jeudi 28 juillet 2011

La "guerre du gaz" entre le Hezbollah et Israël peut-elle sauver Assad et Nasrallah ?


Onze personnes ont été tuées ce mercredi dans les environs de Damas, dans une nouvelle vague de répression. Hier, une dizaine d’autres victimes a été signalée. La répression se poursuit et se durcit sans pour autant entamer la détermination des Syriens. Assad perd toutes ses cartes sauf une : une guerre régionale avec Israël, via le Hezbollah.
La liste des « martyrs de la liberté » en Syrie s’allonge de jour en jour. Le nombre des victimes de la répression en cours, depuis le 15 mars, aurait dépassé les 2.000 morts, plus de 12.000 arrestations, sans parler des blessés évalués à plusieurs dizaines de milliers. Aujourd’hui, onze personnes ont été tuées selon les organisations des droits de l’homme syriennes, notamment lors d’une nouvelle rafle visant des opposants dans la province de Rif Damas. Le régime est pressé de décapiter le mouvement de contestation avant l’arrivée du mois de Ramadan, mois de tous les dangers. Il préparerait une vaste opération contre Homs et sa région, où une trentaine de chars a pris position ce matin (Homs et Talbisseh notamment). Assad veut provoquer un électrochoc par la terreur pour étouffer le soulèvement.

Or, pour les opposants, ces agissements ne font qu’accélérer la chute du régime qui a dores et déjà donné des signes de faiblesse : dimanche, Damas a annoncé une nouvelle loi sur les partis politiques ; mardi, il a concédé une nouvelle loi sur les médias. Or, non seulement ces lois restent sans effets tant que l’article 8 de la Constitution, qui fait du Baas le parti leader de l’Etat et de la société, n’est pas abrogé, mais aussi elles imposent des conditions draconiennes aux futurs partis politiques ; des conditions qui sont en contradiction flagrante avec le comportement du régime.
En effet, pour être autorisés, les futurs partis doivent s’engager à respecter les libertés et la démocratie et à ne pas recourir à la violence. Ils ne doivent pas se fonder autour de valeurs religieuses, ethniques ou raciales... Or, le régime ne respecte pas la non-violence prônée, ni la démocratie, encore moins les libertés. Le parti Baas est en outre fondé autour de l’arabité, et de ce fait, il viole l’article 1 de la future loi sur les partis !!
Ces deux projets de loi, qui seront suivis par un troisième relatif à la loi électorale, doivent encore être examinés et validés par le Parlement. Or, le Parlement manque de crédibilité, les députés ayant été littéralement nommés par le régime et le parti Baas détenant la majorité au sein de cette instance.
L’accélération des réformes, après onze années de promesses jamais tenues par Assad, prouve que le président syrien manœuvre pour gagner du temps, et n’a aucunement l’envie de réformer réellement. Car, toute libéralisation politique signifie la fin de son régime. Les opposants en sont conscients et connaissant le régime, ils excluent qu’il puisse signer sa propre mise à mort. De ce fait, les opposants rejettent les manœuvres d’Assad et promettent la poursuite de leur mouvement jusqu’à la chute du régime.
Evoquant la situation en Syrie, le chef de l’état-major central des forces américaines, Mick Mullen, interrogé par la télévision « Al Horra », a affirmé ce mercredi qu’« un président qui tue son peuple accélère sa chute ». Pour Mullen, le message du peuple syrien est très clair : « il ne veut plus vivre sous la répression et l’humiliation. Assad promet des réformes tout en continuant à tuer son peuple. Un président qui tue son peuple accélère sa chute. Après tout, c’est au peuple syrien de décider de la forme de son futur pouvoir ». Ce nouveau désaveu américain ne souffre d’aucune ambiguïté. Il vient trancher le conflit qui opposait deux courants au sein de l’administration américaine : Denis Ross, favorable au maintien d’Assad au détriment des intérêts du peuple syrien, et Jeffrey Feltman plutôt favorable au peuple. C’est ce dernier qui aurait demandé à l’ambassadeur américain à Damas, Robert Ford, de se rendre à Hama pour la protéger contre la répression (8-9 juillet). Le succès de cette manœuvre aurait convaincu l’Administration et le Département d’Etat qu’il était « plus judicieux de se rapprocher des 22 millions de Syriens et de les protéger, que de soutenir des criminels au pouvoir ».
C’est dans ce contexte que la défection du commandant Abdelsattar Younso, de l’armée de l’air (19ème bataillon, défense aérienne) prend toutes ses dimensions et son importance et fait trembler le régime. Younso rejoint en effet le Mouvement des Officiers Libres et déplore que « la mission de l’armée syrienne de défendre les frontières ait été travestie en la protection d’une bande criminelle au pouvoir qui assassine le peuple ». Il appelle tous les officiers honnêtes à rejoindre le Mouvement des Officiers Libres et promet que le régime n’a plus pour longtemps (voir la vidéo ci-dessous)

Dans ce contexte aussi, des informations font état d’un vent de révolte qui souffle sur les miliciens du régime. Ces « mercenaires » de confession alaouite (en majorité) menacent de ne plus prêter main forte au régime si leurs salaires n’étaient pas versés à temps. Selon des sources syriennes, ils étaient payés autour de 10.000 livres par jour travaillé (par vendredi). Mais étant sollicités plus souvent, presque au quotidien, leurs salaires devenaient plus conséquents pour un employeur (Assad) qui souffre de manque de liquidités. Début juillet, les traitements journaliers ont été réduits à 2.000 Livres, et, depuis une semaine, les miliciens ne sont plus payés.
Notons aussi que plusieurs accrochages ont opposé, ces derniers jours, l’armée syrienne aux miliciens et aux services de renseignement, spécialisés dans la répression. Ces accrochages, qui ne sont pas les premiers, ont eu lieu notamment à Zabadani.
Ces informations semblent se confirmer à la lecture d’un communiqué publié ces derniers jours par les dignitaires de la communauté alaouite, dans lequel ils prennent leur distance avec le régime qualifié de « clanique et familiale » et qui « n’engage par la communauté ». Ils appellent à l’unité du pays et à la mobilisation pour renverser le régime.
Une guerre régionale en perspective ?
La seule carte d’Assad reste, à présent, le Hezbollah au Liban qui en contrôle désormais le gouvernement. Le secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah, a en effet menacé hier soir Israël de représailles si l’Etat hébreu autorisait les explorations pétrolières dans la zone maritime contestée au large du Liban. En l’absence d’une délimitation des frontières maritimes (que le gouvernement libanais lie au règlement du conflit israélo-arabe !), cette question peut servir de casus belli. D’autant plus que Syrie et le Hezbollah ont intérêt à une guerre de diversion. Un tel scénario permet à Damas de respirer et de réprimer loin des regards qui seront alors concentrés sur le conflit avec Israël. Et le Hezbollah n’aura plus à coopérer avec le Tribunal international dans l’affaire Hariri.
Une course contre la montre est ainsi engagée entre, d’une part, le peuple syrien désireux de se libérer après 48 années de pourvoir du Baas, et d’autre part, le régime baassiste qui s’accroche au pouvoir et le Hezbollah qui cherche une bouée de sauvetage.
Source : Mediarabe.info

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