lundi 3 septembre 2012

Qu’est-il arrivé en Egypte ? Par BARRY RUBIN

Brève histoire de la démocratie en Egypte. En février 2011, le régime Moubarak est tombé. Il devait y avoir un Parlement élu en Egypte. Le Parlement a été élu. Son élection a été invalidée. Aujourd’hui, il n’y a pas de Parlement en Egypte.
Les ‘Frères Musulmans’ ont dit qu’ils voulaient un tiers des sièges pour leurs candidats. Puis ils en ont obtenu la moitié. Puis ils ont tout obtenu. Puis ils ont dit qu’ils ne présenteraient pas un président. Puis ils l’ont fait et ont élu leur président. Et eux et les Salafistes ont élu 70% du Parlement. Mais maintenant il n’y a pas de Parlement.
Le Parlement devait réunir une assemblée constituante pour rédiger une Constitution. Il n’y a aucune restriction au pouvoir présidentiel.
Et puis il y avait le Conseil Suprême des Forces Armées, mais cela était supposé restreindre le président des ‘Frères Musulmans’. Et il était supposé être circonscrit par le traité de paix égypto-israélien et par l’espoir d’obtenir l’aide militaire américaine. Mais le président s’en est débarrassé et a renvoyé les deux chefs suprêmes [de l’armée] et placé ses propres généraux. Et il n’y a plus de restriction.
Et l’on nous dit que le gouvernement égyptien a promis de respecter le traité de paix Egypte-Israël. Mais quand il l’a souhaité, le régime a tout simplement violé le traité et envoyé des forces dans la partie Est du Sinaï. Et il a annoncé une alliance avec le Hamas, qui a ouvertement déclaré son désir de faire la guerre contre Israël et de le détruire. Et le Caire n’a pas bronché.
Le régime égyptien a fait plus de dommage économique à Israël en violant son contrat d’expédition de gaz que tout autre régime arabe dans l’histoire du pays, parce qu’Israël a dû dépenser des milliards de dollars pour remplacer ce combustible perdu. C’est pourquoi les taxes en Israël augmentent et que la dépense sociale doit baisser. Le gouvernement américain n’a pas levé le petit doigt pour venir en aide.

Le plan stratégique d’Israël a dû être modifié dans son ensemble pour ajouter un front défensif le long de la frontière avec l’Egypte. De nouvelles unités seront organisées ; de nouvelles barrières construites ; un nouvel équipement commandé et payé.
Said Eddin Ibrahim, probablement le meilleur sociologue du monde arabe et certainement le principal avocat d’une alliance libéraux-islamistes contre les anciens régimes militaires arabes a désormais totalement changé de bord, avertissant que les islamistes veulent détourner le pouvoir et établir des dictatures. Il plaide pour que les occidentaux se réveillent.
Le président Mohamed Morsi a nommé maintenant les dirigeants des principaux journaux égyptiens, stations de radio et réseaux de télévision. Ils comprennent des personnalités odieuses qui se sont vendues au régime Moubarak et qui feront tout ce qu’il demande. Les premières chasses aux journalistes courageux et honnêtes dans leurs enquêtes ont commencé. Les murs se ferment.
Bientôt les généraux seront remplacés ; bientôt les juges seront remplacés, ainsi que les diplomates. En d’autres termes, la bureaucratie intérieure et extérieure du gouvernement de l’Egypte sera transformée. Les anciennes options de sécurité nationale changeront.
La prochaine étape sera le système judiciaire, où des plans sont déjà établis pour éliminer des juges. Il est vrai qu’il y avait beaucoup de juristes corrompus, mais il n’y avait aucune institution en Egypte où il existât davantage d’individus plus courageux et d’avocats de la démocratie. Et c’est cela le problème.
L’intégrité même qui faisait se dresser ces hommes debout contre Moubarak les amènera à faire de même contre les ‘Frères Musulmans’. Et ils n’appliqueront pas la loi de la sharia. Leur vote contre le résultat parlementaire était un avertissement. Ils seront bientôt chassés.
Une prochaine conférence de juges pro-islamistes recommandera des mises en retraite massives ; la nouvelle constitution, écrite par des islamistes, affaiblira les Cours de justice au profit de la sharia’ interprétée par des clercs islamiques Les ‘Frères Musulmans’ s’empareront de l’université Al Azhar et nommeront l’un de leurs hommes comme Cadi en chef, officiel judiciaire musulman. Ils prendront le contrôle des riches dotations religieuses. D’ici un an, l’Egypte sera fondamentalement transformée. Irrévocablement transformée.
Pensez à ce que cela signifie en termes de politique étrangère.

L’auteur est directeur du Centre de Recherche Mondiale des affaires internationales (GLORIA en anglais).

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