vendredi 7 octobre 2011

La nouvelle alliance du Pakistan avec l’Iran


Le réseau Haqqani, un groupe insurgé redouté en Afghanistan, allié des Taliban, n’est pas seulement un « véritable bras armé » de l’Agence de Renseignement Inter-Services (ISI) du Pakistan, selon le responsable sortant du Groupe des chefs d’Etat-Major, l’Amiral Michaël Mullen, mais également celui grâce auquel l’ISI a aidé les terroristes afghans à perpétrer un attentat terroriste contre les soldats de la coalition et l’Ambassade américaine à Kaboul. Mullen avait ajouté que les relations fragiles de l’Amérique avec le Pakistan vont même aller en se détériorant. « Je crains que la relation [avec le Pakistan° iront de mal en pire, et bien plus qu’elle ne va actuellement », avait dit Mullen, quelques jours à peine avant de lancer une « petite bombe » qui a rendu furieux le Gouvernement pakistanais…
“Le réseau Haqqani – qui jouit depuis longtemps du soutien et de la protection du Gouvernement pakistanais et s’affirme, de nombreuses façons, comme un bras stratégique de l’ISI pakistanais – est responsable des attentats du 13 septembre contre l’Ambassade américaine à Kaboul. Il y a des preuves amplement suffisantes que les Haqqani étaient derrière l’attaque du 28 juin, contre l’Hôtel Inter-Continental à Kaboul et le camion piégé du 10 septembre qui a tué 5 Afghans et blessé 96 personnes, dont 77 soldats américains », a affirmé Mullen, le 22 septembre, face à un Comité du Sénat, ajoutant, dans son témoignage, « qu’en soutenant ces groupes, le Gouvernement du Pakistan, et, en particulier, l’armée pakistanaise, continue à miner les chances du Pakistan de se comporter un nation respectée et prospère, dotée d’une authentique influence régionale et internationale ».
Les paroles de Mullen ont provoqué de vives réactions, mais de nombreux hommes politiques américains ont semblé être d’accord avec les suggestions de l’Amiral, non pas de se désengager vis-à-vis du Pakistan, mais plutôt de recadrer la relation. « C’est parce que le Pakistan est une partie du problème dans la région qu’il doit aussi être une partie de sa solution. », affirme Mullen. Plusieurs hommes de lois, cependant, tels que le représentant républicain Ted Poe, sont convaincus que les Etats-Unis ne peuvent plus faire la moindre confiance au Pakistan.
“”De tout temps, avant même que nous découvrions Osama Ben Laden vivant grand train de vie, nous avions de la suspicion envers le Pakistan. Il s’avère qu’ils sont déloyaux, trompeurs et qu’ils constituent un danger pour les Etats-Unis. En envoyant de l’aide au Pakistan, nous finançons notre ennemi, mettons les Américains en danger et minons nos propres efforts dans la région. Ce soi-disant allié reçoit des milliards d’aide de la part des Etats-Unis, tout en soutenant, de l’autre main les terroristes qui nous attaquent. Ils sont déloyaux, trompeurs et sont un danger pour les Etats-Unis. Nous les payons à nous haïr. Désormais, nous les payons pour qu’ils nous envoient des bombes », a déclaré Poe, qui a introduit une législation au Congrès américain, visant à geler l’aide américaine au Pakistan, excepté les fonds destinés à aider à sécuriser les armes nucléaires, ajoutant que cela constituerait le « dernier rodéo » pour Islamabad.
Les Etats-Unis donnent au Pakistan plus de 2 milliards de $ en assistance sécuritaire chaque année, bien que cet été, l’Administration Obama ait décidé de suspendre, voire, en certains cas, annuler, environ un tiers de cette aide cette année. Mis bout à bout, 800 millions de $ d’aide militaire et d’équipement lui sont affectés.
Les responsables pakistanais ont promptement rejeté toutes ces accusations. Le Premier Ministre Yusuf Raza Gilani a averti que les Etats-Unis devait cesser « d’envoyer des messages négatifs » en accusant le Pakistan de soutenir les attentats des terroristes en Afghanistan. Il a affirmé que de telles accusations ne feraient que renforcer les sentiments anti-américains dans son pays. Le Ministre de l’Intérieur Rehman Malik l’a appuyé délibérément : « Si vous dites que c’est l’ISI qui est impliqué dans cet attentat, je le nie catégoriquement… Nous n’avons pas une telle politique qui consisterait à attaquer ou à aider à attaquer, à travers des forces pakistanaises ni à travers aucune forme d’assistance pakistanaise ». La Ministre des affaires étrangères, Hina Rabbani Khar, a déclaré, dans un discours devant l’Assemblée Générale de l’ONU, que peu de pays n’avaient aussi brutalement été ravagés par le terrorisme que le Pakistan, et que 30 000 civils, policiers et membres des forces de sécurité avaient été tués depuis 2002. Khar a affirmé qu’Islamabad est déterminé à éliminer le terrorisme de son territoire, de la région et du monde, et elle a appelé à relancer la coopération internationale pour l’éradiquer.
Le gouvernement pakistanais, cependant, pour prouver aux Etats-Unis aucun engagement à combattre réellement le terrorisme. Dans une interview avec Reuters, le Premier Ministre Yusuf Raza Gilani, a effectivement déclaré que toute action unilatérale militaire des Etats-Unis « visant à pourchasser le réseau Haqqani à l’intérieur du Pakistan constituerait une violation de sa souveraineté ». Dans le même temps, le Pakistan tente de trouver des façons de renforcer des alliances, non seulement avec « l’allié par tous les temps », la China, mais également avec l’Iran. La Ministre des Affaires étrangères Khar, a exprimé la volonté de son pays à augmenter la coopération avec l’Iran dans les domaines aussi bien régionaux qu’internationaux.
 L’agence de presse iranienne Fars a rapporté que le Pakistan et l’Iran souhaitaient approfondir les relations bilatérales dans leurs aspects politiques, économiques, culturels, régionaux et internationaux, et qu’ils avaient exploré des avenues permettant de faciliter des accords bilatéraux. Les deux pays veulent apparemment, en particulier, signer des accords dans divers champs, comprenant l’énergie, la construction de raffineries et un projet de pipeline d’une valeur de plusieurs milliards de dollars, destiné à transférer le gaz iranien à travers le Pakistan, qui a besoin d’énergie. Plus encore, l’Institut de Recherche sur les Média au Moyen-Orient (MEMRI) a rapporté qu’au cours d’une rencontre officielle, le Ministre iranien de l’Intérieur, Mostafa Mohammad Najjar, a déclaré que le Pakistan ne serait pas abandonné à lui-même, quelle qu’en soit l’éventualité, et que l’ennemi du Pakistan est l’ennemi de l’Iran. Clairement, le Ministre iranien fait là référence à « l’ennemi américain ».
Les Etats-Unis ont exprimé leur déception concernant ce dangereux réalignement entre Islamabad et Téhéran, et dit qu’il serait opportun que le Pakistan abandonne le projet de pipeline qui importerait du gaz d’Iran. Comme l’a rapporté le journal pakistanais La Tribune de l’Express, « Les Etats-Unis ont clairement fait savoir qu’ils s’opposaient à la décision du Pakistan d’importer du gaz d’Iran, en allant même aussi loin que de menacer de sanctions si le Pakistan ne se retire pas de cet areangement ». Le journal fait part, cependant, du fait que les responsables du Pakistan se servnt de l’opposition américaine comme d’une occasion pour faire à nouveau pression en vue d’un accord sur le nucléaire civil, selon lequel les Etats-Unis devraient fournir au Pakistan de la technologie nucléaire en vue d’un programme d’énergie civile. Un tel accord avec le Pakistan est hautement improbable, pour autant que Washington se sente concerné par l’arsenal nucléaire d’Islamabad.
Il est certain que les Etats-Unis doivent recadrer leur relation avec Islamabad, tel que le suggère l’Amiral Mullen, mais cela ne sera pas simple pour Washington d’y parvenir : le Pakistan ne se montre pas très enclin à coopérer. Il semble qu’il n’y ait pas la moindre intention de trouver un dénominateur commun pour lequel commencer à travailler pour trouver des solutions pacifiques pour l’avenir de la région. Le Pakistan est, à la fois, le problème et la solution, répètent stupidement les experts à Washington DC ; mais, pour le moment, le Gouvernement à Islamabad semble devenir de plus en plus le problème, le plus récent « mauvais garçon » du lointain Moyen-Orient.
 Par Anna Mahjar-Barducci
5 Octobre 2011 à 4:30 am


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