lundi 26 mars 2012

En voie de perdre le pouvoir à Damas, Assad prépare son Etat Alaouite

Conscient que sa fin approche à grand pas, Bachar Al-Assad prépare son Etat alaouite sur la côte syrienne (ouest). En compagnie de plusieurs hauts gradés alaouites, il prépare les fondements de cet Etat en transférant les armes lourdes, sophistiquées et sensibles, ainsi que les stocks d’or et les réserves de devises étrangères de la Banque centrale vers des fortifications construites dans la montagne alaouite.
 
Bachar Al-Assad avait évoqué ce scénario devant plusieurs de ses alliés, dont le ministre libanais Talal Arslan. Le site libanais « Youkal.net » attribue, ce soir, à l’avocat syrien Noureddine Al-Haraki, de nouvelles révélations sur l’état d’avancement du projet sécessionniste. Comme « Mediarabe.info »l’avait expliqué, « la détermination du régime de Bachar Al-Assad à reprendre la ville stratégique de Homs, ses efforts pour contrôler la province d’Idleb, et l’épuration menée contre les sunnites vivant dans la montagne alaouite, sont autant d’éléments qui préparent l’instauration de l’Etat alaouite ».
Noureddine Al-Haraki affirme en effet que « la famille Assad, certains hauts gradés alaouites ainsi que certains dignitaires de cette communauté, ont récemment accéléré l’exécution de leur projet, approuvé par la Russie et l’Iran. En aidant à l’installation de ce futur Etat et en le reconnaissant, ultérieurement, Moscou et Téhéran espèrent bénéficier de positions stratégiques avancées en Méditerranée grâce au maintien de la base navale russe et l’installation d’une autre base de la marine iranienne ». L’auteur ajoute que « les marines russe et iranienne protègent d’ores et déjà la façade maritime de l’Etat alaouite, alors que le Hezbollah est impliqué dans les opérations terrestres ».
L’accélération de la mise en place de cet Etat s’exprime, selon Noureddine Al-Haraki, à travers « le transfert en cours des armes lourdes et sensibles de l’armée syrienne vers la côte, ainsi que d’importants stocks de céréales, des réserves en or et en devises étrangères de la Banque centrale ».
Selon des experts et des spécialistes de la Syrie, le rêve de Bachar Al-Assad devient réalité dès la chute de son régime actuel. Assad s’emploie à étendre la région historiquement alaouite vers l’est (Homs et Al-Qusayr) et le nord (Idleb). Stratégiquement, l’élargissement vers Homs et Al-Qusayr assurera au futur Etat alaouite une jonction territoriale avec ses alliés du Hezbollah, dans le nord de la Békaa libanaise. La conquête d’Idleb, région également sunnite, vise à assurer une autre jonction avec la Turquie et rester en contact direct avec les Alaouites de Turquie (20 à 25% de la population) et à contrôler les gazoducs arabe (Egypte-Jordanie-Syrie-Turquie), Iranien (Iran-Turquie-Syrie) et Azéri (Azerbaïdjan-Turquie-Syrie). Le contrôle de ces infrastructures permettra au futur Etat alaouite d’accroître ses revenus et ses ressources énergétiques, de s’imposer comme un carrefour régional, et de priver le fond syrien (l’Etat sunnite de facto de toute façade maritime et de toute frontière avec la Turquie.
Toutefois, les opposants historiques au régime syrien, Wahid Sakr et l’économiste Mounzer Makhos, tous deux de confession alaouite, affirment que « plus de 70% de leur communauté s’opposent à cette sécession. Mais le projet de Bachar Al-Assad a le mérite de dévoiler sa très haute trahison. Il a confisqué le pouvoir au nom de l’unité arabe, alors qu’il œuvre en coulisses pour la division. Ce projet a également le mérite de prouver aux Syriens la contradiction flagrante entre le discours et la réalité de ce régime ».
Le projet d’Etat alaouite, synonyme d’éclatement de la Syrie, peut satisfaire certains Kurdes dans la mesure où ils peuvent espérer créer leur propre Etat. Les Kurdes engagés dans la révolution contre le régime, et qui s’accrochent à l’unité territoriale de la Syrie, sont menacés par le PKK. Assad utilise cette organisation terroriste pour déstabiliser la Turquie, mais également pour allumer une guerre inter-kurde et une guerre kurdo-sunnite, sans y parvenir encore.
Le même procédé est utilisé contre les Druzes. Après les avoir exploités, Assad perd doucement mais sûrement leur allégeance. Début mars, ses Services ont intercepté, dans la région sunnite de Deraa, une voiture de la province de Soueïda à majorité druze, et ont enlevé un appelé druze, retrouvé mort deux jours plus tard. Le régime a attribué ce meurtre aux groupes terroristes sunnnites de Deraa pour opposer les deux provinces voisines. Mais les dignitaires des deux communautés ont coupé court à cette manœuvre et les druzes ont rejoint en masse la révolution. Pour les sanctionner, le chef spirituel druze de Soueida, Ahmed Al-Hajeri, est mort ce samedi 24 mars, officiellement dans un accident de la route. Mais le site « All4Syria » accuse le régime d’avoir assassiné le cheïkh druze. Al-Hajeri a en effet condamné les crimes du régime et refusé d’émettre une fatwa, à la demande de Damas, condamnant la révolution et appelant les Druzes à défendre Assad. C’est le troisième dignitaire druze à trouver la mort en quelques semaines, dans les mêmes circonstances.
Pour les Chrétiens, leurs chefs sont l’otage du régime. Mais le Vatican semble conscient de la situation et commence à réagir, comme en atteste le démenti cinglant apporté par le Nonce apostolique en Syrie, Mario Zenari, aux mensonges étatiques relayés par Sœur Agnès-Mariam de la Croix. Celle-ci a récemment évoqué « des massacres méthodiques visant les chrétiens à Homs ». Le Nonce apostolique a formellement démenti, dans une déclaration à l’agence italienne Adnkronos (AKI), que « les Chrétiens sont victimes d’épuration à Homs, ou qu’ils y sont menacés par les insurgés ». Ce démenti « ridiculise » non seulement la « religieuse de service affectée à la propagande médiatique », mais aussi le Patriarche maronite Bechara Raï, qui ne cesse de défendre le régime. D’ailleurs, selon le journal « Al-Liwaa », « plusieurs évêques ont tiré la sonnette d’alarme et tenté de rectifier le tir du Patriarche, le mettant en garde contre sa persévérance dans l’erreur et l’appelant à revenir sur ses options syriennes ». Le site « Middle East Transparent » accuse quant à lui l’évêque syriaque orthodoxe d’Alep, Monseigneur Yohanna Ibrahim, de « défendre le régime à travers une contre-offensive médiatique destinée à l’Occident pour neutraliser l’effet dévastateur des courriers électroniques d’Assad et de ses proches. L’évêque tente également de rétablir un contact avec les Américains pour le compte du régime. Il serait aussi chargé d’identifier les responsables syriens qui s’apprêtent à se retourner contre le régime ». La même source ajoute que « l’évêque d’Alep se serait rendu récemment au Liban, avec le général Assef Chawkate, afin de mettre en place cette stratégie en étroite coordination avec leur bras médiatique, Agnès-Mariam de la Croix, et d’autres chrétiens libanais dont Karim Pakradoni ».
Comme Monseigneur Zenari, l’Armée Syrienne Libre affirmait elle aussi, et toujours selon Adnkronos que « les Chrétiens sont engagés dans la révolution, accueillent et hébergent leurs frères et voisins musulmans contraints de fuir les horreurs d’Assad et n’ont rien à craindre ». L’Armée Syrienne Libre compte par ailleurs de très nombreux chrétiens dans ses rangs. Dans leurs serments, tous ses combattants jurent de « défendre la population, musulmane et chrétienne ». Les Frères musulmans s’étaient déjà engagés dans le même sens, affirmant leur attachement à la démocratie, à un Etat civil, à l’égalité entre les sexes et les ethnies, et refusant l’article 3 de la Constitution stipulant que le président de la République doit être musulman.
Concernant le futur Etat alaouite, les Sunnites sont loin de l’accepter. Ils se considèrent comme ses principaux perdants, eux qui ont déjà été exclus du pouvoir depuis la confiscation du régime par la famille Assad. Ils promettent de tout faire pour mettre en échec ce projet. Les plus optimistes affirment que « Bachar Al-Assad n’aura pas le temps de réaliser son rêve. Un jour il sera capturé et jugé pour ses crimes contre l’humanité ou exécuté comme ses aînés et semblables, Saddam Hussein et Moammar Kadhafi ».
Dario S.

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