-big.html
(5) Ruinées par la guerre du Péloponnèse, au Vème siècle avant JC, les cités grecques ont été soumises par Philippe de Macédoine. L’époque « hellénistique » est la période courant du IVème siècle au Ier siècle avant JC, des conquêtes d’Alexandre le Grand jusqu’à l’achèvement de la domination romaine sur le bassin méditerranéen.
POLITIQUE INTERNATIONALE N° 134 - HIVER 2012
LES SEPT PLAIES DE L'AMERIQUE D'OBAMA
Article de Jean-Michel Quatrepoint, journaliste
Correspondance Polémia – 26/06/2011

Diffamation sur commande

Quand un pays veut entrer en guerre, il lui faut acquérir l’adhésion de sa population et le meilleur moyen d’y parvenir est le mensonge. Les exemples sont innombrables et on n’en dressera pas la liste ici. Rappelons simplement l’affaire des couveuses du Koweit qui avait permis aux Américains et à leurs alliés d’envahir l’Irak. Ce mensonge, découvert après les événements, avait été forgé par l’une des grandes agences américaines de Public relations et de traitement de l'information : Hill & Knowlton de New York. On nous signale un article, retrouvé en réalité par l’historien Paul-Eric Blanrue et mis en ligne sur son site « Le Clan des Vénitiens » – article publié par la revue zurichoise « Horizons & Débats » dans sa livraison du 10 mars 2007 – qui démontre que c’est encore un mensonge forgé par une influente agence de communication qui avait permis aux troupes de l’OTAN de s’engager contre la Serbie dans la Guerre dite de Bosnie. On reste pantois devant le coup de poker joué par cette agence… Polémia
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2–5 août 1992: coup de poker extraordinaire
Comment est-il possible que la responsabilité de la guerre en Croatie ait été attribuée à ceux qui ne l’ont pas commencée? Et pourquoi les médias ont-ils diffusé des mensonges éhontés et des demi-vérités, déformé la réalité et caché des faits importants? On trouve la réponse à ces questions dans le livre Les vérités yougoslaves ne sont pas toutes bonnes à dire de Jacques Merlino, rédacteur en chef de France 2. Dans cet ouvrage, il reproduit une interview de James Harff, directeur de la grande et très influente agence de communication américaine Ruder Finn Global Public Affairs qui fournit, entre autres, des informations à la Maison-Blanche.
James Harff reconnaît sans détours que son agence a été payée pour répandre de fausses informations des Croates, des musulmans bosniaques et plus tard des Albanais du Kosovo. Il avait déjà été en contact avec ces groupes ethniques avant la guerre. Jacques Merlino s’étonne de la franchise de James Harff, mais il semble qu’un homme comme lui ne soit pas un danger pour cette entreprise géante renommée.

Voici un extrait de l’interview.
Merlino : Monsieur Harff, ce qui m’intéresse en premier lieu est d’essayer de comprendre votre méthode de travail.
Harff : C’est très simple. Un fichier, un ordinateur et un fax, voilà l’essentiel de nos outils de travail. Le fichier comprend quelques centaines de noms, journalistes, hommes politiques, représentants d’associations humanitaires, universitaires. L’ordinateur trie ce fichier selon une série de thèmes croisés afin de présenter des cibles très efficaces. Et cet ordinateur est relié à un fax. Ainsi, nous pouvons en quelques minutes diffuser une information précise à tous ceux dont nous pouvons penser qu’ils réagiront. Notre métier est de disséminer l’information, de la faire circuler le plus vite possible pour que les thèses favorables à notre cause soient les premières à être exprimées. La vitesse est un élément essentiel. Dès qu’une information est bonne pour nous, nous nous devons de l’ancrer tout de suite dans l’opinion publique. Car nous savons parfaitement que c’est la première affirmation qui compte. Les démentis n’ont aucune efficacité.

Merlino : A quel rythme intervenez-vous?
Harff : Ce n’est pas la quantité qui est importante. C’est la capacité d’intervenir au bon moment et auprès de la personne adéquate. Je peux vous donner quelques chiffres si vous le souhaitez. Ainsi, de juin à septembre, nous avons organisé trente entretiens avec les principaux groupes de presse et nous avons diffusé treize informations exclusives, trente-sept fax de dernière minute, dix-sept lettres officielles et huit rapports officiels. Nous avons également organisé des rencontres entre des officiels bosniaques et le candidat à la vice-présidence Al Gore, le très actif secrétaire d’Etat Lawrence Eagleburger et dix sénateurs influents dont George Mitchell et Robert Dole. Nous avons donné 48 coups de téléphone à des membres de la Maison-Blanche, 20 à des sénateurs et près de 100 à des journalistes, éditorialistes, présentateurs de journaux télévisés et autres personnages influents dans les médias.

Merlino : Quelle précision! Mais dans tout ce travail, de quoi êtes-vous le plus fier?

Harff : D’avoir réussi à mettre de notre côté l’opinion juive. La partie était très délicate et le dossier comportait un très grand danger de ce côté-là. Car le président Tudjman a été très imprudent dans son livre Déroute de la vérité historique. A lire ses écrits, on peut l’accuser d’antisémitisme. Du côté bosniaque, cela ne se présentait pas mieux car le président Izetbegovic avait, dans sa Déclaration islamique publiée en 1970, pris trop fortement position en faveur d’un Etat islamique et fondamentaliste. En outre, le passé de la Croatie et de la Bosnie avait été marqué par un antisémitisme réel et cruel. Plusieurs dizaines de milliers de juifs ont été supprimés dans les camps croates. Il y avait donc toutes les raisons pour que les intellectuels et les organisations juives soient hostiles aux Croates et aux Bosniaques. Notre challenge était de renverser cet état de choses. Et nous l’avons réussi d’une manière magistrale. Entre le 2 et le 5 août 1992, lorsque le New York Newsday a sorti l’affaire des camps. Nous avons alors saisi l’affaire au bond et immédiatement, nous avons circonvenu trois grandes organisations juives: la B’nai B’rith Anti-Defamation League, l’American Jewish Committee et l’American Jewish Congress. Nous leur avons suggéré de publier un encart dans le New York Times et d’organiser une manifestation de protestation devant les Nations unies. Cela a formidablement marché ; l’entrée en jeu des organisations juives au côté des Bosniaques fut un extraordinaire coup de poker. Aussitôt, nous avons pu, dans l’opinion publique, faire coïncider Serbes et nazis.
Le dossier était complexe, personne ne comprenait ce qui se passait en Yougoslavie, et pour être franc, je vous dirai que la grande majorité des Américains se demandaient dans quel pays d’Afrique se trouvait la Bosnie, mais d’un seul coup nous pouvions présenter une affaire simple, une histoire avec des bons et des méchants. Nous savions que l’affaire se jouerait là. Et nous avons gagné en visant la bonne cible, la cible juive.
Aussitôt, il y eut un très net changement de langage dans la presse avec l’emploi de termes à très forte valeur affective, tels que purification ethnique, camps de concentration, etc., le tout évoquant l’Allemagne nazie, les chambres à gaz et Auschwitz. La charge émotionnelle était si forte que plus personne ne pouvait aller contre sous peine d’être accusé de révisionnisme. Nous avons tapé en plein dans le mille.

Merlino : Peut-être. Mais entre le 2 et le 5 août 1992, vous n’aviez aucune preuve que ce que vous disiez était vrai. Vous ne disposiez que des articles de Newsday.
Harff : Notre travail n’est pas de vérifier l’information. Nous ne sommes pas équipés pour cela. Notre travail, je vous l’ai dit, est d’accélérer la circulation d’informations qui nous sont favorables, de viser des cibles judicieusement choisies. C’est ce que nous avons fait. Nous n’avons pas affirmé qu’il y avait des camps de la mort en Bosnie, nous avons fait savoir que Newsday l’affirmait.

Merlino : Mais c’est une énorme responsabilité. Vous rendez-vous compte de cette responsabilité?
Harff : Nous sommes des professionnels. Nous avions un travail à faire et nous l’avons fait. Nous ne sommes pas payés pour faire de la morale. Et quand bien même le débat serait placé sur ce terrain, nous aurions la conscience tranquille. Car si vous voulez prouver que les Serbes sont de pauvres victimes, allez-y, vous serez bien seul.»
Jacques Merlino
Les vérités yougoslaves ne sont pas toutes bonnes à dire
Horizons et Débats n° 9
10/03/2007
Extraits de : Alexander Dorin (Hrsg.), In unseren Himmeln kreuzt der fremde Gott. Verheimlichte Fakten der Kriege in Ex-Jugoslawien (Kroatien, Bosnien und Kosovo). Lörrach 1999. ISBN 3-9521797-0-1 (p. 66–69) (interview tirée de Jacques Merlino, Les vérités yougoslaves ne sont pas toutes bonnes à dire, Albin Michel, Paris, 1993 pp. 126–129)