jeudi 14 mars 2013

Le nouveau pape traumatise les progressistes

C’est comme lors de l’élection de Joseph Ratzinger. Les journalistes avaient prédit qu’en tous les cas, lui, Ratzinger, ne serait pas élu. Même scénario avec Jorge Mario Bergoglio : hier soir sur les chaines de télévisions, les journalistes étaient consternés. Ils avaient potassé les curriculum vitae de plein de cardinaux. Sauf celui de Bergoglio. Maintenant, ils vont lui cracher dessus. C’est du reste déjà le cas. Après le pape des Jeunesses hitlériennes, voici le pape de la dictature militaire argentine. A peine élu, le nouveau pape traumatise les progressistes. Je sens que nous allons bien rire durant ce pontificat à lire les chroniques des vaticanistes amers et frustrés.
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ZUT – LE NOUVEAU PAPE N’EST PAS FREUDO-MARXISTE
 
Sandro Magister : En élisant pape, au cinquième tour de scrutin, Jorge Mario Bergoglio, l’archevêque de Buenos Aires, le conclave a accompli un acte aussi surprenant que génial. Surprenant pour ceux – presque tout le monde – qui n’avaient pas remarqué, ces jours derniers, que son nom revenait vraiment dans les conversations entre cardinaux. Son âge relativement avancé, 76 ans et trois mois, incitait à le classer plutôt parmi les grands électeurs que parmi les élus possibles.
Sandro Magister : Au conclave de 2005 c’est le contraire qui lui était arrivé. Bergoglio était l’un de ceux qui souhaitaient le plus que Joseph Ratzinger soit élu pape. Et il avait recueilli, contre son gré, précisément les voix de ceux qui voulaient empêcher l’élection de Benoît XVI. Il est de fait que l’un et l’autre sont devenus papes. Bergoglio sous le nom inédit de François. Un nom qui est le reflet de sa vie humble. Devenu archevêque de Buenos Aires en 1998, il ne s’est pas installé dans le riche archevêché adjacent à la cathédrale. Il est allé habiter dans un petit appartement tout proche, avec un autre évêque âgé. Le soir c’est lui qui faisait la cuisine. Il se déplaçait peu en voiture et prenait l’autobus en soutane de simple prêtre.
Sandro Magister : Mais c’est aussi un homme qui sait gouverner. Avec fermeté et à contre-courant. C’est un jésuite – le premier à être devenu pape – et, dans les terribles années Soixante-Dix, alors que la dictature faisait rage et que certains de ses confrères étaient prêts à prendre les armes et à appliquer les leçons de Marx, il s’opposa énergiquement à cette dérive, en tant que provincial de la Compagnie de Jésus en Argentine. Il s’est toujours soigneusement tenu à distance de la curie romaine. Il est certain qu’il voudra qu’elle soit allégée, propre et loyale.
Sandro Magister : C’est un pasteur à la doctrine solide et au réalisme concret. Aux Argentins qui souffraient de la faim il a donné beaucoup plus que du pain. Il les a invités à reprendre aussi en main le catéchisme. Celui des dix commandements et des béatitudes. « Le chemin de Jésus, c’est cela », disait-il. Et ceux qui suivent Jésus comprennent que « fouler aux pieds la dignité d’une femme, d’un homme, d’un enfant, d’une personne âgée, est un péché grave qui crie vengeance au ciel », et ils décident de ne plus le faire. La simplicité de sa vision, on peut la percevoir dans la sainteté de sa vie. En quelques mots simples, les premiers qu’il ait prononcés en tant que pape, il a tout de suite conquis la foule qui remplissait la place Saint-Pierre. Il l’a fait prier en silence. Et il l’a également fait prier pour son prédécesseur Benoît XVI, qu’il n’a pas appelé « pape », mais « évêque ». On n’en est qu’au début des surprises.
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ZUT – BERGOGLIO A DIT DES CHOSES POLITIQUEMENT INCORRECTES
 
Jorge Mario Bergoglio, né le 17 décembre 1936 à Buenos Aires en Argentine, est un cardinal argentin, jésuite et archevêque de Buenos Aires depuis 1998. En 2007, il déclarait : Nous disons que nous ne sommes pas d’accord avec la peine de mort, qu’elle est une injustice, mais en Argentine nous avons la peine de mort. On peut condamner à mort un enfant conçu à la suite du viol d’une femme retardée mentale. Soyons conscients que nous ne pourrons pas occulter la culture du rejet avec des euphémismes.
 
 
En 2009 : Chaque enfant doit être accompagné pour toute la vie. Il faut veiller à ce que les enfants grandissent sainement, soient suffisamment nourris, reçoivent une bonne éducation fondée sur de solides principes moraux. C’est une bataille à soutenir contre les nombreux attentats à la vie humaine, contre la diffusion de la culture de mort. Une bataille, qui doit être soutenue aussi pour les personnes âgées, qui sont la sagesse de la vie, et quand la vie humaine est proche de s’éteindre. Cela, évidemment, demande des dévouements et du sacrifice. Nous ne pouvons pas embrasser la culture de la vie si nous ne mettons pas nos racines en Jésus, si nous ne sommes pas unis à lui comme le sarment de la vigne au tronc. Parce que Jésus est le patron de la vie. Il s’est défini comme le chemin, la vérité et la vie. Ce n’est qu’avec Jésus que nous pouvons répandre cette ardeur, que nous pouvons avoir cette ferveur pour proclamer le message de la vie.
 
Et en 2010, à propos de la dénaturation du mariage : Ne soyons pas naïfs : il ne s’agit pas d’un simple combat politique : c’est le projet de détruire le plan de Dieu. Il ne s’agit pas d’un simple projet législatif, celui-ci est seulement un instrument, mais une « movida » du père du mensonge qui prétend embrouiller et tromper les enfants de Dieu. Jésus nous dit que, pour nous défendre face à cet accusateur mensonger, il nous enverra l’Esprit de Vérité. Aujourd’hui la Patrie, devant cette situation, a besoin de l’assistance spéciale de l’Esprit Saint qui mette en lumière de la Vérité au milieu des ténèbres de l’erreur ; elle a besoin de cet Avocat qui nous défende des sortilèges de tant de sophismes par lesquels on tente de justifier ce projet de loi, qui embrouillent et trompent même des gens de bonne volonté.
C’est pourquoi j’ai recours à vous et vous demande oraison et sacrifices, les deux armes invincibles qu’avouait détenir la petite sainte Thérèse. Suppliez le Seigneur pour qu’Il envoie son Esprit aux Sénateurs qui doivent exprimer leur vote. Qu’ils ne fassent pas, mus par l’erreur ou par des situations de conjoncture, mais selon ce que la loi naturelle et la loi de Dieu leur dicte. Demandez-le pour eux, pour leurs familles : que le Seigneur les visite, les fortifie et les console. Demandez qu’ils fassent un grand bien pour la Patrie.
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ZUT – BERGOGLIO A ECRIT DES CHOSES POLITIQUEMENT INCORRECTES
 
De façon plus détaillée, on relira la lettre du Cardinal Bergoglio aux quatre monastères de Carmélites de Buenos Aires, à l’occasion du vote au Sénat de la République argentine sur le projet de loi visant à légaliser le mariage homosexuel et l’adoption : J’écris ces quelques lignes à chacune d’entre vous qui êtes dans les quatre monastères de Buenos Aires. Le peuple argentin devra faire face dans les prochaines semaines à une situation dont l’issue peut blesser gravement la famille. Il s’agit du projet de loi qui va permettre le mariage entre personnes du même sexe.
Ce qui est en jeu ici, c’est l’identité et la survie de la famille: père, mère et enfants. Ce qui est en jeu, c’est la vie de nombreux enfants qui seront par avance victimes de discrimination et privés de la maturation humaine dont Dieu a voulu qu’elle arrive avec un père et une mère. Ce qui est en jeu, c’est le rejet total de la loi de Dieu, gravée dans nos cœurs. Je me souviens d’une phrase de sainte Thérèse, parlant de sa maladie infantile.
Elle dit que l’envie du démon voulait se venger sur sa famille de l’entrée au Carmel de sa sœur aînée. Ici aussi, il y a l’envie du diable, par lequel le péché est entré dans le monde: une envie qui cherche astucieusement à détruire l’image de Dieu, c’est-à-dire l’homme et la femme qui reçoivent le commandement de croître, se multiplier et dominer la terre. Nous ne sommes pas naïfs: ceci n’est pas simplement une lutte politique, mais une tentative destructive du plan de Dieu.
Ce n’est pas seulement un projet de loi, celui-ci n’est qu’un instrument, mais il s’agit d’une manœuvre du père du mensonge qui cherche à embrouiller et à tromper les enfants de Dieu. Et Jésus dit que pour nous défendre contre cet accusateur menteur, il nous enverra l’Esprit de Vérité. Aujourd’hui, la Patrie, dans cette situation, a besoin de l’assistance spéciale de l’Esprit Saint qui apporte la lumière de la vérité au milieu des ténèbres de l’erreur. Elle a besoin de cet Avocat pour nous défendre du charme de tant de sophismes avec lesquels on essaie à tout prix pour justifier ce projet de loi, et de confondre et tromper même les personnes de bonne volonté.
C’est pourquoi je m’adresse à vous, et je demande prière et sacrifice, les deux armes invincibles de Sainte-Thérèse. Invoquez le Seigneur afin qu’il envoie son Esprit sur les sénateurs qui seront engagés à voter. Qu’ils ne le fassent pas, animés par l’erreur ou par des situations contingentes, mais selon ce que la loi naturelle et la loi de Dieu leur disent. Priez pour eux et leurs familles que le Seigneur les visite, les renforce et les réconforte. Priez pour que les sénateurs fassent un grand bien au pays. Le projet de loi sera débattu au Sénat après le 13 Juillet. Nous nous tournons vers Joseph, Marie et l’Enfant et nous leur demandons avec ferveur de défendre la famille argentine à ce moment particulier.
Rappelons-nous ce que Dieu dit à son peuple dans un moment de grande détresse: «Cette guerre n’est pas la vôtre, mais celle de Dieu». Qu’ils nous secourent, nous défendent et nous accompagnent dans cette guerre de Dieu. Merci pour ce que vous ferez dans cette lutte pour la patrie. Et s’il vous plaît, je vous demande aussi de prier pour moi. Que Jésus vous bénisse et que vous garde la Sainte Vierge. Avec toute mon affection.
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ZUT – IL N’A JAMAIS ETE CHRSITO-MARXISTE
 
Sur le passé du nouveau pape, les progressistes alter-chrétiens Marie-Lucile Kubacki et Jean Mercier avaient déjà écrit : Né en décembre 1936, dans une famille d’origine italienne émigrée en Argentine, une famille de travailleurs de chemins de fer de la région de Turin, il grandit au milieu de sept frères et sœurs dans un milieu modeste. Le jeune Jorge boucle un diplôme de chimie en dépit d’une grande fragilité physique (il ne respire qu’avec un poumon depuis l’âge de 20 ans) avant d’entrer chez les jésuites. Ce profil intellectuel de grandes capacités gravit les échelons de la compagnie de Jésus, jusqu’à en devenir, en 1973, le provincial, à l’âge de seulement 36 ans. Il tiendra le poste pendant six ans. Bergoglio s’en tient à une vision traditionnelle – voire rigoriste – de la spiritualité ignacienne, ce qui le met en porte-à-faux avec sa base jésuite, séduite alors par la théologie de la libération.
Ce sont alors les années de junte militaire en Argentine et de nombreux prêtres, y compris Jésuites, sont attirés par la théologie de la libération. En tant que provincial des Jésuites, Bergoglio a insisté sur une lecture plus traditionnelle de la spiritualité ignacienne, exigeant que les Jésuites continuent à travailler dans les paroisses du personnel et agissent comme des aumôniers plutôt que de se tourner vers l’activisme politique.
En 1979, il est mis au placard par le chef des jésuites, Pedro Arrupe, pour n’avoir pas été assez solidaire dans le bras de fer qui oppose la Compagnie de Jésus (ndmg – devenue néo-marxiste) au pape. La traversée du désert durera douze longues années. Reclus dans des couvents, Bergoglio se tait, se contentant de dire la messe et de confesser. Jusqu’au jour où le pape le nomme évêque auxiliaire de Buenos Aires en 1992.
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ZUT – IL EST LATINO MAIS PAS GAUCHO
 
De son côté, Daniel Schneidermann nous livre un billet humoristique : La biographie du « pape du bout du monde » n’était pas prête. Déroute des « vaticanistes » patentés, instants de flottement quand fut annoncé le nom de Bergoglio, l’archevêque de Buenos Aires. Les mystères de l’Eglise, ajoutés à ceux de l’Amérique du Sud, c’est trop pour les médias généralistes français: seuls furent livrés, dans les premières secondes, des éléments anecdotiques sur la vie du nouveau François Ier (il est très proche des pauvres, et il lui arrive, savez-vous, de prendre le bus), au détriment d’autres éléments plus substantiels.
La dimension biographique, certes, ne résume pas à elle seule l’événement de l’élection d’un pape latino. Elle ne dispense pas d’une étude fine de l’Eglise sud-américaine hier et aujourd’hui, de son poids dans le catholicisme mondial, et autres sujets de fond. Mais comme toujours, le « sujet qui fâche », et la manière dont il est traité ou occulté, est le meilleur indicateur de la santé journalistique, seul aspect, comme chacun sait, qui nous intéresse ici. Du reste, les enquêtes sérieuses seront faites plus tard. Sur les papes du bout du monde, il ne faut pas trop demander à l’info en temps réel.
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ZUT – IL EST JESUITE, FRANCISCAIN, MAIS CONSERVATEUR
 
Bénédicte Drouin souligne la dimension à la fois jésuite et franciscaine du nouveau pape : Il choisit en 2009 de loger dans un bidonville chez un de ses prêtres menacé de mort par des narcotrafiquants. Habileté, proximité dans l’exercice de sa charge pastorale, des qualités précieuses lorsque l’on mesure les lourds défis du nouveau pape. Il est engagé dans les grands combats pour la défense de la vie humaine à chaque fois qu’elle est menacée, souligne l’agence Zenit dans son édition du 13 mars.
Ainsi il dénonce la légalisation du mariage homosexuel, de la drogue, de l’avortement, l’esclavage des jeunes « souvent moins bien traités que des chiens ». Il porte une attention toute particulière à la défense des plus pauvres. Avec une parole libre, il se positionne, sans tomber dans les pièges tels celui de la politisation et de la violence de la théologie de la libération, tout en fustigeant l’hypocrisie de prêtres refusant le baptême à des enfants nés hors mariage. La simplicité et l’humilité franciscaines sont révélées par le choix inattendu du nom du « Pauvre d’Assise ».
En Argentine, la simplicité de vie du cardinal de Buenos Aires contraste avec certaines pratiques ecclésiales, il fuit l’archevêché trop fastueux, se passe de chauffeur, préfère régulièrement les derniers rangs aux premiers. Des qualités qui ne peuvent que renforcer son autorité au moment où les problèmes agitant la curie deviennent urgents à régler. Plus attendue, mais aussi significative, est la date du 19 mars, fête de l’humble saint Joseph, pour la messe inaugurale de son pontificat.
A propos de la vivacité intellectuelle et l’ardeur missionnaire jésuites, la vivacité intellectuelle est la première à souligner : le pape, docteur en philosophie, polyglotte, a rédigé sa thèse de philosophie en allemand, à Fribourg. Ses proches disent qu’il se lève dès 4h30 pour prendre le temps de lire. Deuxième qualité de la compagnie de Jésus : son audace missionnaire. Elle donnera du souffle à l’Église catholique confrontée à la montée de l’islam sur plusieurs continents ou à la disparition de la foi catholique dans les pays occidentaux.
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QUI EST EXACTEMENT CE NOUVEAU PAPE
 
L’Osservatore romano noud livre une première biographie : Le premier pape américain est le jésuite argentin Jorge Mario Bergoglio, 76 ans, archevêque de Buenos Aires. C’est une figure de premier plan pour tout le continent et un pasteur simple et très aimé dans son diocèse, qu’il a visité en long et en large, aussi en métro et en autobus, au cours des quinze ans de son ministère épiscopal. « Mes gens sont pauvres et je suis un des leurs », a-t-il dit à plusieurs reprises pour expliquer son choix d’habiter dans un appartement et de préparer lui-même ses repas. Il a toujours recommandé à ses prêtres la miséricorde, le courage apostolique et d’ouvrir les portes à tous.
Le pire qui puisse arriver dans l’Eglise, a-t-il expliqué à plusieurs occasions, « est ce que de Lubac appelle la mondanité spirituelle », qui signifie « se mettre soi-même au centre ». Et quand il cite la justice sociale, il invite d’abord à reprendre en main le catéchisme, à redécouvrir les dix commandements et les béatitudes. Son projet est simple: si l’on suit le Christ, l’on comprend que « piétiner la dignité d’une personne est un péché grave ».
Malgré son caractère timide – sa biographie officielle ne fait que quelques lignes, au moins jusqu’à sa nomination comme archevêque de Buenos Aires – il est devenu un point de référence pour ses fortes prises de position lors de la dramatique crise économique qui a bouleversé son pays en 2001. Il né dans la capitale argentine le 17 décembre 1936, fils d’émigrants piémontais: son père Mario est comptable, employé des chemins de fer, tandis que sa mère, Regina Sivori, s’occupe de la maison et de l’éducation de ses cinq enfants.
Diplômé comme technicien en chimie, il choisit ensuite la voie du sacerdoce en entrant au séminaire diocésain de Villa Devoto. Le 11 mars 1958 il passe au noviciat de la Compagnie de Jésus. Il complète ses études de lettres au Chili et en 1963, revient en Argentine et obtient une maîtrise en philosophie au collège saint Joseph à San Miguel. Entre 1964 et 1965 il est professeur de littérature et psychologie au collège de l’Immaculée de Santa Fé et en 1966 il enseigne les mêmes matières au collège du Sauveur à Buenos Aires. De 1967 à 1970 il étudie la théologie et obtient une maîtrise toujours au collège Saint-Joseph.
Il a été ordonné prêtre le 13 décembre 1969 par l’archevêque Ramón José Castellano. Il poursuit sa préparation entre 1970 et 1971 à Alcalà de Henares, en Espagne, et le 22 avril 1973 il émet sa profession perpétuelle chez les jésuites. A nouveau en Argentine, il est maître des novices à Villa Barilari à San Miguel, professeur à la faculté de théologie, consulteur de la province de la Compagnie de Jésus ainsi que recteur du Collège.
Le 31 juillet 1973 il est élu provincial des jésuites d’Argentine, charge qu’il occupera pendant six ans. Il reprend ensuite son travail dans le domaine universitaire et, entre 1980 et 1986, il est à nouveau recteur du collège Saint-Joseph, et curé encore à San Miguel. En mars 1986 il se rend en Allemagne pour terminer sa thèse de doctorat; ses supérieurs l’envoient ensuite au collège du Sauveur à Buenos Aires puis à l’église de la Compagnie dans la ville de Cordoba, comme directeur spirituel et confesseur.
C’est le cardinal Antonio Quarracino qui le veut comme son étroit collaborateur à Buenos Aires. Ainsi, le 20 mai 1992, Jean-Paul II le nomme évêque titulaire d’Auca et auxiliaire de Buenos Aires. Le 27 juin, il reçoit dans la cathédrale l’ordination épiscopale précisément des mains du cardinal. Il choisit comme devise Miserando atque eligendo et insère dans son blason le christogramme IHS, symbole de la Compagnie de Jésus.
Il accorde son premier entretien en tant qu’évêque à un petit journal paroissial, « Estrellita de Belém ». Il est immédiatement nommé vicaire épiscopal de la zone Flores et le 21 décembre 1993, il reçoit également la charge de vicaire général de l’archidiocèse. Ce n’est donc pas une surprise lorsque, le 3 juin 1997, il est promu archevêque coadjuteur de Buenos Aires. Moins de neuf mois plus tard, à la mort du cardinal Quarracino, il lui succède, le 28 février 1998, comme archevêque, primat d’Argentine et ordinaire pour les fidèles de rite oriental résidant dans le pays et dépourvus d’ordinaire de leur propre rite.
Trois ans plus tard, lors du Consistoire du 21 février 2001, Jean-Paul II le crée cardinal, lui assignant le titre de saint Roberto Bellarmino. Il invite les fidèles à ne pas se rendre à Rome pour fêter son cardinalat et à destiner aux pauvres l’argent du voyage. Grand chancelier de l’Université catholique argentine, il est l’auteur des livres Meditaciones para religiosos (1982), Reflexiones sobre la vida apostólica (1986) et Reflexiones de esperanza (1992).
En octobre 2001, il est nommé rapporteur général adjoint à la Xe assemblée générale ordinaire du Synode des évêques, consacrée au ministère épiscopal. Une tâche qui lui est confiée au dernier moment en remplacement du cardinal Edward Michael Egan, archevêque de New York, contraint à rester dans son pays en raison des attaques terroristes du 11 septembre. Lors du synode, il souligne en particulier la « mission prophétique de l’évêque », son identité de « prophète de justice », son devoir de « prêcher sans cesse » la doctrine sociale de l’Eglise, mais également d’« exprimer un jugement authentique en matière de foi et de morale ».
Entre temps, en Amérique latine, sa figure devient toujours plus populaire. Cependant, il ne perd pas la sobriété de son caractère et son style de vie rigoureux, que certains définissent presque « ascétique ». C’est dans cet esprit qu’en 2002, il refuse la nomination comme président de la Conférence épiscopale argentine, mais trois ans plus tard, il est élu, puis reconfirmé pour un nouveau triennat en 2008. Entre temps, en avril 2005, il participe au Conclave au cours duquel est élu Benoît XVI.
En tant qu’archevêque de Buenos Aires – diocèse qui possède plus de trois millions d’habitants – il pense à un projet missionnaire centré sur la communion et sur l’évangélisation. Les quatre objectifs principaux sont: des communautés ouvertes et fraternelles; participation active d’un laïcat conscient: évangélisation adressée à tous les habitants de la ville; assistance aux pauvres et aux malades. Il vise à ré-évangéliser Buenos Aires, « en tenant compte de ceux qui y vivent, de sa configuration, de son histoire ». Il invite les prêtres et les laïcs à travailler ensemble. En septembre 2009, il lance au niveau national la campagne de solidarité pour le bicentenaire de l’indépendance du pays: deux cents œuvres de charité à réaliser d’ici 2016. Et, sur le plan continental, il nourrit de fortes espérances dans le sillage du message de la Conférence d’Aparecida en 2007, qu’il va jusqu’à définir « l’Evangelii nuntiandi de l’Amérique latine ».
Jusqu’au début de la vacance du siège, il était membre des Congrégations pour le culte divin et la discipline des sacrements, pour le clergé, pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique; du Conseil pontifical pour la famille et de la Commission pontificale pour l’Amérique latine.
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LE NOUVEAU PAPE A DU PAIN SUR LA PLANCHE
 
Jean-Marie Guénois dans le Figaro écrit : Outre la remise en ordre de la curie, le nouveau pape, François, retrouve entier l’immense chantier de l’évangélisation. Les compteurs sont au rouge à peu près partout. En Europe, on observe un vieillissement accéléré du clergé et une chute est à prévoir de la pratique religieuse dans les vieux bastions comme la Pologne et l’Italie, mais on note un renouveau inattendu parmi une jeune génération, aussi minoritaire que décidée. En Afrique, le catholicisme est en expansion, mais l’islam également, tout comme le protestantisme évangélique. En Asie, idem, l’expansion existe dans les pays touchés par le christianisme, tout reste à faire encore pour une religion perçue comme étrangère à la culture dominante.
En Amérique, il s’agit de retrouver un second souffle. Au sud, pour reprendre la main sur les évangéliques protestants qui ont courtisé les classes les plus pauvres, déroutées par les errements de la Théologie de la libération – catholique, et de gauche, importés d’Europe, de France et de Belgique notamment – des années 1980. Une dérive idéologique qui se paye très cher aujourd’hui, que l’Argentin Bergoglio connaît et qu’il devrait savoir maîtriser, puisqu’il est issu de ce sous-continent.
En Amérique du Nord, il s’agit de repartir après la longue crise des prêtres pédophiles. Elle est aujourd’hui en partie traitée, mais elle a fait beaucoup de ravages. C’est donc la confiance qu’il faut maintenant rétablir.
Au Moyen-Orient, enfin, c’est un christianisme historique, mais très vivant, qu’il faut soutenir, avant qu’il ne soit submergé par la montée d’un islam agressif et numériquement supérieur. Plus globalement, et après le pontificat relativement « intellectuel » de Benoît XVI, ce nouveau pape a aussi été choisi pour sa capacité de contact avec le plus grand nombre.
Les cardinaux ont, en effet, pensé nécessaire de renouer le fil populaire de la papauté, dans le style Jean-Paul II, mais aussi dans la filiation de Jean XXIII et de Jean-Paul Ier. Une papauté simple, accessible. Mais cela reste un défi, car un nouveau style reste à inventer. À côté de ces trois chantiers fondamentaux – réformer la curie, mener l’évangélisation, imprimer un style de papauté -, le Pape trouve aussi sur son bureau une série de dossiers plus techniques, mais également prioritaires.
Il va devoir les suivre de près, à moins qu’il ne décide de donner une orientation très nouvelle, ce qui est peut-être prématuré. Il y a d’abord les relations avec la Chine, pays auquel son prédécesseur s’était adressé dans son dernier message de Noël. Il y a ensuite la question des lefebvristes vis-à-vis desquels les gestes de Benoît XVI n’ont pas toujours été compris, en raison des déclarations négationnistes de l’Anglais Williamson, prononcées en 1989 puis réitérées pendant le pontificat de Ratzinger. Il y a encore l’attitude à adopter avec l’islam: la conférence de Ratisbonne de Benoît XVI sur la foi et la raison avait déclenché de vives réactions dans le monde avant qu’un voyage du Souverain Pontife, en Turquie, ne calme les esprits, nous raconte Jean-Marie Guénois dans le Figaro.
Et puis, dossier de l’avenir, il y a enfin celui des jeunes. Comme en 2005, quand le pape, à peine élu, avait fondé en quelque sorte une «génération» Benoît XVI aux JMJ de Cologne, François va inaugurer sa «génération» jeunes aux JMJ de Rio de Janeiro, au Brésil. Ce sera en juillet prochain. Une formidable opportunité pour poser et lancer son pontificat à une échelle mondiale, conclut Jean-Marie Guénois.

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