vendredi 8 septembre 2017

La Turquie fait sa propagande sur les Rohingyas tout en continuant ses exactions au Kurdistan

La Turquie déploie des moyens en aide d’urgence pour la minorité musulmane du Myanmar tout en continuant les exactions contre la minorité Kurde, notamment en Syrie et en Irak.

Le président turc Recep Tayyip Erdoğan a décidé d’envoyer sa femme Emine Erdogan (en photo avec le voile) et son fils Bilal Erdogan, accompagnés par son ministre des Affaires étrangères, au Bangladesh dans le cadre d’une visite humanitaire aux centres des réfugiés musulmans Rohingyas.
La délégation turque comprend également la ministre de la Famille et des Affaires sociales Fatma Betül Sayan Kaya et Ravza Kavakcı Kan, l’adjointe du chef du Parti de la Justice et du Développement (AKP) chargée des droits de l’Homme.
On note aussi la présence du directeur de l’Agence de coopération et de coordination (TIKA) Sardar Cam, le directeur de la Direction de la gestion des catastrophes et des situations d’urgence (AFAD), Mehmet Gulluoglu le directeur général du Croissant-Rouge, Ibrahim Altan et d’autres hauts fonctionnaires.
Emine Erdogan a visité le camp de Kutupalong des réfugiés Rohingyas au Bangladesh pour prendre connaissance de la situation des victimes et pour recueillir personnellement des informations sur les pratiques et les abus auxquels ils ont été soumis. Cette visite avait aussi pour objectif de distribuer des vivres et de fournir de l’aide humanitaire.
L’épouse du président a fondu en larmes devant les caméras en voyant « la situation désastreuse que vie nos frères et sœurs Rohingyas ».
La visite sera l’achèvement des préparatifs engagés en prévision de l’établissement par la Turquie du pont humanitaire pour venir en aide aux Musulmans d’Arakan, où l’armée du Myanmar est en action depuis le 25 août.
L’exploitation par la Turquie de l’aide internationale (cette fois pour les musulmans Rohingyas et non aux Gazaouis) pour polir son image sanglante, est une routine bien huilée qui fait partie de la politique officielle.
Erdoğan est en train de faire monter une campagne sophistiquée de propagande multimédia, avec entre autres moyens un compte dédié sur Twitter et des vidéos sur YouTube, pour se vanter de son initiative ultra-médiatisée.
On peut qualifier ce genre de propagande de blanchiment d’image !

Des attaques intensives et aveugles contre les populations Kurdes

Il est plus aisé de traiter une catastrophe humanitaire lointaine que celle que la Turquie impose à la population Kurde dans toute la région.
L’assaut dévastateur des forces armées turques en Syrie et en Irak n’a pas cessé depuis avril dernier.
Ankara prétend vouloir chasser les forces kurdes affiliées au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une organisation armée, en guerre contre l’Etat turc depuis 1984. Pourtant, les forces kurdes visées, affiliées au PKK, constituent les partenaires principaux de la Coalition internationale contre l’EI dirigée par Washington.
En Syrie, où quelques deux millions de kurdes vivent, l’opération « Sabre de l’Euphrate » de l’armée turque dans les régions d’Afrin et d’Idlib a causé la mort de centaines de personnes dont des femmes et des enfants, ainsi que d’importantes destructions au nord-est de ce pays.
Peu médiatisé en Occident, l’opération « Sabre de l’Euphrate » a connue la participation d’au moins 7 000 militaires turcs, selon des médias turcs dont certains parlent de 20 000 forces, y compris des groupes armés pro-Turquie. Erdogan cherche une présence militaire turque permanente sur le territoire syrien.
Ankara, qui n’apprécie pas l’alliance des Kurdes avec les États-Unis, prétend que son intervention menée en Syrie vise seulement les YPG (Unités de protection du peuple), qui sont une composante-clé des Forces démocratiques syriennes (FDS) soutenues par les Etats-Unis et en lutte pour tenter de déloger l’Etat islamique de la ville de Rakka (1). La Turquie considère les YPG comme une émanation du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).
La Turquie cherche toujours à asseoir sa mainmise sur l’est de l’Euphrate, ce qui n’a pas été totalement réalisé au cours de l’opération. Les Kurdes, pour leur part, n’ont jamais dissimulé leur aspiration à un État indépendant dans le Nord syrien.
En Irak, c’est la région majoritairement yézidie du mont Sinjar qui est visée par les avions turcs. Le PKK y est présent depuis août 2014, à proximité des territoires contrôlés par sa branche syrienne.
Le président turc dit depuis des mois que le PKK s’est implanté dans la région de Sinjar et qu’Ankara ne permettra pas à l’organisation séparatiste d’étendre ses activités dans cette région.
Les bombardements dans les zones montagneuses de la frontière irako-turque se distinguent par le caractère aveugle de ces frappes. La population civile paie un lourd tribut dans ces attaques qui, selon les autorités turques, sont censées anéantir les capacités militaires du PKK.
Les pilonnages quasi-incessants et les raids massifs sont une véritable punition collective en violation des lois humanitaires internationales, mais comme les victimes ne sont pas des Palestiniens et les auteurs des Israéliens, la communauté internationale n’ayant rien à y gagner politiquement s’en désintéresse et les laisse crever. Le ciblage des habitations est une violation incontestablement grave du droit international.
Pour saboter et attaquer la solidarité avec le Kurdistan, la Turquie se donne comme maintenant objectif de protéger « les réfugiés musulmans Rohingyas. »
Ankara peut chercher à nous faire croire qu’il faut soutenir les Rohingyas.
Mais elle ne croit certainement pas qu’il faut soutenir les populations du Kurdistan.
Cette zone de peuplement kurde, qui s’étend sur environ 520 000 Km², reste dispersée entre principalement quatre pays voisins : la Turquie au Nord, la Syrie à l’Ouest, l’Irak au Sud et l’Iran à l’Est. La population kurde y est estimée à plus de 35 millions d’habitants.
Récemment, l’ex-vice président américain Joe Biden a dit penser qu’il verra dans sa génération la création d’un Etat kurde.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Ftouh Souhail 
(1) Les Turcs craignent qu’une fois cette ville entièrement libérée, les Kurdes soutenus par les États-Unis ne se tournent vers cette ville ; l’opération « Sabre de l’Euphrate » aurait donc l’effet d’une mesure préventive pour couper les mains aux Kurdes à Raqqa.

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