mardi 26 mars 2013

Pourquoi la Turquie s'est rabibochée avec Israël


1. Les forces armées turques sont lourdement dépendantes à l’égard des technologies militaires israéliennes, depuis les lointaines années de l’alliance étroite entre les deux pays à laquelle la Turquie a coupé court. Cette dépendance s’applique plus particulièrement, à ses drones, la colonne vertébrale des armées modernes actuelles. Elle concerne, également, l’énorme transaction en cours, dans le cadre de la vente à la Turquie d’avions américains AWACs, fabriqués par Boeing, dotés de moyens de surveillance électronique. 

Boeing s’est trouvé dans l’incapacité de livrer les avions sans le consentement de Jérusalem, parce qu’un composant essentiel, les systèmes d’alerte précoce, est conçu par Israël. Ce consentement est resté en suspens, face aux besoins urgents de la Turquie et à l’impatience de la compagnie américaine d’aviation de consommer cet accord.

La Turquie a grand besoin de ces avions – non seulement pour observer les évènements dans la proche Syrie, bouleversée par la guerre, mais surtout pour compléter sa ligne de défense anti-aérienne contre les missiles balistiques iraniens. Sans ces AWACs, le système avancé de radars FBX que les Etats-Unis a stationné sur la base aérienne turque de Kurecik n’est que partiellement opérationnel. La batterie de Kurecik est raccordée à son équivalent, présent sur la base américaine dans le Neguev israélien, un fait qu’Ankara choisit d’ignorer.


2. Au regard de la tourmente en Syrie, le noyau dur des exportations de la Turquie, destinées au Golfe Persique et à des lieux plus éloignés à l’Est, ont été détournées vers les ports israéliens d’Haïfa et d’Ashdod, alors qu’il y a de cela environ un an, elles traversaient la Syrie la Jordanie et l’Arabie Saoudite.

Puisque qu’on ne perçoit aucun terme au conflit syrien, ni à la fermeture de la frontière turco-syrienne, de plus en plus, le trafic des exportations de Turquie chemine par le port d’Haïfa, puis par le réseau ferroviaire à travers Israël et la Jordanie. Les produits turcs, chargés en direction de l’Europe et des Etats-Unis sont, de la même façon, détournés vers les ports israéliens, du fait que les ports égyptiens dysfonctionnent de plus en plus, à cause de la crise économique que subit ce pays.


3. Au cours de la première année du soulèvement syrien, alors que Davutoglu voyageait encore fréquemment vers Damas, pour discuter avec Bachar Al Assad, Ankara entretenait de grands espoirs de devenir un acteur essentiel de la résolution de la débâcle syrienne. Mais, il a aussi cherché à conclure un arrangement avec le Hezbollah libanais, l’allié de Bachar Assad, de façon à faire obstruction à l’exploration des champs de Gaz et de Pétrole, dans l’Est de la Méditerranée.
  

Trois ans passant, les dirigeants turcs se sont réveillés et ont commencé à réaliser qu’ils auraient mieux fait de se dépêcher de sauter dans le train en marche de la production énergétique israélienne, appuyée par les Etats-Unis, sans quoi, ils passeraient à côté d’un développement économique exceptionnellement lucratif, c’est-à-dire, l’ouverture à venir de la route d’exportation du Gaz méditerranéen vers l’Europe.


4. La Turquie, Israël et la Jordanie sont dans le même bateau, en tant que cibles de l’utilisation à grande échelle des armes chimiques et biologiques, par la Syrie. Ce sujet était au sommet de l’agenda des pourparlers du Président Obama avec le Roi Abdallah de Jordanie, vendredi 21 mars, à Amman, après avoir exploré ce thème auprès du Premier Ministre d’Israël, à Jérusalem.

Obama leur a présenté son plan visant à consolider, au sein d’un unique Quartier Général turco-israélo-jordanien, mené par les Etats-Unis, les centres de commandement séparés instaurés il y a six mois, dans chacun de ces pays, pour combattre l’utilisation d’armes non-conventionnelles. Ce commandement unifié devrait se tenir prêt à lancer des unités issues de ces quatre armées, dans des actions terrestres et aériennes coordonnées, à l’intérieur de la Syrie, au moindre signal de Washington. Le Président américain a occupé ses visites à Jérusalem et Amman à finaliser les termes de ce plan d’urgence avec Netanyahou et Abdallah, alors que le Secrétaire d’Etat John Kerry s’entretenait avec Erdogan à Ankara.

Cependant, cet effort réunissant quatre armées, visant à combattre la menace chimique syrienne aurait pu ne jamais prendre son envol, à cause du fait qu’Ankara et Jérusalem se trouvaient en mauvais termes pour dialoguer. Cela durait déjà depuis trois ans, depuis qu’Erdogan a suspendu les relations militaires avec Israël et réduit les liens diplomatiques, en exigeant des excuses israéliennes pour l’incident du Mavi Marmara, des compensations pour ses victimes et l’allègement du blocus naval autour de Gaza.

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